Marché de l’emploi : les entreprises privilégient la flexibilité
Dans un contexte d’incertitude politique et économique, les sociétés ajustent leurs recrutements sans pour autant les freiner. Analyse.
Au troisième trimestre 2025, le volume d’offres d’emploi poursuit son repli, selon le dernier baromètre Hellowork, acteur digital français du recrutement. Le nombre d’annonces diffusées (CDI, CDD, intérim et alternance confondus) diminue de 8,2 % par rapport à la même période de 2024, pour atteindre 2,5 millions de publications – un niveau toutefois comparable à celui de l’an passé. Après un deuxième trimestre particulièrement tendu (-11 %), la baisse du troisième trimestre apparaît plus contenue. Les mois d’été ont été difficiles (-9 %), mais septembre marque une forme d’accalmie avec un recul limité à -6 %. Le contexte politique et social instable ne semble pas avoir freiné les intentions d’embauche. Les entreprises poursuivent leurs recrutements, mais dans une logique plus prudente et plus flexible. « Le marché de l’emploi connaît toujours des turbulences, mais les signaux du mois de septembre invitent à un certain optimisme. Les entreprises continuent de recruter, même si elles privilégient davantage la flexibilité des contrats à court terme », observe David Beaurepaire, directeur délégué d’Hellowork.
La flexibilité, maître mot des recrutements
Les contrats à durée indéterminée enregistrent une nouvelle baisse significative (-12 %), prolongeant une tendance engagée depuis un an. À l’inverse, les CDD progressent de 18 %, notamment sur les mois d’août et septembre, portés par la montée en puissance des services à la personne. L’intérim recule encore (-10 %), mais de manière moins brutale qu’au trimestre précédent, et les données de septembre laissent entrevoir une stabilisation après neuf mois de repli. L’alternance, en revanche, subit un net coup d’arrêt (-19 %). Habituellement dopée au printemps, la courbe s’est cette année inversée dès mai. En cause, la réduction des aides publiques depuis avril et la hausse des charges en juillet.
Des régions inégalement touchées
Aucune région n’échappe au ralentissement, mais les écarts sont sensibles. L’Île-de-France,
première pourvoyeuse d’emplois, résiste mieux que la moyenne (-6,5 %). La région Auvergne-Rhône-Alpes enregistre en revanche une baisse marquée (-10 %). Les plus fortes contractions concernent la Nouvelle-Aquitaine et les Pays de la Loire (-15 % chacune), ainsi que l’Occitanie (-11 %). Quelques territoires tirent néanmoins leur épingle du jeu. Ainsi, le Grand Est (-5 %) et la Provence-Alpes-Côte d’Azur (-1 %) affichent une réelle résilience. À l’échelle des métropoles, la tendance est contrastée : la région parisienne limite le recul (-7 %), tandis que Nantes, Toulouse, Bordeaux et Lille accusent des baisses comprises entre -18 % et -20 %. Seule Nice détonne avec une progression de 10 % des offres, ce qui lui permet de dépasser Strasbourg dans le classement national.
Santé et services à la personne en tête
Sur le plan sectoriel, la santé et le social confirment leur rôle de piliers du marché, concentrant 34 % des offres publiées. Si le volume global recule de 7 %, les contrats courts (CDD, alternance) progressent. Les métiers de la santé demeurent ainsi parmi les plus recherchés : infirmiers, aides-soignants et auxiliaires de vie arrivent en tête des annonces. Les services à la personne et aux entreprises arrivent en deuxième position, avec 16 % des offres. Les difficultés persistent dans les bureaux d’études et la R&D (-36 %) ainsi que dans les filières industrielles, en baisse de 22 à 33 % selon les segments (production, maintenance, ingénierie). Dans ce contexte, les métiers de la comptabilité, de la gestion et de la finance se distinguent, avec une hausse globale de 3 %, particulièrement marquée sur les postes en CDI (+4 %).
Le BTP et l’industrie sous tension
Premier secteur recruteur en intérim, le BTP conserve une activité soutenue, mais le volume d’offres recule encore de 8 % sur le trimestre. Le mouvement est plus prononcé dans l’industrie, où la production et la maintenance chutent de 15 %, la logistique et le transport de 21 %, et l’ingénierie industrielle de 16 %. Ces baisses s’expliquent par les arrêts de production dans plusieurs usines automobiles et par la contraction des ventes, qui pèsent durablement sur l’emploi industriel. Dans ce tableau morose, la construction navale tire son épingle du jeu. Le secteur affiche une hausse de 18 % du nombre d’offres, soit 1 218 publications sur le trimestre. Les besoins se concentrent sur les profils techniques. L’activité est largement localisée dans l’Ouest, avec 69 % des recrutements en Pays de la Loire et 12 % en Bretagne, où les progressions atteignent respectivement +27 % et +37 %. La région PACA, en revanche, voit ses offres reculer de 15 %.