Management

La communication favorise le management participatif

Le management est sans cesse en proie à des mutations et à des adaptations. La mise en place du télétravail est l'un des derniers bouleversements du secteur. Philippe Sevrain, psychologue du travail chez Présoa, réseau de médecine du travail dans l'Aisne et dans l'Oise, revient sur les bonnes pratiques du management et ses difficultés.

Philippe Sevrain, psychologue du travail chez Présoa. (c) Présoa
Philippe Sevrain, psychologue du travail chez Présoa. (c) Présoa

Pour quelles raisons vient-on consulter ?

Il s'agit de problèmes relationnels dans deux cas sur trois et cela s'est accéléré depuis la crise covid, même s'il y a d'autres sujets comme le sens du travail, l'autonomie, la charge de travail. Ce sont des problèmes relationnels dans tous les sens : les gens ont des difficultés à communiquer en règle générale ou ne communiquent pas donc il faut essayer de faciliter cette communication. Et il y a eu des bouleversements dans le travail comme le télétravail qui ont installé un changement de modèle dans la façon de communiquer. Les managers sont une population qui a été longtemps oubliée selon moi, ceux qu'on appelait les cadres intermédiaires, entre le marteau et l'enclume. Manager est un vrai métier qui demande des qualités intrinsèques : respect, écoute, empathie et puis une grande plasticité. Le manager doit s'adapter aux différents profils de personnalité, c'est ce qui fait la richesse d'une équipe. On ne va pas manager de la même façon une personne qui aurait des tendances phobiques et une personne qui aurait des traits de personnalité obsessionnels, hors pathologie. La personnalité, c'est cela, nous avons tous des versants, on va d'un côté, on va de l'autre et le manager doit faire attention à ces éléments.

On ne forme pas assez les managers ?

Aujourd'hui, des gens qui montent manager, qui ont cette promotion interne, c'est positif. Il y a plusieurs décennies, on disait par exemple dans l'industrie, qu'un chef d'équipe ou un chef d'atelier devait être capable d'occuper tous les postes et dés lors, il était légitime. Aujourd'hui, cela a changé, le travail comme le rapport au travail mais aussi l'idée qu'on se fait du management. En témoigne le télétravail où il a fallu faire vite pour beaucoup d'entreprises suite à la crise covid. Certains managers, à juste titre, ont été un peu déboussolés et ont pu perdre le sens et la sémantique du travail. Le management classique a été dématérialisé, il a fallu trouver le bon positionnement, ni trop près ni trop loin et ça n'est pas évident de manager une équipe à distance.

Le télétravail a été un choc pour les managers ?

Sa mise en place a été brutale et les entreprises n'ont pas forcément eu les appuis techniques tout de suite pour faire un télétravail de qualité. Cela a tâtonné. Dans ma pratique au quotidien, à travers la psychologie du travail, j'interroge toujours l'organisation et le management. On porte entre autres des diagnostics ce qu'on appelait avant des diagnostics RPS sur les risques psycho-sociaux, une approche un peu doloriste où on abordait le diagnostic par les risques. On pratique un diagnostic QVCT (Qualité de vie et conditions de travail), on regarde plutôt les choses qui donnent plaisir au travail. Et le télétravail qui fonctionne, c'est celui qui est souhaité par les salariés.

Quelles seraient selon vous les bonnes pratiques en termes de management ?

Je crois au management participatif, c'est un vrai modèle de compromis et de consensus, entre les employés et le manager. Il faut être acteur de son travail et tous les acteurs sont essentiels dans l'entreprise et pour son fonctionnement. Je crois aussi à la diversité des personnalités d'un groupe de travail. Il est difficile de transférer un modèle de management d'une entreprise à une autre parce qu'il y a à chaque fois une histoire et une philosophie différentes. Il faut adapter à la marge son management au groupe qu'on manage mais créer les conditions d'un travail partagé.

Quels outils peut-on mettre en place pour favoriser ce management ?

Il faut réunir les différentes personnes qui structurent l'entreprise : les salariés, le responsable sécurité environnement s'il s'agit d'une grosse structure, les chefs. L'idée est de faire un comité de pilotage et d'engager avec eux une analyse QVCT dans l'entreprise. Ainsi, on crée les conditions d'une écoute et de partage. On doit être en capacité de déléguer certaines tâches, de développer l'autonomie de l'équipe, même si le manager à la fin, tranche. Des entreprises ont fait ce travail.

D'autres formes de management peuvent fonctionner ?

Oui parfois, et cela dépend de l'histoire de l'entreprise, un management assez classique descendant avec un N+1 peut fonctionner. On le constate avec des statistiques par exemple un faible nombre d'arrêts de travail. Parfois, il est difficile de bouger les lignes dans les entreprises, il faut aussi que ces changements de management soient encaissés par les salariés. Ces changements doivent être accompagnés quoiqu'il arrive.