Macron tous azimuts, Bayrou encalminé: semaine à deux vitesses pour l'exécutif

Vent dans les voiles après son week-end à Kiev, Emmanuel Macron plonge de plain-pied cette semaine dans la politique intérieure, avec en point d'orgue deux heures d'émission télévisée mardi soir. Offrant un contraste saisissant avec...

Le président français Emmanuel Macron donne une conférence de presse conjointe après une réunion des dirigeants européens à Kiev, le 10 mai 2025 © Genya SAVILOV
Le président français Emmanuel Macron donne une conférence de presse conjointe après une réunion des dirigeants européens à Kiev, le 10 mai 2025 © Genya SAVILOV

Vent dans les voiles après son week-end à Kiev, Emmanuel Macron plonge de plain-pied cette semaine dans la politique intérieure, avec en point d'orgue deux heures d'émission télévisée mardi soir. Offrant un contraste saisissant avec son Premier ministre, englué dans l'affaire Bétharram.

Samedi avec Volodymyr Zelensky jouant la paix en Ukraine, mardi répondant aux questions du youtubeur Tibo InShape: Emmanuel Macron se démultiplie, quitte à tenter tous les grands écarts.

Il s'est illustré à la manœuvre samedi à Kiev, lors d'un voyage commun avec les dirigeants allemand Friedrich Merz, britannique Keir Starmer et polonais Donald Tusk, plaidant pour un cessez-le-feu inconditionnel de 30 jours entre l'Ukraine et la Russie.  

Après huit ans d'activité sur la scène internationale, et aux côtés de leaders moins expérimentés, le chef de l'État français a su aussi habilement gérer la mise en scène individuelle: dîner en tête-à-tête avec M. Zelensky et photo marquante des dirigeants debriefant avec Donald Trump autour du téléphone du Français sur haut-parleur.

Des gains politiques que M. Macron espère faire fructifier à domicile, après avoir atteint à l'automne dernier des records personnels d'impopularité, dans le sillage d'une dissolution ratée. 

"Ce n'est pas la remontada" dans les sondages "et il ne peut pas se permettre de rester sur son Aventin", juge un ministre. Le même, constatant l'appétit retrouvé du président pour les moindres détails de la vie politique intérieure, glisse: "chassez le naturel, il revient au galop".

Lundi, il doit inaugurer à Wissous (Essonne) un "laboratoire d'excellence" de l'entreprise franco-italienne EssilorLuxottica, leader mondial de l'optique. Un déplacement dans le cadre du raout annuel Choose France sur l'attractivité économique du pays, qu'il présidera le 19 mai.

Et si mercredi il devrait être sur le terrain dans le cadre des commémorations de l'attaque du péage d'Incarville qui avait coûté la vie à deux agents pénitentiaires, l'attention se concentre sur ses deux heures d'émission spéciale mardi sur TF1. 

Il y débattra notamment avec la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet et le maire de Béziers Robert Ménard, répondra à des questions de Français et à des interpellations du YouTubeur Tibo InShape ou du journaliste Charles Biétry, atteint de la maladie de Charcot.

Fraîcheur

L'occasion de défendre le bilan mais aussi de dresser "des perspectives car il reste deux ans de mandat", fait valoir son entourage.  

Au menu, de possibles référendums, alors qu'Emmanuel Macron avait indiqué lors de ses vœux pour 2025 que les Français seraient amenés à "trancher" sur des sujets déterminants. L'éventail de thèmes que le chef de l'État pourrait soumettre à consultation est large, de l'utilisation des écrans chez les moins de 15 ans à l'organisation territoriale ou la fin de vie. La droite pousse ardemment pour mettre sur la table l'immigration et la gauche pour consulter les citoyens sur la retraite à 64 ans.

"Est-ce que ce sera vraiment des référendums ? Est ce que ce sera des consultations citoyennes ? Est ce que ce sera des sortes de votations ? Je ne sais pas", a évacué la porte-parole du gouvernement Sophie Primas lundi sur RTL. 

François Bayrou, lui, a proposé d'interroger les citoyens sur la trajectoire à venir des finances publiques, trois Français sur cinq s'y montrant favorables selon un sondage Elabe dimanche.   

"C'est un des plus importants sujets que la nation a devant elle aujourd'hui. Je ne crois pas que la classe politique le traitera spontanément", fait-il valoir auprès de l'AFP, s'en remettant donc au "peuple des citoyens".

La suggestion de M. Bayrou a reçu un accueil tiède dans l'entourage de M. Macron, signe de la fraîcheur d'une relation au sommet de l'exécutif faite de "hauts et de bas", dixit un proche du Premier ministre.

Difficile donc de ne pas regarder les deux heures d'émission de M. Macron à l'aune de ce qui attend M. Bayrou le lendemain: son audition par une commission d'enquête de l'Assemblée sur les violences dans les établissements scolaires. En toile de fond, l'affaire Betharram qui lui colle aux doigts comme le sparadrap du capitaine Haddock, puisqu'il devra se défendre de sa connaissance de faits de violences sexuelles et physiques dans cet établissement au cœur de son fief des Pyrénées-Atlantiques.

Ce dossier mobilise son énergie - il dénonce des "accusations scandaleuses" - plombe sa popularité et alimente son procès en immobilisme. Une situation que semble vouloir exploiter le chef de l'État: "Bayrou dans ses tergiversations et sa lenteur, il donne de l’air à Macron", glisse un de ses fidèles.

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