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Apprentissage : un levier en péril pour les TPE ?
Alors que les tensions économiques s’accentuent pour les très petites entreprises (TPE), l’apprentissage continue de faire ses preuves sur le terrain. C’est ce que révèle la 80ᵉ édition du Baromètre Fiducial*, qui dresse un état des lieux contrasté : si les dirigeants saluent massivement l’impact positif de l’alternance, ils redoutent de plus en plus les effets des récentes restrictions budgétaires.

Parmi les dirigeants de TPE comptant au moins un salarié, plus d’un sur deux (52 %) déclare avoir déjà eu recours à l’apprentissage ou au contrat de professionnalisation au cours des dix dernières années. Et ils sont nombreux à en faire un usage régulier : près de deux sur 10 y recourent de manière continue ou quasi-permanente. Dans le détail, ce sont les patrons des plus grandes TPE qui sont parmi les plus nombreux à avoir eu recours à ce dispositif (+12 points pour celles de 6 à 9 salariés et +15 points pour celles de 10 à 19 salariés, par rapport à la moyenne). Les trois quarts des chefs d’entreprise interrogés considèrent que l’apprentissage est adapté aux besoins des petites entreprises comme les leurs. Au-delà de l’usage, c’est surtout la perception de l’alternance qui frappe : 84 % des dirigeants ayant testé ce dispositif en ont une bonne image, et 82 % estiment que l’apprentissage a eu un impact positif sur leur entreprise. Parmi eux, 20 % évoquent même un effet « très positif ».
Un outil de fidélisation des jeunes recrues
Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre qualifiée, les TPE voient dans l’apprentissage un moyen efficace de recruter durablement : 56 % des dirigeants ayant embauché un apprenti déclarent l’avoir conservé à l’issue du contrat, un chiffre en forte hausse par rapport à 2011 (où ils étaient seulement 37 %). Et pour 85 % d’entre eux, l’apprentissage facilite le recrutement. L’adéquation aux besoins des petites structures est elle aussi en nette progression : 77 % des dirigeants considèrent aujourd’hui que le dispositif est bien calibré pour les TPE et 78% que les formations proposées en apprentissage permettent de s’adapter rapidement à l’évolution des métiers ou à l’émergence de nouveaux métiers.
Des inquiétudes face aux coupes budgétaires
Pour autant, cette dynamique pourrait s’essouffler. Les aides financières restent un critère déterminant pour les TPE : 89 % des patrons valorisent les dispositifs fiscaux liés à l’apprentissage. Or, les récentes baisses des aides à l’embauche (notamment la réduction à 6 000 € pour un apprenti majeur en 2025) suscitent l’inquiétude. Dans un contexte où 39 % des TPE déclarent déjà rencontrer des difficultés financières – un plus haut niveau depuis 2023 – et où le taux d’embauche est historiquement bas (8 % des dirigeants prévoient une embauche au T2 2025), tout affaiblissement du soutien public pourrait décourager les petites structures à investir dans l’alternance.
Des freins persistants… mais surmontables
Parmi les dirigeants n’ayant pas eu recours à l’apprentissage ces dix dernières années, 61 % invoquent un manque d’opportunité. Le temps à consacrer à la formation (34 %) et la préférence pour des salariés expérimentés (29 %) figurent aussi parmi les freins évoqués. Autre signal d’alerte : la difficulté à trouver un apprenti adapté. Près de huit dirigeants sur 10 déplorent une pénurie de profils disponibles et témoignent de leurs difficultés à trouver « un bon apprenti facilement », un chiffre en hausse de cinq points depuis 2011.
Un appel à la stabilité et à la lisibilité
Si les TPE adhèrent massivement à l’apprentissage, elles demandent davantage de prévisibilité et de simplification. Alors que seuls 19 % des dirigeants déclarent faire confiance au gouvernement sur le plan économique, il apparaît crucial que les mesures sur l’alternance s’inscrivent dans une logique de continuité, plutôt que de réforme constante.
*80 e baromètre de conjoncture Fiducial des TPE - 2ème trimestre 2025, enquête trimestrielle menée par l’IFOP pour Fiducial, auprès de 1 003 dirigeants de TPE
Apprentissage : ce qui a changé au 1er juillet 2025 pour les entreprises
Les employeurs vont participer à la prise en charge d'apprentissage pour les plus hauts niveaux de qualification. Depuis le 1er juillet 2025, ils doivent s’acquitter d’une participation obligatoire de 750 euros pour tout contrat d’apprentissage, pour les formations à partir de Bac+3 (niveaux 6 et 7). En cas de nouveau contrat à la suite d’une rupture du contrat initial, une participation réduite à 200 € est prévue pour le nouvel employeur. En cas de rupture de contrat au cours de la période probatoire, la participation obligatoire de l’employeur sera de 50 % du niveau de prise en charge pour la période considérée, dans la limite de 750 €.
Objectif affiché par le gouvernement, contraindre les employeurs à contribuer de façon directe au financement des formations, à l’exemple du modèle allemand d’apprentissage et « améliorer la soutenabilité financière du système ». Les autres mesures entrées en vigueur –à savoir minoration de 20 % du niveau de prise en charge pour les formations en apprentissage dispensées à au moins 80 % à distance et prise en charge des contrats calculée à la journée, sur la base de la durée réelle du contrat–, concernent davantage les centres de formation d’apprentis (CFA).