Municipales à Marseille: Il faut sauver le centre-ville
À 83 ans, Geneviève Colonna d'Istria arpente une dernière fois les allées des Galeries Lafayette de Marseille. "Les beaux magasins ferment", déplore-t-elle. A quelques mois des municipales, le départ de cette enseigne emblématique a imposé...

À 83 ans, Geneviève Colonna d'Istria arpente une dernière fois les allées des Galeries Lafayette de Marseille. "Les beaux magasins ferment", déplore-t-elle. A quelques mois des municipales, le départ de cette enseigne emblématique a imposé l'avenir du centre-ville dans la campagne électorale.
Signe de morosité, les Galeries, vitrine commerciale au coeur de ville, tirent leur révérence avec la fermeture le 30 novembre des deux magasins situés au "Centre Bourse", près du Vieux-Port, et au "Prado Shopping", près du stade Vélodrome.
"Pertes récurrentes depuis plusieurs années", s'est justifié le groupe, qui déserte la deuxième ville de France comme d'autres enseignes avant lui, après près d'un demi-siècle de présence et en supprimant 145 emplois.
La municipalité de gauche se veut néanmoins rassurante. "Le grand centre-ville" n'a rien perdu de son attractivité avec "20% de taux de vacance" des baux commerciaux, chiffre qui tombe à "11,7%" dans l'hyper centre autour du Vieux-Port, selon l'adjointe au maire en charge du commerce Rebecca Bernardi. Elle reconnaît toutefois qu'il est "fragilisé par différents facteurs".
La construction de deux centres commerciaux dans le quartier métamorphosé de la Joliette sur le périmètre du centre "est entrée en concurrence directe avec les commerçants du centre-ville". La vente en ligne et la piétonnisation de certaines artères, réduisant le stationnement, ont complété la baisse de fréquentation.
"On a le même problème dans toutes les villes qui ont un taux de vacance qui est en train de se développer", souligne le président de la chambre de commerce Aix-Marseille-Provence Jean-Luc Chauvin.
"Les centres-villes doivent fonctionner autrement, diversifier leur offre au lieu de proposer les mêmes marques qu'ailleurs où c'est plus facile d'accès", analyse l'entrepreneur qui rappelle aussi que "la vraie question tourne autour du pouvoir d'achat".
Sur la célèbre Canebière, de nombreux artisans ont mis la clé sous la porte, remplacés par des magasins bon marché s'adaptant au pouvoir d'achat local.
Contrairement à Paris ou Lyon, la pauvreté se concentre en effet dans le centre de Marseille avec un taux supérieur à 38%, contre 25% sur l'ensemble de la ville, d'après les chiffres de l'Insee.
Projets "hors sol
Depuis 2020, la nouvelle majorité municipale gauche-société civile a préempté une vingtaine de baux commerciaux pour "empêcher certaines activités et relancer le commerce de proximité", explique Mme Bernardi. Mais "la compétence directe au commerce" et à "l'urbanisme commercial" reviennent respectivement à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et à la métropole d'Aix-Marseille, dirigées par la droite, pointe l'élue.
Avec le départ des Galeries Lafayette du Centre Bourse, l'avenir de l'imposante galerie marchande construite en 1977 entre le Vieux-Port et la gare Saint-Charles est devenu un enjeu des prochaines municipales.
La candidate de la droite et du centre Martine Vassal impute l'"abandon" du centre-ville à l'insécurité.
"Les tergiversations sur la vidéo-protection ont fini par aboutir à prolifération des points de deal, des agressions et la transformation de certaines rues en salles de shoot sauvages", dénonce son porte-parole Romain Simmarano. Ses équipes ont lancé une consultation en ligne pour décider de l'avenir du Centre Bourse avec notamment comme proposition l'ouverture d'une école de cuisine, une maison de l'enfant ou encore un parc urbain.
Pour Franck Allisio, député RN des Bouches-du-Rhône et candidat à la mairie de Marseille, "le préalable absolu dans le centre-ville est la sécurité et la propreté". "Vous ferez revenir des familles, des gens qui y habiteront et ouvriront des magasins et donc ramèneront de la richesse".
Le maire sortant Benoît Payan (ex-PS) a annoncé sur BFM TV avoir "travaillé" avec le président Emmanuel Macron sur un "très grand équipement (...) probablement culturel". Si le projet échoue, il promet d"acheter les Galeries Lafayette" et "d'en faire un lieu où on remet de la vie".
Toutes ces propositions à la veille d'une échéance électorale sont "hors sol", tance Emmanuel Patris, urbaniste et co-président de l'association Un Centre-ville Pour Tous, fustigeant l'absence de concertation avec les habitants. "Il y une façon de travailler très institutionnelle entre élus et techniciens et on va aboutir à quelque chose qui ne correspond ni aux besoins, ni aux attentes".
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