Près de Saint-Tropez, Harley-Davidson dans le doute mais ses fans à la fête

Dans le golfe de Saint-Tropez (Var), des milliers de fans de Harley-Davidson sont venus faire pétarader les moteurs ce week-end et communier au mythe, malgré un contexte économique...

Un motard arrive en Harley-Davidson au festival Harley-Davidson Euro 2025 près de Grimaud, le 9 mai 2025 dans le Var © Frederic DIDES
Un motard arrive en Harley-Davidson au festival Harley-Davidson Euro 2025 près de Grimaud, le 9 mai 2025 dans le Var © Frederic DIDES

Dans le golfe de Saint-Tropez (Var), des milliers de fans de Harley-Davidson sont venus faire pétarader les moteurs ce week-end et communier au mythe, malgré un contexte économique et politique incertain pour la marque.

C'est le plus grand rassemblement du genre en Europe, avec les "Harley Days" organisés un an sur deux à Morzine (Haute-Savoie). Sur la route, c'est un défilé continu de mécaniques rutilantes et vrombissantes, souvent savamment décorées, immatriculées en France mais aussi en Italie, au Royaume-Uni, en Allemagne, en Grèce...

Sur le site, entre musique rock et odeurs de barbecue, les inconditionnels déambulent parmi les stands qui proposent vêtements et accessoires, mais aussi des essais de nouveaux modèles, des offres de financement et d'assurance, des "road trips" aux Etats-Unis, un spectacle de cascades...

Bienvenue au royaume des blousons de cuir noirs frappés des multiples insignes des "chapters" (les clubs locaux), des grosses chevalières, des têtes de morts... et pour beaucoup, des barbes poivre et sel.

Les jeunes et les femmes restent en effet minoritaires, malgré les efforts de la marque pour élargir et renouveler une clientèle qui s'étiole. 

De plus de 228.000 motos vendues en 2018, l'année de la dernière édition de l'Eurofestival à Port-Grimaud, elle est passée à 151.200 l'an dernier, dont les deux-tiers aux Etats-Unis et environ 15% en Europe. 

Et l'heure n'est pas au rebond: le chiffre d'affaires a encore baissé de 23% au premier trimestre 2025.

Harley a même annulé la semaine dernière ses prévisions annuelles pour cette année, prévenant que la hausse des taxes douanières aux Etats-Unis et les possibles représailles ciblées, qui avaient déjà touché la marque en 2018, risquaient de faire augmenter les prix.

On n'est pas des Japonais

Certes, le contexte politique n'aide pas. Aux Etats-Unis, Donald Trump avait appelé au boycott de Harley-Davidson quand le fabricant avait annoncé en 2018 délocaliser une partie de sa production en Thaïlande. 

Et à l'étranger, l'actuel locataire de la Maison Blanche a brouillé le mythe américain.

Mais Harley-Davidson est devenu son propre univers, assure Karen Davidson, petite-fille de l'un des co-fondateurs: "N'importe où dans le monde, nous partageons cet amour de la route et d'une certaine manière de vivre, le sentiment de liberté". Et chacun a ses propres icônes Harley, comme Johnny Hallyday pour les Français.

Avant tout, "rouler en Harley, c'est du plaisir", insiste Jean-Louis Fournier, 72 ans, qui a ouvert une concession dans l'Essonne désormais gérée par son fils. 

"Les gens ici, ils ont fait des kilomètres et des kilomètres pour venir en groupe. Rouler, c'est le but. Et rouler doucement. On n'est pas des Japonais", dit-il en référence aux amateurs de gros cubes nippons. "On va pas sur l'autoroute à 150, 160. On profite".

En fait, "c'est la crise économique qui nous bloque", explique-t-il. "Les gens, ils ont envie (...) mais le portefeuille est vide. On a beaucoup de clients qui sont artisans, commerçants, qui ont été les premiers à tomber". 

Et à 15.000 euros la moto d'entrée de gamme, sans compter les accessoires, il faut être passionné. Comme Valentin Buchard, chauffeur de 33 ans et sa compagne Mireille Follonier, logisticienne de 35 ans, convertis il y a cinq ans.

Pour lui, la marque s'est fourvoyée quand elle a sorti un modèle électrique -- "tout ce qui est bobo-écolo-gauchiste, ça me passe à 400.000 km au-dessus" --, et elle souffre aussi des dérives de bandes comme les Hell's Angels.

Mais les "bikers" savent aussi jouer de leur image de mauvais garçons. 

Ainsi, Valentin Bouchard fait partie du club des Templiers, engagés auprès des enfants victimes de harcèlement: "Quand un gamin arrive à l'école accompagné de 50 motos, après tout le monde le laisse tranquille".

Alors "ça va remonter, ça a toujours remonté", assure-t-il.

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