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Cour administrative d'appel de Douai : «98% des affaires trouvent une solution définitive»

La cour administrative d’appel de Douai a tenu son audience solennelle de rentrée, l’occasion pour sa présidente, Geneviève Verley-Cheynel, de présenter un bilan détaillé de l’activité juridictionnelle, les défis auxquels la juridiction est confrontée, ainsi que les orientations pour l’avenir.


Geneviève Verley-Cheynel, présidente de la cour administrative d’appel de Douai.
Geneviève Verley-Cheynel, présidente de la cour administrative d’appel de Douai.

La présidente a d’abord dressé un panorama chiffré de l’activité de la cour, insistant sur la rigueur et la qualité du travail accompli avec «la totalité des dossiers en instance depuis plus de deux ans». Si certains retards demeurent, ils sont imputables à la longueur de certaines expertises ou à «des comportements dilatoires des parties», la cour faisant également face à des délais encadrés par la loi, notamment en matière d'urbanisme ou d’énergies renouvelables, qui obligent parfois à différer le traitement d’autres affaires.

Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public de la cour administrative d’appel de Douai.

Des défis structurels et sociétaux

Dans la structure du contentieux, plus de 60% des entrées concernent le séjour et l’éloignement des étrangers, tandis que l’urbanisme et l’environnement représentent 6,5% et la fonction publique 7%. Les autres thématiques (commande publique, fiscalité, police administrative, etc.) représentent des pourcentages très inférieurs. «80 % des jugements de première instance sont confirmés et seulement 7,7% des arrêts font l’objet d’un pourvoi en cassation», a également rappelé Geneviève Verley-Cheynel. «Sur ces pourvois, 15% donnent lieu à cassation, ce qui signifie que plus de 98% des affaires jugées par la cour trouvent une solution définitive. Ceci témoigne de la valeur de la justice rendue, malgré une situation particulièrement saine mais précaire en raison d'une imprévisibilité du taux de saisine».

Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public de la cour administrative d’appel de Douai.

La présidente de la juridiction a aussi mis en lumière des défis structurels et humains auxquels est confrontée la cour administrative d’appel de Douai. A commencer par l’ampleur du contentieux de masse qui interroge la finalité de l’action juridictionnelle. «Le juge peut parfois avoir le sentiment que son intervention n’a que peu d’effet concret, notamment dans le contentieux des étrangers», a-t-elle reconnu. «La dématérialisation, réussie sur le plan technique, entraîne par ailleurs une nouvelle difficulté : des dossiers numériques de plusieurs milliers de pages, impensables en format papier, qui alourdissent l’instruction». A cela s’ajoute la complexité croissante du droit et l’inflation normative, tandis que la légitimité du juge administratif est fragilisée dans un contexte de méfiance institutionnelle. «Accusé du gouvernement de juge s'il censure l'administration ou au contraire de complaisance s'il rejette le recours de l'administré, le juge administratif est une cible assez facile. Mais nous sommes animés de la conviction profonde que chacune de nos décisions, qui bien sûr sont faillibles et doivent pouvoir être contestées, ont pour seule mobile la loi, l'état de droit, l'indépendance de la justice, dans le respect des autres institutions et de la République».

Renforcer la lisibilité de la justice administrative

Face à ces tensions, la cour administrative d’appel de Douai entend développer des initiatives pour renforcer la lisibilité et l’ancrage de la justice administrative par ses contributions aux travaux scientifiques et à la formation, notamment par l’accueil de stagiaires, et l’amélioration de la compréhension des décisions. La présidente a ainsi annoncé son souhait d’associer davantage le monde académique et les avocats aux commentaires jurisprudentiels. Mais l’innovation la plus marquante réside dans la mise en place des conseils de juridiction. Créés par la loi de 2023, ces conseils sont des lieux d'échange et de communication entre la juridiction et la cité du droit, ils réuniront les parlementaires et divers interlocuteurs traditionnels de la juridiction.

Et Geneviève Verley-Cheynel de conclure : «Mes derniers mots seront pour vous assurer de l'engagement total de l'ensemble des magistrats de cette cour et des personnels de greffe et je tiens à les en remercier publiquement devant vous».

Geneviève Verley-Cheynel, présidente de la cour administrative d’appel de Douai.

Fondée en 1999, la cour administrative d’appel de Douai est l’une des huit cours administratives d’appel en France. Elle exerce un rôle de juridiction de second degré, en réexaminant les décisions rendues par les tribunaux administratifs de son ressort, Amiens, Lille et Rouen, et traite des litiges opposant les citoyens, entreprises ou associations à l’administration dans des domaines variés comme l’urbanisme, la fiscalité, les marchés publics ou encore la fonction publique. Sa mission principale est ainsi d’assurer un contrôle de légalité et de garantir la bonne application du droit administratif, sous l’autorité du Conseil d’Etat.