Association des maires et présidents d’intercommunalités 54
Ludres : Olivier Torrès, «les maires sont des entrepreneurs de situation»
À l’occasion de son assemblée générale, ce 3 octobre à l’Espace Chaudeau à Ludres, l’Association des maires et présidents d’intercommunalités de Meurthe-et-Moselle a invité Olivier Torrès, professeur à l’Université de Montpellier et président de l’association Amarok s’intéressant à la santé mentale des travailleurs non-salariés.

L’an
passé vous avez fait paraître une étude (avec votre confrère
Mathieu Le Moal de l’Université de Montpellier en partenariat avec
l’Associations des maires ruraux de France) sur la santé mentale
des maires en décryptant les événements positifs et négatifs
auxquels ils sont confrontés dans leur exercice quotidien. Quels en
sont les principaux résultats ?
30%
des maires éprouvent une présence d’épuisement dans leur
fonction. Malgré ce que l’on peut aujourd’hui penser, du fait de
l’actualité tournant autour du malaise des maires, 3,48% des
maires sont en risque d’épuisement sévère. Cela représente tout
de même près de 1 200 maires qui sont aujourd’hui au bout du
rouleau.
Quels
sont les principaux facteurs de stress pour les maires ?
En
première position arrive la complexité et les lourdeurs
administratives. Les maires doivent gérer des domaines variés
(urbanisme, éducation, sécurité...), qui impliquent des démarches
administratives spécifiques, des demandes de subventions, des appels
d’offres. Cette multiplication de tâches peut rapidement devenir
accablante. C’est pour cette raison que le deuxième principal
facteur de stress est la charge de travail de la fonction et le
manque de temps. Un maire consacre près de 62 heures par semaine à
sa fonction, c’est plus qu’un entrepreneur. Cette surcharge peut
conduire à l’épuisement professionnel et à une baisse de
motivation. En troisième position, vous avez les difficultés liées
aux subventions. Leur gestion s’affiche comme un stress majeur.
C’est souvent une source de frustration et d’incertitude. Les
difficultés liées aux subventions, qu’il s’agisse de perte, de
délai ou de refus, peuvent sérieusement entraver le développement
de projets municipaux et affecter le moral des élus locaux. Et
paradoxalement, il est à noter que les agressions des maires qui
sont médiatisées n’apparaissent qu’en 6e position du
«stressomètre» que nous avons établi à l’occasion de cette
étude.
À
côté de ce «stressomètre», votre étude dresse un
«satisfactomètre», quels en sont les principaux enseignements ?
Il
ressort que plus de 69% des maires affichent une satisfaction
générale ! Ce qui est paradoxal avec la perception générale que
l’on peut avoir sur la satisfaction des maires. On pourrait
s’attendre à une insatisfaction plus marquée vu les débats
publics autour des maires. Les données révèlent une satisfaction
relativement élevée. Cette disparité entre la perception commune
et la réalité mesurée montre que, malgré les difficultés, une
majorité d’élus se sentent satisfaits de leur situation actuelle.
Ce qui rend le plus heureux les maires, c’est la concrétisation
d’un projet.
Pourquoi
vous êtes-vous intéressé à cette population d’élus locaux,
votre travail est surtout centré sur les entrepreneurs ?
Quand
vous regardez l’étendue du champ d’intervention et les parties
prenantes face auxquelles les maires doivent faire face, vous
constatez que les maires sont de véritables entrepreneurs de
situation. À
bien des égards, et notamment dans les petites communes, vu leur
niveau d’implication, je pense que les maires sont les plus grands
serviteurs de la République.
Quels
sont les suites données à cette étude ?
Les
deux outils que nous avons établis, le «stressomètre» et le
«satisfactomètre», vont permettre de bâtir Amarok e-santé
Maires, un dispositif de prévention contre le burnout des maires
avec une cellule d’écoute intégrée.