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Double infanticide post-partum en Gironde: la mère condamnée à 18 ans de réclusion

La mère, qui avait étouffé ses jumelles de trois mois en 2022 en Gironde dans un contexte d'une forte dépression post-partum, a été condamnée vendredi à 18 ans de réclusion criminelle...

La mère, qui avait étouffé ses jumelles de trois mois en 2022 en Gironde a été condamnée vendredi à 18 ans de réclusion criminelle par la cour d'assises de la Gironde © LOIC VENANCE
La mère, qui avait étouffé ses jumelles de trois mois en 2022 en Gironde a été condamnée vendredi à 18 ans de réclusion criminelle par la cour d'assises de la Gironde © LOIC VENANCE

La mère, qui avait étouffé ses jumelles de trois mois en 2022 en Gironde dans un contexte d'une forte dépression post-partum, a été condamnée vendredi à 18 ans de réclusion criminelle par la cour d'assises de la Gironde.

Cette peine, conforme aux réquisitions de l'avocat général, est assortie de sept ans de suivi socio-judiciaire, avec une obligation de soins. Le non-respect de cette mesure entraînerait quatre ans de prison supplémentaires, a décidé la cour au terme d'environ quatre heures de délibération.

"La cour d'assises n'a pas du tout compris ce qu'était la maladie du post-partum", a déploré l'avocat de Jennifer Bertrand, Me Stéphane Guitard. 

En retenant l'altération du discernement, "les magistrats considèrent donc que Mme Bertrand n'avait pas tous ses moyens et toutes ses capacités intellectuelles pour comprendre le geste qu'elle commettait", a-t-il ajouté, regrettant ainsi que la cour n'en ait "pas tiré de conclusions" en imposant une "sanction pénale extrêmement lourde." Il a indiqué ne pas savoir encore si sa cliente souhaitait faire appel. 

L'avocat du père des jumelles, désormais divorcée de la mère, a lui aussi fait part d'une sanction "très sévère". "La dépression du post-partum, ici, elle est évacuée", a estimé Me Charles Dufranc. "Le problème, c'est que la notion d'altération, personne ne peut la définir, mais c'est elle qui fait tenir toute la décision. C'est un oxymore vertigineux", selon lui.

Echec" du traitement

Jennifer Bertrand, 37 ans, n'a pas réagi à l'énoncé du verdict, gardant la tête baissée.

"Depuis que les deux personnes les plus importantes au monde pour moi sont parties, ma vie s'est arrêtée. Je les aime plus que tout et pour moi, (leur absence, ndlr) c'est la pire des sentences", avait-elle déclaré plus tôt dans la journée, la voix étranglée par l'émotion.

Cette femme, qui dit avoir vécu une véritable "descente aux enfers" après la naissance de ses jumelles, a reconnu avoir, le 19 décembre 2022, posé leurs doudous sur le visage d'Ambre et d'Emma, avant d'appuyer avec sa main pendant "une minute environ", selon elle, pour les "calmer" alors qu'elles étaient "agitées".

"C'est un geste fort, un geste déterminé qui n'a rien de naturel", qui est "très loin du geste d'apaisement", a affirmé lors de ses réquisitions l'avocat général Martin Viver-Darviot.

"On peut se demander si ce doudou, posé sur le visage des nourrissons, n'avait pas pour objet de cacher leurs visages et de ne pas affronter le regard de ses filles qui, au-delà du fait de s'agiter, ont pu convulser", a-t-il ajouté.

À l'instar des experts psychiatriques, le représentant du ministère public a demandé aux jurés "d'écarter l'abolition du discernement" mais d'en retenir "l'altération".

"Épuisée", atteinte d'une anxiété "massive", incapable "de supporter les pleurs de ses enfants", elle "n'était plus en capacité de trouver de l'énergie pour ses filles", a-t-il estimé, en pointant "l'échec" du traitement de sa dépression post-partum.

Impasse

Après l'accouchement, cette mère avait passé deux mois dans une unité psychiatrique spécialisée et elle était toujours sous médicaments, suivie en hôpital de jour, au moment des faits.

Une période qu'elle décrit comme "une descente aux enfers". "Je me sentais nulle, nulle, j'avais envie de mourir", avait confié jeudi à la cour celle qui se renseigna aussi, à l'époque, sur l'adoption ou le placement des enfants.

"On peut se demander si Mme Bertrand n'était pas dans une situation d'impasse et que la solution qu'elle a trouvée, c'était de supprimer la principale source de ses angoisses", a supposé l'avocat général.

Me Guitard avait plaidé l'abolition du discernement de l'accusée qui était dans un "isolement familial, psychologique et psychiatrique évident", à l'origine de son geste selon lui.

Jennifer Bertrand "n'avait pas la notion du temps et peut-être de l'espace, elle ne pouvait plus raisonner" et en aucun cas, "elle n'a voulu éteindre ses deux petits rayons de soleil", a martelé son autre avocat, Me Béatrice Ceccaldi.

"On ne tue pas à midi pour commander à 13H00 des accessoires de puériculture qui ne serviront jamais. C'est irrationnel", avait jugé Me Dufranc, constatant aussi "un échec thérapeutique total" dans ce dossier.

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