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Agences de l’eau : « les aides ne sont pas conditionnées au portage intercommunal des projets »

La délégation aux Collectivités territoriales du Sénat se penche actuellement sur les conditions d’attribution des aides des Agences de l’eau aux communes qui n’ont pas transféré leurs compétences « eau » et « assainissement ».

© Adobe Stock.
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Dans le cadre de la mission d’information sur les Agences de l’eau, la délégation aux collectivités territoriales du Sénat a lancé une réflexion sur l’impact de la loi du 11 avril 2025 visant à assouplir la gestion des compétences « eau » et « assainissement », qui a mis fin à l’obligation pour les communes de transférer ces compétences aux intercommunalités.

« Les élus locaux sont perdus, ils n’ont plus de visibilité »

Selon « des remontées de terrain », des communes qui n’ont pas transféré ces compétences et qui sollicitent des aides de l’Agence de l’eau se sont vu répondre « qu’il faut l’avis de l’intercommunalité » ou refusé un soutien financier « parce que le périmètre du projet n’est pas pertinent », a expliqué Bernard Delcros, sénateur du Cantal (Union centriste) et président de la délégation sénatoriale, le 23 octobre 2025, lors de l’audition de préfets de région (qui ont la fonction de coordonnateurs de bassin) et de représentants des Agences de l’eau. « Les élus locaux sont perdus, ils n’ont plus de visibilité » sur les conditions d’éligibilité à ces aides. Et ce, alors que « la loi dit que le périmètre de gestion de l’eau et des assainissements est défini par les élus locaux en fonction des réalités du terrain », a-t-il rappelé.

Les six Agences de l’eau réparties sur le territoire participent à la gestion de cette ressource à l’échelle des grands bassins fluviaux français, guidée chacune par un « comité de bassin » qui réunit des représentants de l’État, des collectivités, des associations, des entreprises et des usagers. Elles accordent des aides financières aux collectivités et aux syndicats d’eau pour soutenir des projets de dépollution, d’assainissement, de préservation des captages ou de restauration des écosystèmes aquatiques.

« Il n’y a pas de conditionnalité liée à l’intercommunalité »

Préfet de la région d’Ile-de-France et président du conseil d’administration de l’Agence de l’eau Seine-Normandie, Marc Guillaume a expliqué que « les aides ne sont pas conditionnées au portage intercommunal des projets. (…) Notre programme prévoit l’attribution des aides à la collectivité qui est compétente à la date du dépôt du dossier, que ce soit un syndicat d’eau ou une intercommunalité. Aucun refus n’est basé sur le type d’acteur ou sur une exigence de portée intercommunale. »

L’Agence de l’eau Seine-Normandie a ainsi « attribué 334 millions d’aides à des communes isolées », a-t-il précisé, pour démontrer qu’« il n’y a pas de conditionnalité liée à l’intercommunalité ». Et « le fait que l’on demande l’avis de l’intercommunalité ne signifie pas que l’aide soit conditionnée à cet avis » : la politique de l’eau est le fruit d’une gouvernance partagée et « il faut se parler ». Est-il possible que certains agents ne respectent pas les directives de l’Agence ? « Je n’ai pas ces informations-là, mais j’ai du mal à penser que cela puisse être le cas », a répondu le préfet.

« 76% des refus sont liés à des demandes non éligibles »

Préfet de la région Grand Est et président du conseil d’administration de l’Agence de l’eau Rhin-Meuse, Jacques Witkowski a fait la même réponse à la délégation sénatoriale : « l’Agence de l’eau n’a pas de politique d’attribution des aides en fonction de la typologie juridique du demandeur ». Et de préciser : « 76% des refus [de subventions de la part de l’Agence de l’eau Rhin-Meuse] sont liés à des demandes non éligibles car elles ne rentrent pas dans le catalogue des aides répertoriées (48%), à des montants qui ne sont pas éligibles car inférieurs à 10 000 euros (21%) et au fait qu’il y a eu un commencement des opérations avant la complétude du dossier (7%) ».

En ce qui concerne l’échelle de la gouvernance des compétences « eau » et « assainissement », « la gouvernance locale doit, à mon sens, répondre à un équilibre et une pertinence hydrologique, qui doit l’emporter sur tout autre considération », a-t-il relevé, avant d’ajouter que « nous avons mis en place un accompagnement le plus personnalisé possible des élus ». En revanche, « l’intérêt d’intégrer davantage les usagers dans la gouvernance me pose question ».

« Nous aidons toutes les collectivités locales quel que soit leur statut juridique »

Préfet de la région Hauts-de-France et président du conseil d’administration de l’Agence de l’eau Artois-Picardie, Bertrand Gaume a abondé dans le même sens. « Les aides de l’Agence ne sont absolument pas conditionnées au transfert des compétences ‘eau’ et ‘assainissement’. Nous aidons toutes les collectivités locales quel que soit leur statut juridique. » Et si « nous encourageons la mutualisation pour répondre aux enjeux qualitatifs et quantitatifs qui sont devant nous, nous le faisons de manière pragmatique ».

« Il y a un décalage entre ce que vous nous dites et ce qui remonte du terrain », a conclu le président de la délégation sénatoriale, Bernard Delcros, à l’issue de l’audition. Et « il faut réussir à clarifier » la politique des Agences de l’eau sur ce point parce que « cela génère beaucoup d’incompréhension et d’inquiétude sur le terrain ».