Energies renouvelables
Pompes à chaleur : les premières actions du gouvernement en faveur de la géothermie
Le Premier ministre a récemment dévoilé la première série de mesures issues de la mission « commando » qu’il a installée à Matignon pour accélérer le développement de la filière de la géothermie en France.

Le Premier ministre a récemment dévoilé la première série de mesures issues de la mission « commando » qu’il a installée à Matignon pour accélérer le développement de la filière de la géothermie en France.
L’objectif est très ambitieux pour la filière française de la géothermie. La loi de programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), en cours de finalisation, table sur un triplement de la chaleur produite par géothermie d’ici 2030, en France. « Cette ambition est légitime car le potentiel de développement de la géothermie est considérable », a déclaré le président de l’Association française des professionnels de la géothermie, Éric Lasne, en ouverture des Journées de la géothermie, le 19 juin dernier à Biarritz. « Nos ressources du sous-sol sont encore méconnues dans bon nombre de régions, et surtout, dans bon nombre de métropoles encore consommatrice de chaleur carbonée. Quelle énergie peut mieux que la géothermie produire une énergie renouvelable, décarbonée, locale et compétitive partout sur nos territoires ? Quelle énergie peut mieux que la géothermie viser des objectifs ambitieux en termes de production de chaleur, de frais et de froid – et n’oublions pas l’électricité, notamment dans nos territoires insulaires ? Et tout cela, dans le respect de nos environnements. »
Les besoins de la filière
Les acteurs de la filière disent être prêts à relever le défi et à mettre les bouchées doubles pour atteindre les objectifs fixés par le gouvernement. Mais pour ce faire, ils réclament « un Fonds Chaleur [destiné aux entreprises et aux collectivités et géré par l’ADEME] pérenne voire sanctuarisé. (…), une couverture assurantielle du risque géologique juste et robuste pour la production de chaleur et d’électricité, notamment dans les territoires d’outre-mer ». La filière attend également des règles claires et stables « pour permettre aux bureaux d’études, industriels, investisseurs et aux maîtres d’ouvrage publics et privés de se projeter et de sécuriser des projets souvent complexes et toujours capitalistiques ». Et elle a « besoin de former davantage aux métiers des géosciences et du forage. »
Un enjeu majeur aux yeux du gouvernement
En 2023, la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, a présenté, avec François Bayrou, alors Haut-commissaire au Plan, un plan d’action pour accélérer le déploiement de la géothermie. Aujourd’hui Premier ministre, l’ancien Haut-Commissaire au Plan a installé le 11 avril dernier un groupe de travail interministériel chargé d’accélérer le développement de la filière – une « mission commando » géothermie. « Un enjeu absolument majeur, un enjeu national au moment où l’énergie devient si rare et si chère», a déclaré le chef du gouvernement, lors de l’inauguration des Journées de la géothermie. Il a vanté « une mine d’or que la plupart de nos compatriotes ignorent (...) et, dès l’instant qu’on l’a captée, gratuite. C’est une inépuisable source de chaleur et une inépuisable capacité à rafraîchir ou climatiser nos maisons et nos appartements. » C’est également une énergie décarbonée et souveraine : « sous nos pieds, partout sur nos territoires ». Selon le service national de géologie, plus de 95% du territoire français est capable d’accueillir des installations de géothermie. Et en dépit du coût d’investissement initial, pour le forage et les pompes à chaleur, « le coût global d’exploitation est inférieur à n’importe quelle autre solution carbonée ».
Premières mesures de la mission « commando »
Comment expliquer que la géothermie fournisse aujourd’hui seulement 1% de la chaleur finale consommée en France, contre 15, 20 ou 30% dans d’autres pays ? « Développer la géothermie c’est s’engager sur le long terme », a expliqué le Premier ministre, soit « des efforts importants à engager aujourd’hui et dont nous verrons les résultats dans 15 ou 20 ans ».
Le gouvernement a identifié plusieurs difficultés. Sur le matériel de forage, « à ce stade, nous nous approvisionnons principalement chez nos voisins, en Allemagne et en Italie ». Pour ce qui est des foreurs, « nous en avons seulement quelques centaines pour l’ensemble du pays » alors que, selon les estimations du rapport du Haut-Commissariat au plan, « leur nombre doit atteindre 2 000 à 3 000 pour que nous soyons opérationnels ». C’est pourquoi le gouvernement a encouragé et favorisé l’ouverture de nouveaux centres de formation. En parallèle, il a décidé d’alléger les procédures applicables aux projets de géothermie de surface sur sonde en relevant le seuil de la puissance maximale de la géothermie de minime importance de 500 kilowatts à 2 mégawatts. Ces mesures font partie des premières actions « immédiates », prévues par la mission « commando » sur la géothermie.
Des propositions pour stimuler la demande
Avec plus de 30 sites de production de pompes à chaleur, la France dispose déjà d’un écosystème industriel « qui a tous les atouts pour devenir une filière d’excellence », a souligné François Bayrou. « Cet outil industriel peut être considérablement amélioré » et « l’enjeu est d’accompagner la demande nationale et les producteurs sur le temps long pour qu’ils puissent augmenter leur capacité de production ». Reste que la production géothermique ne pourra se développer que « si la demande suit ».
Premier obstacle : « l’ignorance par le grand public des atouts de cette énergie ». Le gouvernement va donc accélérer le déploiement du réseau d’animateurs régionaux spécialistes de la géothermie et mener des actions de communication auprès des collectivités et des entreprises. Mais le principal déterminant « est financier » et le Premier ministre travaille actuellement sur ce point avec les banques et la Caisse des Dépôts. Objectif : « effacer le différentiel de coût entre l’installation d’une chaudière à gaz [environ 10 000 euros] et une pompe à chaleur [20 000 euros, forage compris] » avec « des produits bancaires qui permettront aux foyers d’étaler dans le temps le coût de cette installation », pour qu’elle soit accessible à tout le monde. Quant aux aides existantes pour la géothermie profonde, telles que le fonds Chaleur, « elles peuvent être efficaces, mais pour l’instant ce n’est pas encore tout à fait le cas ». Prochaine étape, en septembre, « avec une seconde série de dispositions sur tous ces sujets ».
Miren LARTIGUE, de Biarritz