Economie circulaire
Orne Recyclage, solution environnementale locale
Sur le site où régnait autrefois l’un des fleurons sidérurgiques lorrains, l’aciérie de Gandrange, le recycleur familial de métaux Orne Recyclage développe un modèle à taille résolument humaine. Sur ce principe : il n’y a pas de transition écologique possible sans matière recyclée locale.

C’était le 31 août 2023. Les ultimes restes de l’aciérie de Gandrange fermée depuis 2009 étaient mis à terre. L’usine sidérurgique, l’une des plus importantes de Lorraine, qui compta jusqu’à 8 000 salariés, s’effaça du quotidien de la vallée de l’Orne. La déconstruction de ce monstre d’acier avait débuté en 2015. Quand on revient sur ce site emblématique, c’est d’abord cette impression d’être happé par un silence pesant. Tout au bout de ce grand vide se situe l’entreprise Orne Recyclage. Le ballet cadencé des engins de chantier offre un contraste saisissant. Cyrille Poquet, qui assure la gestion opérationnelle, cite une autre page d’histoire, celle, familiale : «Je suis la seconde génération de ferrailleurs. Mon père Bruno a débuté avec une camionnette. Je baigne dans cette atmosphère depuis enfant.» Un paternel qui se fera, à la tête de Recyclage Belleville et Lexy Recyclage, une réputation de sérieux et de crédibilité dans ce métier ardu, précis et souvent mal connu. En 2021, il rachète une entité dont on trouve la genèse en 1965, Orne Matériaux, dirigée par Jean Oswald. «Mon père l’a livré durant tant d’années, dans ce paysage de hauts fourneaux», note Cyrille Poquet, qui en parallèle aura fait son expérience dans cet univers ferreux. Dans la foulée naissait l’entreprise Orne Recyclage. Forte d’une vingtaine de collaborateurs sur site et sous-traitants, elle valorise annuellement quelque 30 000 tonnes de déchets, dont deux tiers de ferrailles. Son process englobe la démolition industrielle, le démontage de ligne de production, l’analyse d’alliages métalliques.
«Rester compétitifs»
Les nouvelles réglementations européennes et françaises encouragent le recyclage des métaux : loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC), taxe sur l’extraction minière, subventions pour le recyclage industriel. De fait, le coût du recyclage devient plus attractif que l’achat de matières premières neuves, ce qui encourage industriels et particuliers à recycler davantage. Les années à venir devraient voir une augmentation de la part des métaux recyclés dans l’industrie, notamment dans l’automobile, le bâtiment, l’électronique et les batteries. Ce sont là des opportunités réelles pour les professionnels du recyclage. Cyrille Poquet le rappelle : «Nous restons avant tout une PME familiale, se situant entre les gros acteurs du marché et les plus petits. Nous sommes guidés par les valeurs de la parole donnée, d’une gestion de bon père de famille, autant sur le plan financier que pour les ressources humaines.» Son collaborateur Florent Dias ajoute : «Toute notre équipe est impliquée dans un projet partagé. Une vision globale. Cet état d’esprit va avec nos compétences et notre stratégie.» Cyrille Poquet poursuit : «On est dans une logique économique et écologique. Autrefois, la problématique du recyclage était presque anecdotique pour les entreprises. Aujourd’hui, dans un contexte économique compliqué, c’est devenu pour elles un vrai poste budgétaire.» En France, 90 % de l’acier et de l’aluminium sont recyclés, limitant l’extraction de matières premières, 45 % du cuivre utilisé provient du recyclage. Les métaux comme le zinc, le nickel demeurent encore sous-exploités dans le recyclage. Des chiffres qui montrent que celui-ci devient un levier clé pour l’économie circulaire, réduisant notre dépendance aux importations et favorisant un modèle plus durable. «Orne Recyclage est une solution 100 % locale. Du circuit court : nous travaillons dans un rayon de 50 km autour de notre site», affirment Cyrille Poquet et Florent Dias qui ont choisi une progression mesurée et raisonnée. «Les conséquences des frais de douane de Trump sont une inquiétude. Il faut d’abord tenir le cap. Il ne faut pas oublier que chaque tonne de métal réutilisée, ce sont des tonnes de CO² évitées», assure Cyrille Poquet. Orne Recyclage trace sa route, mariant proximité et traçabilité. Dans une Lorraine restant de cœur d’acier, sa réussite trouve tout son sens.
«Nous ne sommes pas que ferrailleurs, nous faisons du métal un moteur de la décarbonation.»