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Automobile: l'hydrogène vacille avec le retrait de Stellantis

L'hydrogène est-il une énergie d'avenir pour l'automobile? Stellantis vient de répondre par la négative en sabrant son programme d'utilitaires, tandis que certains constructeurs...

Stellantis se retire des utilitaires à hydrogène © MARCO BERTORELLO
Stellantis se retire des utilitaires à hydrogène © MARCO BERTORELLO

L'hydrogène est-il une énergie d'avenir pour l'automobile? Stellantis vient de répondre par la négative en sabrant son programme d'utilitaires, tandis que certains constructeurs comme Toyota y croient encore.

La nouvelle direction de Stellantis (marques Fiat, Peugeot) a annoncé mercredi mettre fin à son programme de développement dans l'hydrogène, une nouvelle qui a résonné comme un coup de tonnerre mercredi matin dans l'usine de sa coentreprise Symbio, qui joue son avenir.

Flambant neuve, l'usine de la banlieue lyonnaise prévoyait de produire 50.000 systèmes à hydrogène par an d'ici 2026, dont une grande partie pour Stellantis, pour accompagner la montée en puissance de son offre d'utilitaires.

C'est aussi un nouveau signal funeste pour l'hydrogène dans les transports.

Marché de niche

Les véhicules à hydrogène fonctionnent grâce à une forme pure du gaz combinée à de l'oxygène dans une cellule à combustion qui génère de l'électricité, et ne dégage que de la vapeur d'eau.

Par rapport aux utilitaires électriques, qui commencent à se multiplier dans les villes, les véhicules à hydrogène se rechargent rapidement et profitent d'une grande autonomie, des critères particulièrement recherchés par les entreprises. 

Ils ont aussi besoin de plus petites batteries, et donc de moins de matières premières.

Mais les modèles à hydrogène sont très chers à l'achat, autour d'une centaine de milliers d'euros l'unité, et les stations de recharge, coûteuses à installer, restent rares.

Pour Jean-Philippe Imparato, directeur de Stellantis pour l’Europe, "le marché de l’hydrogène demeure un segment de niche, sans perspectives de rentabilité économique à moyen terme".

La France vient pourtant de subventionner l'achat de ces camionnettes à hydrogène, en les mettant à parité de prix avec les modèles électriques. 

L'Etat français affiche en effet l'ambition de devenir un "leader de l'hydrogène décarboné", avec un total de 9 milliards d'euros d'argent public mis sur la table via les plans France Relance et France 2030. 

Cette énergie est notamment utile pour la décarbonation de l'industrie des engrais, de la pétrochimie, de la sidérurgie ou des transports lourds.

BMW, Toyota

Stellantis était entrée au capital de Symbio, fondée par Michelin et l'équipementier Forvia, et qui compte 640 salariés. 

La direction de Michelin a condamné mercredi une "décision inattendue, brutale et non concertée", "d’autant plus surprenante que Stellantis a toujours affiché l'ambition d’être le pionnier de ce nouveau marché". 

"Stellantis représente près de 80% du volume d’activité de Symbio", a indiqué de son côté Forvia. "De fait, l’intention exprimée par Stellantis entraîne des répercussions opérationnelles et financières, graves et immédiates, pour l’avenir de Symbio".

Renault a aussi mis en liquidation début 2025 son usine d'utilitaires à hydrogène de Flins (Yvelines). 

"En gros, il n'y pas de marché pour les véhicules à hydrogène (...). On vend des voitures à perte", avait expliqué le patron de Renault à l'époque, Luca de Meo, devant des députés. 

Surtout, la quantité d'hydrogène "vert" (produit à partir d'énergies renouvelables, rendant cette énergie bien moins polluante, NDLR) est encore insuffisante, avait souligné le patron italien.

Parmi les constructeurs automobiles, seuls Toyota, Hyundai et BMW continuent d'y croire avec de petits programmes de développement et une poignée de véhicules dans les rues. 

BMW prévoit toujours de lancer sur le marché en 2028 un SUV converti à l'hydrogène, en partenariat avec Toyota, le N°1 mondial de l'automobile et grand soutien de cette énergie. 

Chine

"Retirer l’hydrogène du jeu serait une erreur", a averti le patron du constructeur allemand Oliver Zipse mercredi dans une interview au journal Die Welt.  

C'est une question d'indépendance stratégique, selon Oliver Zipse: "L'hydrogène est la seule technologie que l’Europe peut utiliser de manière autonome", a-t-il souligné, alors que pour les batteries, le continent reste pour le moment dépendant des fournisseurs asiatiques.

Consciente de ces enjeux stratégiques, la Chine est déjà devenue le leader mondial de l'hydrogène et multiplie les innovations: fin 2024, elle comptait 540 stations de recharge et 24.000 véhicules équipés, selon un rapport gouvernemental cité par l'agence S&P.

Fin mai, le groupe chinois Wanrun a sauvé de la faillite Safra, unique constructeur de bus à hydrogène français.

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