Une source d’inspiration ?
Béthune-Bruay, du choc Bridgestone à la réindustrialisation !
Cinq ans après la fermeture brutale de l’usine Bridgestone, le territoire de Béthune-Bruay incarne une renaissance industrielle unique qui entend être le moteur de la réindustrialisation nationale ! Décryptage.

Le 16 septembre 2020, l’annonce tombe comme un couperet : Bridgestone ferme son usine de Béthune. En un instant, 823 salariés se retrouvent sans emploi et des centaines de sous-traitants vacillent. Ouverte en 1961, l’usine était plus qu’un site de production, elle incarnait un pan entier de l’identité locale.
Une plateforme dédiée à l’économie circulaire
Immédiatement les élus locaux, les organisations syndicales et les salariés se mobilisent pour obtenir un plan de sauvegarde de l’emploi à la hauteur du traumatisme. Signé en janvier 2021, il offre aux anciens salariés de Bridgestone des indemnités à la hauteur de leur espérance et surtout l’objectif de reclassement est tenu puisque 98 % d’entre eux ont retrouvé une solution professionnelle (dont 452 en CDI, 92 en CDD longs et 115 en création d’entreprise). Un combat mené dans un climat de dignité et de responsabilité, sans aucun conflit violent, aucune machine détruite, aucun pneu brûlé. « La capacité à revitaliser le territoire est liée à la méthode : tous unis » rappelle Olivier Gacquerre, président de l’agglomération de Béthune-Bruay, Artois-Lys Romane. « Politiques, syndicalistes, techniciens de l’Etat et de la Région, acteurs économiques… on a su transformer une épreuve en une dynamique collective ».

Au-delà de l’urgence sociale, le défi majeur était de redonner vie aux 32 hectares laissés à l’abandon. Dès 2021, l’agglomération, en partenariat avec l’Etat et le groupe Log’s, lance ainsi un projet de reconversion de l’usine de production de pneus en une plateforme dédiée à l’économie circulaire autour de divers acteurs économiques. « Il fallait permettre la transformation de l’usine monoactivité en plateforme industrielle, en favorisant et en facilitant l’implantation d’activités dans le domaine de l’économie circulaire » poursuit l’élu.

60 entreprises accompagnées et 1 000 emplois créés
Véritable « site totem » pour reprendre les mots de la CABBALR, la plateforme industrielle de Béthune accueille aujourd’hui des entreprises innovantes et écoresponsables. A commencer par Black-Star, qui a repris 46 000 m2 pour le reconditionnement de pneus avec la marque Léonard, promettant 90 emplois à termes ; Ennea Group qui reconditionne du matériel professionnel avec à la clé la création d’une cinquantaine de postes ; BringBack, entité spécialisée dans le recyclage des batteries au plomb avec une dizaine d’emplois ; et enfin Mecaware qui y développe une technologie de recyclage des batteries lithium-ion, avec une centaine d’emplois prévus. L’avenir de l’ancienne usine Bridgestone est également tournée vers le numérique puisque la société Azur Datacenter y lancera prochainement le déploiement d’un gigantesque site de 26 000 m2 dédié à l’intelligence artificielle pour un investissement de 1,5 milliard d’euros. Au total, près de 10 millions d’euros ont déjà été injectés par le groupe Log’s dans la requalification du site, sur les 24 millions d’euros prévus, et 60 entreprises ont été accompagnées depuis trois ans grâce au plan de revitalisation de l’agglomération permettant la création de près de 1 000 emplois pour près de 5 millions d’euros d’aides directes.
Au-delà de Béthune, l’avenir du territoire se construit également autour de la vallée de l’électrique et de l’implantation en 2023 d’ACC, première gigafactory européenne de batteries à Billy-Berclau (1 300 emplois à l’horizon 2025 et 2 000 en 2030 annoncés). « La gigafactory, c’est la locomotive. Maintenant, à nous de créer tout l’écosystème autour » explique Steve Bossart, vice-président de l’agglomération en charge du développement économique. Et celui-ci prend forme avec notamment avec le CRITT M2A qui développe des essais et homologations de batteries, le laboratoire LSEE de l’Université d’Artois qui forme les ingénieurs de demain ou encore avec Mov’N Tec qui a lancé la production du Galibot, un quadricycle électrique léger, vitrine d’une filière locale intégrée et en circuit court.
Un dynamisme propice à la croissance
Le dynamisme du territoire de Béthune-Bruay attire désormais de nouvelles entreprises et renforce celles déjà implantées. Avosdim (fabricant d’équipements de la fenêtre) a doublé son chiffre d’affaires entre 2021 et 2023, Euradif (fabricant de portes d’entrée) et Proferm (fabricant de menuiserie) recrutent massivement… tous témoignent de l’attractivité retrouvée du territoire. Et Olivier Gacquerre d’affirmer : « Nous allons pouvoir participer au redressement de la France et notamment à sa souveraineté industrielle nécessaire aujourd’hui ». Et si l’histoire locale, du charbon aux batteries électriques, devenait une source d’inspiration nationale ?
