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Territoires

Prendre le train, c’est compliqué

Augmentation déguisée des prix, absence de dédommagement en cas de retard, dénominations trompeuses : plusieurs études dénoncent les difficultés auxquelles sont confrontées les clients de la SNCF. Dans un contexte de progression de la fréquentation.


© Olivier RAZEMON pour DSI.
© Olivier RAZEMON pour DSI.

Les voyageurs en train conservent, dans leur mémoire, le souvenir de désagréments plus ou moins pénibles. Un retard dû à un sanglier errant sur les voies, une climatisation excessive durant tout le trajet, des correspondances ratées faute d’information suffisante ou de contrôleur arpentant le convoi, des demandes de remboursement ignorées en raison d’une clause contractuelle méconnue.

La Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut), qui rassemble 160 associations locales, ne se contente pas de compiler les plaintes de ses adhérents. Elle cherche aussi à objectiver les motifs de mécontentement, déceler les fausses bonnes idées des opérateurs ferroviaires ou décrypter l’inutile complexité des offres.

Ces derniers mois, la Fnaut a publié une série d’enquêtes révélant ces dysfonctionnements. Elles ciblent logiquement la SNCF, qui demeure, en dépit de l’avènement progressif de la concurrence, l’opérateur principal en France. Il importe de préciser le contexte : quelle que soit la pertinence des critiques, le nombre de voyages en train ne cesse de progresser. En 2024, la fréquentation des TER et trains Intercités a enregistré une hausse de 11% par rapport à 2023, et les TGV ont absorbé une augmentation de 4%, atteignant un record de presque 130 millions de passagers. A la mi-2025, la progression se poursuivait, pour tous les segments de marché. Ce qui suit s’apparente donc à la rançon de la gloire.

Des Ouigo plus nombreux et plus chers

Le succès des Ouigo a ses revers. Ces rames peintes en bleu et rose transportent davantage de passagers que les TGV classiques, sur des sièges resserrés, sans restauration à bord, et valent au TGV une partie de son attractivité. La SNCF espère d’ailleurs que la part du Ouigo va progresser jusqu’à un tiers des ventes dans les années à venir. Toutefois, accuse la Fnaut, « l’augmentation de l’offre dans ces trains se fait toujours au détriment de celle des Inoui [les TGV classiques] ». Entre 2013 et 2023, l’offre de TGV traditionnel a ainsi « baissé de 25% ».

Les billets Ouigo se sont vendus, en moyenne, 45% plus cher en 2023 qu’en 2019, selon les données de l’Autorité de régulation des transports. Le prix maximal d’un Ouigo peut atteindre 109 euros, tandis que ceux des TGV standards sont « plafonnés à 89 euros » pour peu que l’on dispose d’une carte de fidélité.

Les billets low-cost ne sont pas remboursables. Il est certes possible de les modifier, mais en versant une pénalité de 19 euros en plus d’un « réajustement » du tarif, en fonction de la date et l’heure du nouveau trajet. Les TGV standard, eux, sont « remboursables sans frais jusqu’à 7 jours avant le départ » et « modifiables sans pénalité, mais avec réajustement tarifaire », souligne la Fnaut. Les usagers de Ouigo ne reçoivent pas de bon d’achat pour les retards supérieurs à 30 minutes. Enfin, les titulaires de cartes de fidélité « Avantage » (5 millions d’abonnés) ou « Liberté » (349 euros par an, quelques milliers d’abonnés), bénéficient de réductions pour les TGV classiques, mais paient Ouigo au prix fort.

Ces cartes sont d’ailleurs concurrencées par des titres qui portent curieusement le même nom ! Ainsi, la région Auvergne-Rhône-Alpes propose des tarifs « Illico Liberté », la région Centre-Val de Loire a opté pour « Rémi Liberté », et l’Ile-de-France a mis en place sur son réseau, confié pour partie à la SNCF, une carte permettant la facturation des déplacements en fin de mois, appelée « passe Navigo Liberté + ». La carte Avantage de la SNCF se télescope pour sa part avec la carte « Avantages Jeunes » (au pluriel), destinée aux jeunes de Bourgogne-Franche-Comté pour la culture ou les loisirs, et qui offre aussi des réductions sur le TER.

Cet imbroglio sémantique rappelle la multiplicité des marques lancées par les régions pour leurs TER, dénoncée depuis longtemps par la Fnaut. Des noms qui n’affichent qu’un lointain rapport avec le train : Fluo dans le Grand-Est, Mobigo en Bourgogne-Franche-Comté, Nomad en Normandie… Sans oublier que les cartes de réduction ou modalités de réservation changent en passant d’une région à l’autre, dont la plupart des voyageurs ignorent les limites administratives exactes.

La Fnaut a aussi étudié les « assurances voyages » proposées au moment de l’achat d’un billet en ligne. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, ces contrats ne couvrent pas l’annulation ou les retards. L’assurance fonctionne en cas de voyage vers des pays à risque, « comme la Russie ou la Chine », où peu de voyageurs s’aventurent, ou lorsque le voyageur doit renoncer à son déplacement en raison d’un cas de force majeure. Mais de nombreuses cartes bancaires, l’assurance pour l’habitation ou les mutuelles de santé assurent déjà ces aléas.