L’Umih de l’Oise appelle à une meilleure réglementation du secteur
Alors que les acteurs de la restauration s’inquiètent pour leur avenir, l’organisation professionnelle plaide pour la mise en place de barrières à l’installation et un meilleur fléchage des aides de l’État. Entretien avec Charles-Édouard Barbier, président de l’Umih de l’Oise.

En juillet dernier, l’Umih publiait un guide intitulé «Anticiper et agir» à l’attention des professionnels de la restauration. L’objectif ? Apporter des conseils et des solutions concrètes aux nombreux entrepreneurs confrontés à une baisse d’activité. «Nous enregistrons plus d’une défaillance par semaine dans le département, ce qui correspond environ au chiffre national de 23 entreprises par jour qui vont vers un dépôt de bilan», confie Charles-Édouard Barbier, président de l’Umih de l’Oise et gérant de l’Auberge des Tilleuls à Heilles.
Une situation qui est généralisée. «Cela concerne tout le monde, y compris des structures bien établies», confie encore le président de l’Umih de l’Oise. Ces difficultés touchent majoritairement, selon l’organisation, les établissements qui privilégient les produits frais et le fait maison. «Cela fait partie de l’essence même de nos métiers, mais ces pratiques traditionnelles nécessitent plus de mains-d’œuvre et, par conséquent, une rentabilité encore plus difficile à atteindre», précise-t-il. Afin d’aider la filière, Charles-Édouard Barbier, à l’instar des instances nationales, appelle à une régulation des installations et à un meilleur fléchage des aides aux entreprises.
Réglementer les installations
«Aujourd’hui, tout le monde peut ouvrir un restaurant. Contrairement aux coiffeurs, bouchers ou électriciens, vous n’avez pas besoin de diplôme pour vous installer», s’agace le responsable professionnel. Une absence de réglementation qui a contribué à faire de la restauration un secteur ultra-concurrentiel. «L’État a permis le déclassement de nos métiers : les boulangers, les supermarchés, les fournisseurs de surgelés ont la possibilité d’installer des micro-ondes pour nourrir les travailleurs, le midi», déplore-t-il.
Autre sujet d'inquiétude : la multiplication des enseignes de restauration rapide. «En termes de santé publique, c’est quand même regrettable », note Charles-Édouard Barbier. S’il est conscient que la baisse du pouvoir d’achat des consommateurs est en partie responsable de ce changement d’habitudes, le président de l’Umih de l’Oise en appelle cependant à l’État. «Nous avons su nous remettre en question, les grilles de salaires ont progressé de 19 %, c’est colossal ! Nous avons aussi signé un accord sur les salaires des apprentis, qui sont plus élevés chez nous que partout ailleurs», rappelle-t-il. Des efforts qui n'ont pas été reconnus. «Il faut maintenant que l'État joue son rôle et fasse son autocritique sur la manière dont il nous a traités ces vingt dernières années», poursuit Charles-Édouard Barbier.
Retrouver de la rentabilité
Si l’Umih de l’Oise ne demande pas de traitement de faveur, elle attend cependant un meilleur fléchage des aides existantes. «Nous demandons qu’elles soient mieux redistribuées, mais aussi qu’on nous donne un environnement stable et proactif afin de permettre à nos entreprises de retrouver un équilibre financier», explique Charles-Édouard Barbier. Lequel déplore l’effondrement de la rentabilité depuis la crise sanitaire : un restaurant qui faisait entre 8 et 10 % de marge avant 2020 en fait aujourd’hui entre 2 et 3 %. «Si l’on veut continuer à demeurer le premier pays en matière de gastronomie, il faut vraiment que l'on arrive à trouver les bons leviers pour que les restaurants qui s’engagent dans le fait maison et un service en salle de qualité puissent retrouver de l’air», alerte le chef d'entreprise.
Ce qui demande un changement de vision. «Il faut arrêter d’être court-termiste : le tourisme représente 10 % du PIB. Aujourd’hui, nous demeurons la première destination mondiale, mais nous sommes en train de nous faire damer le pion, notamment par l’Italie et l’Espagne», prévient-il. Le président de l’Umih de l’Oise rappelle par ailleurs que, contrairement à d’autres secteurs d’activité, la restauration ne bénéficie pas d’aides à l’investissement. «Les entreprises ont beaucoup de mal à financer l’amélioration de leurs outils de travail ou à se moderniser. C’est pourtant essentiel pour continuer à être attractifs et pérenniser notre activité», conclut Charles-Édouard Barbier.