Keysilia, un vent nouveau sur les politiques locales de l'habitat
Face à la fracture territoriale en matière d'expertise habitat, Sylvie Ruin lance une solution innovante avec Keysilia : l'ingénierie de transition sur-mesure. Rencontre avec une pionnière qui bouscule les codes.

Pourquoi avoir choisi d’accompagner les territoires dans leurs politiques de l’habitat ?
SR. J’ai eu la chance de vivre plusieurs vies professionnelles : en collectivités, dans le secteur HLM, en milieu associatif à l’échelle régionale et même au cabinet du maire d’une commune minière.
Partout, j’ai observé la même réalité : un écart croissant entre des territoires bien dotés en ingénierie interne et d’autres, souvent ruraux ou périphériques, qui n’ont ni les moyens budgétaires ni l’attractivité pour recruter des experts habitat.
Or, les politiques de l’habitat se sont énormément complexifiées. Il ne s’agit plus seulement de produire du logement, il faut reconfigurer la ville, piloter la transition énergétique, développer des parcours résidentiels, gérer les enjeux fonciers et innover dans les modes de concertation. Les exigences qui en découlent explosent, mais les équipes locales n’ont pas toujours les ressources pour y répondre. Trop souvent, des renoncements et un sentiment d’inégalités territoriales en découlent.
Le besoin est-il lié à la taille des territoires ?
On pourrait le croire, mais non. Peu de territoires peuvent s’offrir en interne les expertises nécessaires. La complexité est la même partout. C’est parfois sur les territoires moins attractifs, où aucun promoteur ne s’installe, que l’expertise est cruciale.
Le paradoxe est frappant. Certaines communes confient un PLH (Programme Local de l’Habitat) à un bureau d’étude, mais n’ont aucune ressource pour piloter son élaboration et suivre sa mise en œuvre.
À certains moments clés, il faut un accompagnement de proximité, aux côtés des élus et des DGS. Parfois, quelques heures suffisent pour débloquer une situation, solliciter un financement ou préparer une négociation. Dans ces cas, un poste permanent n’est pas indispensable, mais une ingénierie ponctuelle a toute sa pertinence.
En quoi Keysilia propose une approche originale ?
Keysilia se positionne à mi-chemin entre le bureau d’étude classique et l’expertise interne. Nous intervenons en amont pour aider à définir les besoins, choisir les bons prestataires, cadrer les procédures, et en aval pour piloter et mettre en œuvre les projets.
Notre force est de bien connaître le fonctionnement des collectivités, de pouvoir apporter rapidement des clés de lecture sur des sujets complexes et savoir activer un large réseau professionnel.
Nous sommes présents sur le terrain avec une approche très pragmatique, même si maintenant nous faisons appel à l’IA. Nous considérons que l’habitat est à la fois une question politique et technique, deux dimensions essentielles qu’il convient d’articuler.
Notre rôle est de faire économiser aux élus et aux directeurs le temps long de l’apprentissage que j’ai moi-même connu pendant 35 ans. Mon moteur, c’est la transmission.
Avez-vous un exemple concret de votre approche ?
Récemment, une petite commune devait contribuer au futur PLH communautaire. Le secrétaire général de mairie étant surchargé et ne disposant pas d’ingénierie interne, la mission apparaissait impossible.
En environ trois jours d’intervention, nous avons pu organiser un débat en conseil municipal sur les enjeux à 15 ans, structurer la réflexion locale et rédiger une contribution stratégique communale destinée à l’intercommunalité.
L’objectif n’est pas de faire à la place de, mais de mettre en capacité de faire. Même modestes, les collectivités doivent pouvoir disposer, le temps d’un projet, de la force de frappe d’un intervenant expérimenté. Je propose un modèle inspiré du secteur privé, celui de la mission de transition. Être là juste le temps nécessaire, transmettre les clés, trouver les solutions, puis accompagner jusqu’à la mise en pratique.
Quels peuvent être les apports de l’IA ?
L’IA est un puissant levier, mais elle ne remplace ni l’expérience, ni l’expertise humaine.
Je l’utilise comme un accélérateur : générer un projet de cahier des charges très rapidement, synthétiser un rapport de 200 pages, préparer une trame de convention territoriale, etc. Ce gain de temps est partagé entre Keysilia et la collectivité.
Je vois l’IA comme un «brin de magie moderne». Mais attention : sans usage éthique et responsable, elle reste un outil aveugle. Mon modèle repose donc sur une alliance : d’un côté, l’expertise, l’expérience terrain et la connaissance des collectivités, de l’autre, la puissance de l’IA, qui rend le service de Keysilia accessible et son modèle économiquement pertinent.