Social

L’entreprise et les salariés

Revue de récentes décisions de justice en matière de licenciements.

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Faute

Le fait pour une salariée, à la veille d’un entretien préalable à son licenciement, de détruire de manière délibérée l’ensemble des données contenues dans sa messagerie professionnelle, s’analyse comme un manquement à son obligation d’exécuter de bonne foi son contrat de travail et comme la violation de son engagement de préserver les informations de nature à assurer la poursuite de l’activité de l’entreprise. Compte tenu de son emploi de cadre travaillant dans une entreprise bénéficiant d’un dispositif de protection du potentiel scientifique et technique de la Nation, la salariée a adopté un comportement constitutif d’une faute grave rendant impossible son maintien dans l’entreprise durant la période de préavis. (Rennes, 13 mars 2025, n° 22/03425).

Le fait pour un salarié de qualifier son employeur de « gros con » ou un collègue de travail de « grand dadais », et de proclamer travailler sur un rythme moins soutenu depuis un mois, constitue une faute susceptible de justifier un licenciement. (Lyon, 21 mars 2025, n° 22/02424).

Rétractation

Un licenciement peut être rétracté par l’employeur, à la condition que cette rétractation ait été acceptée de façon claire et non équivoque par le salarié. Le fait de ne pas délivrer au salarié les documents dits de fin de contrat après la notification du licenciement n’est pas suffisant pour caractériser une rétractation. (Paris, 19 février 2025, n° 22/00408).

Difficultés économiques

Est sans cause réelle et sérieuse le licenciement économique prononcé par une société qui a pris des décisions contraires à ses intérêts économiques et commerciaux, en consentant des avantages disproportionnés à la société chinoise du groupe et dont les décisions ont engendré sa situation déficitaire. (Riom, 8 avril 2025, n° 22/01157).

Lorsque les difficultés économiques sont caractérisées, le choix de l’employeur de ne pas utiliser les dispositifs d’activité partielle ne remet pas en cause la réalité de ces difficultés. (Bordeaux, 2 avril 2025, n° 22/04825).

Inaptitude et impossibilité de reclassement

L’obligation de reclassement du salarié déclaré inapte par le médecin du travail ne peut pas contraindre l’employeur à proposer un poste qui n’est pas disponible, à créer un nouveau poste ou un poste sans réelle utilité, ou encore incompatible avec le bon fonctionnement de l’entreprise. Dès lors, dans la mesure où aucun aménagement ou transformation du poste de travail du salarié n’était envisageable, selon l’avis du médecin du travail, et que l’employeur ne pouvait pas être contraint, pour son reclassement, à engager un salarié supplémentaire, même à temps partiel, afin de pallier aux tâches qu’il ne pouvait plus réaliser, l’employeur n’a pas manqué à son obligation de reclassement. Et le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement du salarié ne pouvait pas être dénué de cause réelle et sérieuse sur ce fondement. (Rennes, 5 mars 2025, n° 21/04636).

Indemnisation

En cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse opéré dans une entreprise employant habituellement moins de 11 salariés, les montants minimaux du barème d’indemnisation sont fixés jusqu’à 10 ans d’ancienneté. Il en résulte qu’à partir de la onzième année complète d’ancienneté le montant minimal de l’indemnité est celui qui est fixé au tableau annexé à l’alinéa 2 de l’article L 1235-3 du Code du travail en fonction de la durée de l’ancienneté, quel que soit l’effectif de l’entreprise. (Cass. soc., 29 avril 2025, pourvoi n° 23-23494)

Entretien préalable

La finalité même de l’entretien préalable et les règles relatives à la notification du licenciement interdisent à l’employeur de donner mandat à une personne étrangère à l’entreprise pour procéder à cet entretien et notifier le licenciement. (Montpellier, 29 avril 2025, RG no 22/02854)

François TAQUET, avocat,
spécialiste en droit du travail et protection sociale