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Des entrepreneurs s'engagent avec mesure

Faire atterrir des légumes moches dans les assiettes d'une cantine plutôt qu'à la benne, mettre en relation associations et salariés en manque d'engagements... Plusieurs entrepreneurs ont reçu le prix « Impact + 2025 ». Pour des projets qui marient propos éthique et rigueur dans l’exécution.

©Adobe Stock.
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La bonne volonté ne suffit pas. Le 8 septembre, à Paris, la Banque de France et Initiative France, réseau de financement et d'accompagnement des entreprises, présentaient les 10 lauréats de leur prix « Impact + 2025 ». Lequel est décerné à des entrepreneurs engagés, dans le but de les aider à approfondir leur démarche avec la somme de 5 000 euros. Ces lauréats évoluent dans des secteurs très divers, avec des projets parfois atypiques. Comme Day One (Centre-Val de Loire), plateforme dédiée au mécénat de compétences qui met en relation associations et entreprises. La fondatrice, Élise Thibault-Gondré, avait débuté sa carrière dans la finance d'investissement. « J'adorais mon métier, mais je me suis posée la question du sens au travail. Je suis partie au Népal, faire de la réinsertion d'enfants de rue. En revenant, j'ai vu que de nombreux cadres étaient dans la même situation que moi ».

Plusieurs projets concernent l'alimentation et les circuits courts. Boc d'Oc propose une gamme de plats de produits bio et locaux cuisinés en bocaux (Occitanie). Une solution « gourmande et engagée », commente Clara Rocherieux, cofondatrice. Ingénieur agronome, elle a quitté une industrie agroalimentaire «avec une empreinte écologique énorme ». La Conserverie du Rhin (Grand Est) suit une démarche proche. Quant à Atypique (Auvergne-Rhône-Alpes), la start-up joue le rôle de grossiste de fruits et légumes qui ne rentrent pas dans les normes de la distribution classique auprès des acteurs de la restauration collective, afin d'éviter que ces produits ne terminent à la benne.

Plusieurs autres projets lauréats placent la réutilisation et l'économie de matière au cœur de leur démarche. Par exemple, en utilisant des matériaux surcyclés issus de l'industrie locale pour fabriquer des sacs à dos et sacoches (Ratio, en Auvergne-Rhône -Alpes), ou des textiles recyclés pour réaliser des matériaux acoustiques pour l’architecture et le design ( Pierreplume en Hauts-de-France). Quant à Vegskin (Hauts-de-France), la start-up propose une alternative au cuir à base de matériaux biosourcés en fibres végétales au secteur de la maroquinerie et la mode. Et enfin, ADN Group (Auvergne-Rhône-Alpes) a développé une technologie innovante de démantèlement des matériaux composites multicouches. Elle permet le recyclage de produits composés de plusieurs matériaux.

Mesurer et attester

Dans ces projets, « c'est l'impact qui crée le modèle économique », observait Guillaume Pépy, président d'Initiative France, lors de la remise des prix. L'offre de certains lauréats, par exemple, répond aux besoins actuels des entreprises qui se doivent d'être plus performantes en matière de RSE, ou d'améliorer leur empreinte carbone. Ainsi, « après le Covid, nous avons vu se développer des pratiques d'achat responsable. Le paramètre économique n'est plus le seul à compter », témoigne Pierre Maïsetti, fondateur de Retouch-Up. Son offre permet aux entreprises de rénover ou aménager des espaces professionnels ( hôtellerie, notamment) avec un meilleur bilan écologique que les solutions traditionnelles.

En conséquence, pour lui comme pour les autres lauréats, être capable de prouver le caractère vertueux de leur démarche et son impact s'avère crucial. A ce titre, ADN Group prévoit de réaliser les démarches nécessaires à l'obtention du label B corp qui atteste des pratiques des entreprises en termes d'impact social, sociétal et environnemental. Un sésame utile pour « mettre notre solution au service des grands groupes », explique Camille Lambert, créatrice de la société, qui nourrit des ambitions à l'international. Dans le même sens, Day One travaille à une méthode pour évaluer et valoriser l'impact des actions sur sa plateforme. Par exemple, combien de tonnes de CO2 économisées représentent deux jours de mécénat de compétences dans une association engagée dans l'environnement ? « C'est important, surtout en plein RSE backlash où on voit que les entreprises ont de plus en plus de mal à allouer des budgets pour ce type de projet », argumente Élise Thibault-Gondré.

Parmi les lauréats figure aussi l'atelier artisanal Iscomée (Pays de la Loire) qui réalise des boites et étuis en carton pour le luxe, l'imprimerie et l'édition. Sophie Monteil, à la tête de l'entreprise, a signé la convention des entreprises pour le climat, un processus exigeant qui implique la réalisation d'un bilan carbone. Nul doute que les clients luxe de l'atelier, soumis à des exigences en matière de RSE, seront sensibles à la démarche. Mais celle-ci naît de l'engagement personnel de Sophie Monteil qui a repris l'entreprise en 2021. Elle a eu « le coup de foudre » pour le savoir-faire des artisans, porteurs de culture. Mais elle a aussi ressenti un contraste « violent », avec l'environnement - bitume, ciment et gravier - de l'atelier, comme une image affligeante de l'état de la planète.