Le Scouarnec se dit "responsable" de la mort de deux victimes, les parties civiles plaident
Interrogé pour la dernière fois par la cour, l'ex-chirurgien pédocriminel Joël Le Scouarnec a affirmé mardi devant la cour criminelle du Morbihan être "responsable" de la mort de deux de ses 299 victimes, avant qu'une...

Interrogé pour la dernière fois par la cour, l'ex-chirurgien pédocriminel Joël Le Scouarnec a affirmé mardi devant la cour criminelle du Morbihan être "responsable" de la mort de deux de ses 299 victimes, avant qu'une trentaine d'avocats des parties civiles n'entament leurs plaidoiries.
Pull noir surmonté d'un col de chemise couleur moutarde, debout dans son box, l'accusé de 74 ans a répondu aux questions de la cour avec son habituel ton calme, au phrasé monotone.
Du procès, il affirme avoir conservé le souvenir de deux jeunes hommes dont les photos ont été projetées: Mathis Vinet, mort d'une overdose en 2021 et dont les proches estiment qu'il s'est suicidé, et un autre homme qui a mis fin à ses jours en 2020.
"(Ils) sont morts: j'en suis responsable", lâche celui qui avait agressé sexuellement les deux garçons à l'hôpital de Quimperlé (Finistère) alors qu'ils n'avaient que 10 et 12 ans respectivement.
Crime sexuel de masse
Joël Le Scouarnec affirme s'être "remis en question" au cours du procès débuté le 24 février. "Je ne peux plus me regarder de la même façon parce que j'ai devant moi un pédocriminel et un violeur d'enfants."
S'il assure ne plus être sous l'emprise de ses "penchants" pédophiles, il n'écarte pas non plus le risque de replonger et dit ne pas se projeter dans une vie d'homme libre. Il encourt à Vannes 20 ans de réclusion.
"La prison a été pour moi une libération", a répété celui qui purge déjà une peine de 15 ans de réclusion pour des viols sur mineurs après une condamnation à Saintes (Charente-Maritime) en 2020.
"Pédophile, on l'est, pédophile, on le reste", lui a asséné Me Myriam Guedj Benayoun lors de sa plaidoirie.
"Vous avez à juger celui qui a inventé le crime sexuel de masse commis par un seul homme, celui dont on ne connaîtra d'ailleurs jamais le nombre exact de victimes", a insisté Me Céline Astolfe auprès de la cour.
Une trentaine d'avocats représentant quelque 130 parties civiles se sont organisés pour plaider "à l'unisson", a indiqué en préambule Me Astolfe.
"Demander pardon, c'est vouloir réparer l'autre (...) Joël Le Scouarnec donne des excuses pour lui! Il en a besoin, il soulage sa conscience", accuse Me Élodie Grelot.
Ces avocats veulent évoquer toutes les zones d'ombre qui planent encore après trois mois de procès sur les agissements de Joël Le Scouarnec, notamment "ce qui explique cette incroyable longévité dans son parcours criminel", selon Me Frédéric Benoist.
"Beaucoup savaient dans son entourage professionnel et personne n'a agi (...) Mettre fin à la loi du silence, mettre fin à l'impunité, c'est une responsabilité qui nous incombe à tous", a martelé l'avocat de l'association La Voix de l'Enfant.
"Dans ce dossier, on n'ose rien, on se tait: on pense que c'est aux autres de faire", a renchéri Me Jean-Christophe Boyer, avocat de l'association L'Enfant Bleu. "La confiance, ça se mérite. Chacun, hôpitaux, justice et État, doit prendre sa part."
Une autre avocate, Me Frédérique Giffard, a dénoncé le silence du monde politique. "Les enfants d'hier veulent la fin de l'indifférence", a-t-elle affirmé.
Pas une machine
Tout au long du procès, la sincérité de Joël Le Scouarnec a été remise en cause par les parties civiles à qui il adressait des excuses uniformes, répétées parfois au mot près.
Mais, a-t-il assuré, "ce n'est pas une machine qui s'exprime, c'est moi, l'être humain."
Il a de nouveau affirmé "être le seul responsable", exonérant ses proches et ses collègues. "C'est moi qui ai manipulé, caché (...) c'est moi qui ai agressé ces enfants."
Qu'est-ce qui aurait pu vous empêcher d'agir? demande la cour. L'accusé se tait un instant. "Rien", finit-il par dire.
Le 20 mars, Joël Le Scouarnec a reconnu en bloc l'ensemble des faits pour lesquels il est jugé à Vannes, et même d'autres, prescrits ou qui font l'objet d'une nouvelle procédure, comme des violences sexuelles sur sa petite-fille, révélées en pleine audience.
Les plaidoiries des avocats des parties civiles se poursuivront jusqu'à vendredi matin, avant les réquisitions. Le verdict est attendu le 28 mai.
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