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Colère des syndicats pénitentiaires face à l'extraction prochaine de prison de Mohamed Amra

Le détenu Mohamed Amra, dont l'évasion a coûté la vie à deux agents pénitentiaires en mai 2024, doit être extrait la semaine prochaine de sa prison ultrasécurisée pour être interrogé par...

Mohamed Amra escorté par des policiers, le lendemain de son arrestation à Bucarest le 23 février 2025 © Daniel MIHAILESCU
Mohamed Amra escorté par des policiers, le lendemain de son arrestation à Bucarest le 23 février 2025 © Daniel MIHAILESCU

Le détenu Mohamed Amra, dont l'évasion a coûté la vie à deux agents pénitentiaires en mai 2024, doit être extrait la semaine prochaine de sa prison ultrasécurisée pour être interrogé par des magistrats, suscitant l'indignation de syndicats pénitentiaires.

L'interrogatoire du narcotrafiquant, 31 ans et poursuivi notamment pour meurtres en bande organisée en récidive, doit se tenir dans le bureau des juges d'instruction de la Juridiction nationale de lutte contre le crime organisé (Junalco), au tribunal de Paris.

L'un de ses conseils, Me Lucas Montagnier, a confirmé mardi cette information du Parisien à l'AFP, mais a refusé de préciser le jour ou de commenter cette extraction, qui a provoqué la colère de syndicats pénitentiaires.

Car c'est lors d'une précédente extraction de Mohamed Amra, multirécidiviste déjà détenu pour d'autres affaires judiciaires, que deux agents pénitentiaires ont perdu la vie, le 14 mai 2024 et que trois autres ont été grièvement blessés.

Mohamed Amra, originaire de Seine-Maritime et surnommé "La Mouche", se trouvait dans un fourgon pénitentiaire au péage d'Incarville (Eure) quand un commando l'a libéré dans une attaque ultraviolente.

Mohamed Amra était ensuite parti en cavale pendant neuf mois, mais a été arrêté le 22 février à Bucarest en Roumanie, puis remis à la France.

Au moins trente-huit personnes, dont Mohamed Amra, sont mises en examen dans ce dossier tentaculaire portant sur la préparation, l'évasion et la cavale.

- "La mesure du danger" - 

"Nous sommes outrés et scandalisés de cette extraction judiciaire", a réagi auprès de l'AFP Wilfried Fonck, secrétaire national Ufap Unsa Justice, déplorant que le "principe du recours à la visioconférence" soit "bafoué".

"Si l'on peut comprendre les nécessités de l'instruction et de la présence physique de l'individu, le magistrat aurait très bien pu se déplacer sur son lieu d'incarcération" à Condé-sur-Sarthe (Orne), a-t-il estimé. "C'est incompréhensible et inadmissible envers nos collègues morts et blessés à Incarville", a-t-il insisté.

Emmanuel Baudin, secrétaire général du syndicat FO-Justice, s'est dit lui "malheureusement peu étonné" de cette extraction: la nouvelle loi sur la lutte contre le narcotrafic, adoptée fin avril et qui doit donner plus de moyens, "ne va pas assez loin car elle ne permet pas d'imposer la visioconférence".

"Aujourd'hui, le magistrat décide si on doit lui présenter le détenu ou non", a-t-il déploré, considérant que les magistrats ne prenaient pas "la mesure du danger des extractions de ce type de détenus".

Il ne se passera rien

Sur TF1, le ministre de la Justice Gérald Darmanin s'est dit certain "qu'il ne se passera rien". Le ministère de l'Intérieur, "qui aura la responsabilité de ce transfert, le fait dans magnifiques conditions que ce soit le GIGN ou le Raid", a-t-il martelé.

Il a dit attendre "la décision du Conseil constitutionnel qui permettra demain de faire (les interrogatoires, ndlr) en visio et empêchera peut-être (...) ces efforts d'argent déployés pour ce monsieur qui ne mérite pas".

Mi-mai, une source judiciaire avait pourtant exprimé auprès de l'AFP sa "préoccupation" face à des demandes accrues de l'administration pénitentiaire, depuis l'évasion de Mohamed Amra, de réaliser les interrogatoires en visioconférence. 

"On doit négocier pour qu'ils nous présentent les mis en examen, au lieu de travailler sur nos dossiers", avait-elle témoigné.

Pourtant, un interrogatoire physique bénéficie à l'enquête, avait-elle assuré: "Quelque chose de plus se passe. Et le détenu est plus libre de parler de ses conditions de détention par exemple, que s'il reste en prison". 

Le présentiel garantit une plus grande "confidentialité", estime aussi cette source judiciaire. "Si on fait par visioconférence, il faut envoyer le procès-verbal d'audition, cela passe par trop de mains", a-t-elle regretté.

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