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Procès requis dans l'affaire des lingots d'or du Prince de Conty

Le parquet de Brest a requis le renvoi en correctionnelle de trois Français et d'un couple d'Américains pour leur implication dans la revente de lingots pillés sur l'épave du Prince de Conty, une frégate de la...

Les lingots pillés sur l'épave du Prince de Conty, une frégate de la compagnie des Indes échouée en 1746 en Bretagne. Photo prise lors de leur restitution à la France, à  Brest (Finistère) le 15 juin 2022 © Sandra FERRER
Les lingots pillés sur l'épave du Prince de Conty, une frégate de la compagnie des Indes échouée en 1746 en Bretagne. Photo prise lors de leur restitution à la France, à Brest (Finistère) le 15 juin 2022 © Sandra FERRER

Le parquet de Brest a requis le renvoi en correctionnelle de trois Français et d'un couple d'Américains pour leur implication dans la revente de lingots pillés sur l'épave du Prince de Conty, une frégate de la compagnie des Indes échouée en 1746 en Bretagne.

Dans un réquisitoire dont l'AFP a obtenu copie mardi, le procureur de Brest requiert le renvoi en correctionnelle d'Yves et Brigitte Gladu, un couple de Bretons âgés respectivement de 77 et 75 ans, de leur belle-sœur Annette May Pesty, 78 ans, et d'un couple d'Américains vivant en Floride, Eleonor (dite Gay) Courter, 80 ans, et son mari Philip Courter, 82 ans. 

Le magistrat requiert des poursuites pour association de malfaiteurs contre tous les suspects, demandant également que certains d’entre eux soient jugés pour blanchiment de vol et recel de vol.

L'affaire débute le 21 février 2018 lorsque Michel L'Hour, directeur du Département français des recherches archéologiques sous-marines (Drassm), signale une vente suspecte de cinq lingots d'or sur un site internet américain.

Les autorités américaines saisissent le butin car M. L'Hour assure que les lingots en question proviennent de l'épave du Prince de Conty, un navire ayant fait naufrage le 3 décembre 1746 par une nuit de tempête et de brouillard, près de Belle-Ile-en-Mer (Morbihan). 

Immergée par 10 à 15 mètres de fond, dans une zone particulièrement difficile d'accès, l'épave était tombée dans l'oubli jusqu'à sa découverte en 1974 puis sa mise à sac l'année suivante.

Vite identifiée, la vendeuse des lingots s'avère être Gay Courter, une écrivaine américaine à succès résidant à Crystal River, sur la côte ouest de la Floride. Elle dit tenir ces lingots d'un couple d'amis français, Gérard Pesty (mort depuis) et Annette May Pesty. 

Dans une émission télévisée américaine diffusée vingt ans plus tôt, Annette May Pesty avait assuré avoir découvert ces lingots lors d'une plongée au large du Cap Vert. Mais les enquêteurs écartent vite cette hypothèse et orientent leurs investigations vers le beau-frère de Mme May Pesty, Yves Gladu, un photographe sous-marin professionnel très connu dans le milieu.  

Habitué des eaux bretonnes, M. Gladu avait échappé à un premier procès, en novembre 1983, portant déjà sur le pillage du Prince de Conty. Le tribunal correctionnel de Lorient avait condamné cinq prévenus pour détournement et recel d'épave maritime mais n'avait pas pu localiser les lingots pillés.

40 plongées

Placé en garde à vue en mai 2022, M. Gladu reconnaît finalement  avoir plongé une quarantaine de fois sur l'épave entre 1976 et 1999 et avoir remonté 16 lingots, qu'il dit avoir vendus en 2006 à un ancien militaire en Suisse.

Mais il assure ne pas avoir remis de lingots aux Courter, un couple qu'il connaît pourtant depuis les années 80 et qui a embarqué sur son catamaran "Tethys" en Grèce (2011), aux Caraïbes (2014) et aux îles Marquises (2015).

Ce navire a d'ailleurs été saisi par la justice dans le cadre de l'enquête.

Visés par un mandat d'arrêt international, les époux Courter sont eux interpellés puis assignés à résidence, à l'été 2022 à Southampton (Royaume-Uni). Interrogés par la juge brestoise, ils expliquent avoir vendu 18 lingots pour plus de 192.000 dollars (163.000 euros), notamment sur le site de commerce en ligne eBay.

Les lingots (23 au total) avaient été confiés aux époux Courter en 1986 par Gérard Pesty mais le revenu de leur vente devait revenir aux époux Gladu. M. Pesty avait notamment vendu trois lingots au British Museum.

"Les Courter ont accepté parce que ce sont des gens profondément amicaux et sympathiques. Ils n'ont pas vu le mal parce qu'aux États-Unis, la réglementation sur l'or n'est pas du tout la même qu'en France: la cession est totalement libre", a expliqué à l'AFP leur avocat Me Grégory Lévy.

"Ils ne se sont enrichis de rien", a ajouté l'avocat affirmant qu'il se battrait pour obtenir un non lieu ou la relaxe.

Contactés, les autres avocats n'ont pas donné suite. Un procès pourrait avoir lieu à l'automne 2026, selon le parquet.

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