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Du Cambrésis aux Flandres, le rôle du maire en question

Nous avons rencontré deux élus pour croiser leurs visions : la maire avec le plus court mandat du département – depuis deux mois et demi –, Dorothée Bertrand, maire d’Estaires (6 700 habitants) et celui avec le plus long mandat – 43 ans –, Maurice Saniez, maire de Forest-en-Cambrésis (550 habitants). 

Dorothée Bertrand, maire d’Estaires. © Aletheia Press / E.Chombart
Dorothée Bertrand, maire d’Estaires. © Aletheia Press / E.Chombart

Dorothée Bertrand, vous êtes maire quelques mois seulement. Avez-vous certaines appréhensions ?   

D.B. J’ai un regard très admiratif sur les élus qui pilotent des collectivités sur des durées longues. Aujourd’hui, ça me fait un peu peur. Mais nous avons bien préparé la rentrée et mon agenda en prenant en compte les jours où je ne suis pas là, car j’enseigne. Je veux aussi consacrer du temps à mes enfants, tout en restant disponible pour les habitants. C'est une nouvelle organisation.

Maurice Saniez, vous êtes maire depuis plus de 43 ans, quelles évolutions relevez-vous ? 

M.S. Les intercommunalités ont grossi, il faudrait les supprimer. Les habitants évoluent aussi, comme leurs problématiques. La numérisation a fait mal aussi… En tant que petit village, on perd du lien social, très peu de gens se déplacent encore en mairie. Aujourd’hui, le maire, c'est celui que l'on tue, parce qu’il a pris ses responsabilités. C’est une évolution constante, mais pour un petit village comme le nôtre, c’est dans le mauvais sens.

Était-ce une évidence pour vous de devenir maire ?

Dorothée Bertrand. Le 31 mai, Bruno Ficheux a quitté ses fonctions après presque 18 ans de mandat. En tant que première adjointe, j’ai été élue pour lui succéder lors du conseil municipal du 15 juin. Cette période a été particulièrement intense, d’autant plus que j’enseigne à temps partiel et que c’était la fin de l’année scolaire. Bien que le rôle de maire n’ait pas été une totale découverte grâce à mon implication passée, je n’aurais jamais imaginé diriger un jour Estaires, la ville où j’ai toujours habité, et ses 6 700 habitants.

Maurice Saniez. Je me suis présenté à 35 ans à la mairie de Forest-en-Cambrésis, un village rural de 550 habitants. Ancien directeur d’école, j’ai voulu relever le défi que m’avait lancé le maire de l’époque, un agriculteur : 'Tu ne verras jamais un enseignant devenir maire ici'. Bien que les habitants aient été sceptiques au début, j'ai depuis toujours été réélu dès le premier tour, avec plus de 80% des voix. Une vocation inattendue. Mais une fois engagé, on a envie de continuer.

Comment voyez-vous votre rôle ?

D.B. Pour être maire, il faut avant tout aimer sa ville. C’est un rôle de dualité qui demande à la fois d’être profondément ancré dans son territoire et d’avoir la folie d’oser pour bousculer les choses. Un maire doit être à l’écoute de ses concitoyens tout en ayant la capacité de les emmener avec lui dans ses projets. Enfin, il faut faire preuve de courage, de patience et d’endurance avec toute l’équipe municipale, car un maire seul ne fait rien et doit affronter de nombreuses critiques.

M.S. Le maire doit rester en contact permanent avec les habitants, les informer et surtout les écouter. Il ne s’agit pas d’imposer sa vision, mais de comprendre leurs besoins. Ce rôle exige beaucoup de temps et d’engagement, de nuits blanches aussi, parfois au détriment de la vie familiale. Il faut aussi avoir un peu d’expérience et ne pas être trop jeune selon moi, en ayant fait partie d’une association par exemple.

Quelles sont vos priorités et enjeux avant et après 2026 ?

D.B. Ma priorité, c’est la fin des travaux en centre-ville. Même s’il reste encore l’aménagement d’un parking aux abords de la ville et la touche finale : la mise en lumière du beffroi. Les enjeux ne se limitent pas aux investissements matériels mais se concentrent sur la proximité avec la population et les associations. La priorité est d'apporter ce dont la population a besoin. Quant au tourisme, il sera une carte bonus à jouer dans les mandats à venir. Il faut continuer à être disponible pour les habitants, rester proche des associations, être à leur écoute.

M.S. Je ne me représente pas en 2026. J’ai 79 ans, j’ai fait assez de mandats, je laisse la place à quelqu’un d’autre. Pour autant, j’ai pour objectif que le village continue d’évoluer, sans forcément doubler la population. Que l'on garde notre école à deux classes, c’est important aussi, que l’on continue à entretenir nos bâtiments communaux, c’est une grosse charge. Nous sommes en train de changer la chaudière de la mairie. Il faut aussi que nous gardions un secrétariat, ce qui n’est pas évident pour les petites communes, déjà très fragilisées.