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Programmation de l'énergie: l'Assemblée n'entend pas être court-circuitée

L'Assemblée nationale a entamé lundi l'examen d'une proposition de loi qui entend définir le futur énergétique de la France à l'horizon 2035. Mais les députés protestent contre le souhait du gouvernement de publier avant même son adoption définitive le décret fixant cette trajectoire, et...

La centrale nucléaire de Gravelines, le 13 juin 2025 © Sameer Al-DOUMY
La centrale nucléaire de Gravelines, le 13 juin 2025 © Sameer Al-DOUMY

L'Assemblée nationale a entamé lundi l'examen d'une proposition de loi qui entend définir le futur énergétique de la France à l'horizon 2035. Mais les députés protestent contre le souhait du gouvernement de publier avant même son adoption définitive le décret fixant cette trajectoire, et la place respective du nucléaire et des énergies renouvelables.

Le ministre de l'Industrie, Marc Ferracci, a rappelé ce week-end que le décret serait publié "avant la fin de l'été", et par conséquent avant la fin de la navette parlementaire du texte du sénateur Daniel Grémillet (LR), afin de permettre à certaines filières de "lancer des investissements". 

Un calendrier contesté par les députés, y compris ceux de la coalition gouvernementale : "Je ne crois pas (...) qu'il soit sage de se dire +on verra plus tard, prenons d'abord un décret alors que le Parlement est en train de discuter+", a lancé le rapporteur du texte et ancien ministre de l'Economie Antoine Armand (Renaissance), plaidant pour un "aval de la représentation nationale" face aux enjeux. 

Et le député de Haute-Savoie de suggérer au gouvernement de "surseoir de quelques semaines encore à l'adoption d'un décret".

La présidente de la commission des Affaires économiques, Aurélie Trouvé (LFI), s'est elle "étonnée" des propos du ministre, les jugeant "fort peu respectueux" de la "démocratie parlementaire".

Elle a rappelé que la loi énergie climat de 2019 fixait le "principe d'une loi quinquennale sur l'énergie" à partir de 2023, et que le choix du gouvernement d'en passer par une simple proposition de loi conduisait à ce qu'il n'y ait "ni étude d'impact ni avis du Conseil d'Etat, ce qui peut quand même sembler absolument indispensable".

Au nom du Rassemblement national, le député de la Meuse Maxime Amblard s'est félicité d'une "victoire, celle d'avoir obtenu grâce à Marine Le Pen (...) l'ouverture de ce débat indispensable".

C'est en effet sous la pression du RN, qui en avait fait un motif de censure, que François Bayrou a accepté d'inscrire à l'ordre du jour des débats de l'Assemblée l'examen de ce texte.

Le nucléaire au cœur du débat

Sur le fond, le débat, prévu pour l'instant jusqu'à vendredi, portera pour l'essentiel sur la question de la relance du nucléaire.

Après un examen chaotique en commission, au cours duquel l'article fixant les objectifs du secteur nucléaire a été supprimé, M. Armand a déposé des amendements pour réintroduire une relance massive de l'atome, qui semble convenir au RN.

Elle prévoit notamment de nouvelles capacités nucléaires, équivalant à engager la construction de 14 nouveaux EPR au plus tard en 2030.

"Les amendements déposés par le rapporteur sur les objectifs de nucléaire et sur la suppression des objectifs pour les énergies intermittentes vont dans le bon sens pour nous", a estimé M. Amblard.

A contrario, la recherche d'un accord entre le rapporteur et les socialistes semble au point mort. Face au retard pris dans le développement des énergies renouvelables, ces derniers plaident pour la construction de huit nouveaux EPR d'ici 2035. Il propose d'attendre cinq ans et un retour d'expérience sur la construction des nouveaux réacteurs, avant de s'engager sur des capacités supplémentaires.

Comme le reste de la gauche, le PS déplore que le texte ne fixe plus la part des énergies renouvelables à atteindre, parlant uniquement maintenant d'énergies "décarbonées" - démarche que soutient M. Ferracci au nom d'une nécessaire "flexibilité".

Les Insoumis et les écologistes sont eux farouchement opposés à toute relance de l'atome.

Eolien et solaire exclus

En début de soirée, les députés ont réécrit le premier article de la proposition de loi (PPL), initié par la commission, qui confiait le monopole de la construction et de l'exploitation des réacteurs nucléaires à la puissance publique et à EDF.

Ils ont adopté, grâce au soutien massif du RN et contre l'avis du gouvernement et du rapporteur, un amendement du député Horizons Eric Alfandari qui supprime ce monopole et définit quels doivent être les grands objectifs d'une politique énergétique.

Celle-ci doit notamment "proposer un objectif annuel d'énergie décarbonée qui ne peut être décliné par type d'énergie". 

L'amendement définit ce que sont ces énergies décarbonées: les installations nucléaires, hydrauliques, marémotrices, géothermiques, aérothermiques, biomasse, osmotiques et cinétiques - un sous-amendement du RN ayant supprimé de cette énumération les installations éoliennes et solaires.

Un autre sous-amendement du RN a précisé que la politique énergétique devait fixer un objectif de prix final d'électricité pour les consommateurs.

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