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La Fed ne touche pas à ses taux d'intérêt contre l'avis de deux de ses membres, et de Trump

La banque centrale des Etats-Unis (Fed) a sans surprise laissé ses taux d'intérêt inchangés mercredi, pour la cinquième fois de suite, une décision marquée par la rare opposition de deux...

La banque centrale des Etats-Unis (Fed) a sans surprise laissé ses taux d'intérêt inchangés mercredi, pour la cinquième fois de suite, une décision marquée par la rare opposition de deux de ses gouverneurs qui souhaitaient une baisse.

En conférence de presse, le président de la Réserve fédérale (Fed) Jerome Powell a estimé que l'institution pouvait encore se permettre d'attendre d'en savoir plus sur la trajectoire de l'économie américaine avant de bouger ses taux. 

Il reste, a-t-il souligné, "beaucoup, beaucoup d'incertitudes à lever" concernant les répercussions de la volée de nouveaux droits de douane imposés sur les produits entrant aux Etats-Unis par le gouvernement Trump.

Les taux directeurs de la Fed — qui guident le coût du crédit et ont un fort impact sur les marchés — demeurent donc au niveau qui est le leur depuis décembre, entre 4,25% et 4,50%.

Les investisseurs avaient largement anticipé ce statu quo, mais les propos de M. Powell leur ont donné à penser que ce scénario risquait de se répéter lors de la prochaine réunion de l'institution, en septembre. 

A Wall Street, après une session globalement dans le vert, les indices se sont retournés et ont terminé en baisse, à l'exception du Nasdaq.

Bonne réunion

Sur douze membres du comité de politique monétaire (FOMC) de la Fed, deux ont voté contre le maintien des taux. Une telle opposition ne s'était pas vue depuis plus de 30 ans.

Michelle Bowman et Christopher Waller plaidaient pour une baisse d'un quart de point, selon le communiqué de la Fed.

Ces deux gouverneurs avaient été propulsés à leur poste pendant le premier passage de Donald Trump à la Maison Blanche. 

Mme Bowman a récemment été nommée, à l'initiative du chef de l'Etat, vice-présidente de la Fed chargée de la supervision du système bancaire. M. Waller est vu comme un possible successeur de M. Powell, continûment critiqué par le président Trump.

Le gouverneur Waller avait publiquement fait savoir qu'il souhaitait une baisse de taux, de crainte que le marché du travail américain ne se dégrade trop fortement. Sa collègue avait également dit qu'elle penchait dans ce sens.

Interrogé sur ces dissensions, M. Powell a déclaré que chacun des membres du FOMC avait exprimé son avis "avec beaucoup de soin", au cours d'une "bonne réunion", et qu'il n'était "pas étonnant" d'avoir des points de vue divergents au regard du contexte.

Les analystes ont relevé qu'il fallait remonter à 1993 pour voir deux gouverneurs (et pas simplement des membres du FOMC ayant le droit de vote) s'opposer à une décision au cours d'une même réunion.

Son indépendance en jeu

La Fed s'attend à ce que les nouveaux droits de douane, dont les contours changent quasiment au quotidien, se traduisent par une croissance économique ralentie, avec plus d'inflation et davantage de chômage.

"Nous voyons le tout début des effets (des surtaxes) sur le prix des biens", qui pourraient être "plus ou moins" élevés mais ne seront pas nuls, a dit M. Powell.

Quelques heures plus tôt, Donald Trump avait une nouvelle fois affirmé qu'il n'y avait "pas d'inflation" et exhorté M. Powell à baisser les taux.

Il met depuis des semaines en scène son impatience grandissante. Il traite d'"abruti" le président de la Fed — qu'il avait lui-même nommé à ce poste pendant son premier mandat —, appelle les autres banquiers centraux à le renverser, fait régulièrement mine de vouloir l'éjecter, et s'est même fendu la semaine dernière d'une visite surprise du chantier de rénovation du siège de l'institution à Washington, qu'il juge trop coûteux.

"C'était un honneur de le recevoir", a affirmé M. Powell mercredi.

Il a une nouvelle fois défendu l'indépendance de l'institution au nom de l'"intérêt général", pour éviter que des responsables politiques "agissent sur les taux à des fins électorales par exemple".

Selon Bill Adams, analyste pour la banque texane Comerica, "les pressions politiques ne vont probablement pas influer sur les décisions de la Fed avant la fin du mandat de Powell".

"Il est admiré des deux côtés de l'échiquier politique au Congrès. Il est respecté à Wall Street. À 72 ans, il n'a pas à se soucier de son prochain emploi" mais pense plutôt à l'image d'indépendance qu'il laissera dans l'histoire, estime-t-il.

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