Investissements étrangers : les Hauts-de-France confirment leur attractivité

Malgré un léger recul du nombre projets d’investissements directs étrangers enregistrés l’an dernier, la région consolide sa place dans le Top 3 des régions hexagonales les plus attractives, selon le cabinet EY. Bien que fragilisé par la conjoncture, le secteur industriel soutient fortement les créations d’emploi induites par ces développements.

Mathieu Jaud de la Jousselinière, associé chez EY, responsable du bureau Nord de France.
Mathieu Jaud de la Jousselinière, associé chez EY, responsable du bureau Nord de France.

Les Hauts-de-France plient, mais ne rompent pas. Pendant que la France, en pleine période de trouble politique, voyait le nombre de projets d’investissements directs étrangers (IDE) annoncés plonger de 14% (voir encadré) l’an dernier, la région a quant à elle limité la casse. 

D’après le Baromètre EY de l’Attractivité 2025 publié le 15 mai, 101 projets d’IDE y ont ainsi été enregistrés en 2024, après 110 un an auparavant (-8% sur un an). Principalement portés par des acteurs belges (16%), allemands (15%), américains (12%) et britanniques (11%), ces nouveaux IDE sont censés créer 4 524 emplois… soit le total le plus faible depuis 2020. La chute s’établit à 26% par rapport à 2023, un exercice cependant exceptionnel marqué par l’officialisation de plusieurs projets d'envergure, dont l’implantation à Dunkerque de la première usine de fabrication de batteries pour véhicules électriques en Europe de la société taïwanaise ProLogium, avec 3 000 emplois directs à la clé.

Seule région française du Top 10 européen

Malgré ce bilan en demi-teinte, les Hauts-de-France n’en parviennent pas moins à tirer leur épingle du jeu vis-à-vis des autres régions. De fait, ils se classent au troisième rang sur la base du nombre de projets d’IDE, derrière l’Ile-de-France (258) et Auvergne-Rhône-Alpes (146), et au deuxième rang en termes d’emplois créés derrière la région francilienne (6 672). Une performance rendue possible par le poids prépondérant de l’industrie. Entre le renforcement des capacités de production de l’usine nordiste de Toyoya (600 CDI d’ici 2026), le déploiement d’une nouvelle unité de production de pommes de terre par le groupe belge Agristo (105 emplois) ou encore l’implantation du belge JGI Hydrometal sur le Grand Port Maritime de Dunkerque (120 emplois à terme), ce secteur concentre près de 2 200 créations de postes, soit environ 20% du total français. Ce chiffre fait également des Hauts-de-France la seule française à s’installer dans le Top 10 européen des principales régionales d’accueil d’IDE industriels en nombre d’emplois créés. De bon augure pour le tissu local. «Les projets industriels sont les plus impactants pour l’économie régionale, dans la mesure où ils se traduisent en règle générale par le développement de toute une chaîne de sous-traitance de PME à proximité», retient Mathieu Jaud de la Jousselinière, associé chez EY, responsable du bureau Nord de France. Selon l’Insee, un emploi industriel permet en effet de créer 1,5 emploi indirect et 3 emplois induits dans le reste de l’économie.

Parallèlement, d’autres secteurs ont aussi soutenu la dynamique, à l’image du transport et de la logistique (500 nouveaux postes chez Amazon, constitution par le Danois Maersk d’une plateforme de logistique à Denain…), des services aux entreprises et aux professionnels (l’entreprise britannique Octopus Energy a annoncé le recrutement de 300 collaborateurs à Lille et 70 à Amiens pour son centre de formation dédié à l’installation de panneaux solaires…) et de l’énergie (10 projets pour 526 postes, en progression de respectivement 100% et 167% sur un an).

Le Cambrésis en vedette

Bien que les Hauts-de-France soient relativement peu exposés au marché américain, et donc à la guerre commerciale déclenchée par Donald Trump, les difficultés actuellement rencontrées, notamment, par les entreprises industrielles – ArcelorMittal vient d’annoncer prévoir la suppression de 636 postes dans le Nord, Eramet a suspendu son projet de construction d’une usine de recyclage de batteries électriques dans le Dunkerquois… – devraient peser sur le volume de décisions d’investissements étrangers qui seront actées tout au long de 2025. «Pour autant, nous ne sommes pas trop pessimistes», tempère Yannick Cabrol, directeur chez EY, citant par exemple le projet de mega-data center à Cambrais (e-Valley) porté par le fond d’investissement canadien Brookfield, avec un millier de créations d’emplois à la clé.

Un bilan national contrasté

Conséquence directe de l’instabilité politique qui s’est de nouveau invitée dans le pays à la suite de la dissolution surprise de l’Assemblée nationale en juin 2024, la France a quelque peu perdu de son attractivité aux yeux des investisseurs étrangers. «Sous l’effet de cette incertitude politico-fiscale qui s’est alors instillée, les décisions d’investissement qui ont pu être décalées, voire annulées, l’ont été», observe Mathieu Jaud de la Jousselinière, responsable du bureau Nord de France d’EY. L’an dernier, 1 025 projets d’IDE ont ainsi été recensés à l’échelle nationale, soit 14% de moins qu’en 2023. Le recul est encore plus marqué en ce qui concerne les créations d’emploi générées par ces derniers : 29 000 postes, un total en diminution de 27% sur un an.

En dépit de ces baisses, l’Hexagone confirme néanmoins son rôle de locomotive en Europe. Pour le sixième exercice d’affilée, il occupe en effet la première place du classement en nombre de dossiers, devançant nettement le Royaume-Uni (853 projets) et l’Allemagne (608). En termes d’emplois créés, en revanche, la France se positionne au pied du podium, derrière le Royaume-Uni (38 196) et l’Espagne (34 603). «Parmi les points positifs, il convient d’insister sur le fait que les niveaux atteints en 2024 dépassent ceux de la période pré-pandémique», insiste Mathieu Jaud de la Jousselinière.