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La tuilerie Laurent poursuit sa route de génération en génération

Colin Laurent représente la cinquième génération à la tête de l'entreprise familiale installée à Nan-sous-Thil. La dernière tuilerie artisanale encore en activité en Côte-d’Or a une histoire au long cours, pleine de rebondissements.

Colin Laurent représente la cinquième génération à reprendre la tuilerie familiale. © Tuilerie Laurent
Colin Laurent représente la cinquième génération à reprendre la tuilerie familiale. © Tuilerie Laurent

La tuilerie Laurent, installée à Nan-sous-Thil, est la dernière tuilerie artisanale encore en activité en Côte-d’Or. Tuiles plates, briques, tomettes et carreaux de sol sont façonnés manuellement, du prélèvement de l’argile issue de gisements locaux à la cuisson, en respectant les formes et les coloris d’autrefois. Rien d'étonnant à ce que ces produits soient particulièrement recherchés dans les rénovations d'architectures anciennes ou de bâtiments historiques nécessitant un matériau conforme à l’esthétique locale.

Une saga familiale

Derrière ce savoir-faire, se cache une histoire familiale au long cours, pleine de rebondissements. D’abord, il y a eu François, en 1862. "Mon arrière-arrière-grand-père travaillait dans un village à quatre kilomètres de Nan-sous-Thil. Un jour, à vélo, il a vu de l’argile sur le bord de la route. Il en a pris un peu pour le tester en cachette dans le four de son patron" raconte Colin Laurent, cinquième génération à diriger l'entreprise. Constatant la qualité du produit, François Laurent achète le terrain à Nan-sous-Thil où se trouve encore aujourd’hui la tuilerie.

Les installations restaient archaïques, c’est ensuite son fils Paul qui développe l’activité avec un nouveau bâtiment et deux fours de type Hoffmann. En 1946, Henri, qui incarne la troisième génération, doit faire face à un incendie qui ravage les ateliers en bois. "Trois mois plus tard, l’activité reprenait à ciel ouvert !" poursuit, avec amusement, Colin Laurent. Spécialisée dans les briques de galandage, les briques de tendu ou encore les briques à fasciola, l’entreprise grandit jusqu’à racheter deux tuileries qui avaient fermé, l’une à Bligny-sur-Ouche, l’autre aux Granges-sous-Grignon. "Notre tuilerie comptait alors trois usines, deux camions et une cinquantaine de salariés" rebondit Colin Laurent. L’âge d’or !

Face à la concurrence

Malheureusement, au début des années 70, la société, comme d’autres, subit de plein fouet le choc pétrolier. Surtout, elle est confrontée à l’arrivée de produits comme le placoplâtre pour les murs, le PVC à la place des tuyaux de gainage, les agglomérés en ciment en remplacement de la brique de construction et, enfin, la tuile béton. "Toutes ces nouveautés mettent à mal la filière et l’entreprise ferme l’usine de Bligny-sur-Ouche en 1971 et celle des Granges-sous-Grignon en 1973", constate Colin Laurent.

Son grand-père poursuit l'activité seul. Dans les années 90, son fils Éric, quatrième génération, investit pour moderniser l’atelier. Auparavant, l’artisan devait alimenter le four en bois toutes les dix minutes, 24 heures sur 24 tandis que le séchage prenait une semaine. "Mon père a acheté un four à gaz qui ne demandait plus que deux jours de cuisson automatisée", détaille le chef d'entreprise.

Préserver le savoir-faire

En 2008, Éric Laurent achète un second four et travaille avec un salarié. Colin Laurent vient prêter main forte à son père en 2021 avant de reprendre l’entreprise en 2022, une reconversion d’activité pour ce trentenaire. "J’ai travaillé dans la restauration puis je me suis formé pour devenir paysagiste. De toute façon, il n’y a pas de formation pour ce métier qui repose sur la transmission familiale" souligne-t-il.

Colin Laurent poursuit seul ou presque l’aventure entrepreneuriale. "Je prends une personne pendant les six mois les plus chargés de l’année, d’avril à septembre. Nous avons un métier saisonnier avec un temps de séchage qui dépend de la météo" détaille-t-il. Labellisé 100 % Côte-d’Or, Colin Laurent est heureux de faire perdurer une activité plus que centenaire mais aussi de s’inscrire dans la rénovation du patrimoine local. Il fournit ainsi des tuiles pour la rénovation des 1 600 m² de la toiture du Définitoire de l’abbaye de Citeaux.

Pour Aletheia Press, Nadège Hubert