Conjoncture
L’artisanat du bâtiment toujours fragilisé
L’activité de l’artisanat du bâtiment demeure en berne, impactée par une forte contraction de la construction neuve et la stagnation de la rénovation énergétique. Malgré quelques signaux positifs, l’instabilité politique et le manque de confiance des ménages freinent toute reprise durable.
Le secteur artisanal du bâtiment peine encore à reprendre son souffle, la reprise d’activité n’est toujours pas enclenchée. C’est ce que confirme la dernière note de conjoncture de la Capeb (Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment). Au troisième trimestre, son volume d’activité s’affiche en recul de 3,5% par rapport à la même période un an plus tôt, après une baisse déjà marquée de -4,5% au trimestre précédent.
Une activité en mode survie
Le segment le plus affecté reste la construction neuve dont le ralentissement est encore fort avec un repli de 6%, bien que son rythme ait tendance à ralentir par rapport au trimestre antérieur (-9%). En parallèle, l’entretien-amélioration et la rénovation énergétique stagnent, affichant une diminution de 1,5%, comme au trimestre précédent. Cette stabilité défavorable s’installe malgré une légère embellie sur le marché du logement ancien où les ventes progressent de 9% sur un an ( 912 000 unités vendues en juillet 2025). Le blocage temporaire des dispositifs d’aide cet été (dont Ma primRenov’), ajouté aux incertitudes réglementaires a entretenu la prudence des ménages, ce qui a un effet direct sur l’activité des artisans, déjà confrontés à des carnets de commandes fluctuants.
Menuiserie et maçonnerie en première ligne
La contraction de l’activité touche l’ensemble des métiers, mais à des degrés variables : la menuiserie-serrurerie (-4,5%) et la maçonnerie (-4%) sont les plus durement touchées, suivies de l’électricité (-3,5%) et de l’aménagement, décoration et plâtrerie (-3%). La couverture-plomberie-chauffage affiche un recul plus modéré (-2 ,5%).
De même, le repli est généralisé à l’ensemble du territoire mais avec des intensités diverses : le Centre-val de Loire connaît la baisse la plus forte (-5,5%), suivi par l’Occitanie, la Nouvelle-Aquitaine et la Bretagne (-4,5%), la Normandie (-4%) et les Pays de la Loire, Hauts-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes (-3,5%). L’Ile-de-France recule de 3% alors que le Grand Est, la Bourgogne-Franche-Comté et la Provence-Alpes-Côte d’Azur font figure de zones un peu moins dégradées, avec des baisses respectives de -2,5% et -2%.
Carnets de commandes : entre fragilité et signes d’espoir
Dans ce contexte, le moral des artisans reste fragile. Les soldes d’opinion relatifs aux carnets de commandes continuent à se dégrader : davantage d’entreprises rapportent un repli plutôt qu’une amélioration. Toutefois, une lueur d’optimisme apparaît : le nombre moyen de jours de travail inscrits à venir dans ces carnets enregistre une première remontée depuis 2022 : il atteint 74 jours, en moyenne, et retrouve ainsi le niveau du premier trimestre 2024. Mais cette tendance plus « favorable » reste à relativiser selon les segments d’activité : certaines entreprises tirent leur épingle du jeu, tandis que d’autres peinent toujours à s’en sortir.
Trésorerie, marges et emploi toujours tendus
La situation financière reste aussi tendue. Le solde d’opinion sur la trésorerie se détériore passant à -15 points ( seulement 8 % des entreprises déclarent une amélioration de leur trésorerie vs 23 % une dégradation ) et celui sur les marges reste négatif à -10 points. Le marché de l’emploi reflète aussi cette fragilité : l’emploi salarié dans l’artisanat du bâtiment recule à 2,9% ce second trimestre (soit 24 000 emplois détruits sur un an ) et cette tendance devrait se poursuivre jusqu’à la fin de l’année. Déjà, en 2024, « nous avons perdu 28 000 emplois », indiquait Jean-Christophe Repon, président de la Capeb, début octobre, lors du lancement de la Semaine des Métiers du BTP.
La reprise peine à s’imposer durablement en partie à cause du contexte politique. « L’instabilité politique, marquée par l’absence de majorité claire et des tensions persistantes entre les principales forces parlementaires, complique l’adoption du budget 2025 et contribue à plomber un retour à l’activité déjà poussif », souligne la note de conjoncture.
AÏcha BAGHDAD et B.L