Vœux 2026 : les chambres consulaires de Seine-Maritime en proie au doute
Le 16 décembre à Rouen, les chambres consulaires de Seine-Maritime ont présenté leurs vœux pour 2026. Le manque de visibilité nourrit les inquiétudes et émousse le volontarisme.
On prend les mêmes et on recommence… Mardi 16 décembre, les chambres consulaires de Seine-Maritime ont présenté leurs vœux pour 2026. Et tout juste un an - au jour près - après la cérémonie précédente, les choses n'ont pas vraiment changé. Au grand dam de tous. «Le sentiment de stagnation et d'incertitude prolongées demeure», s'est inquiété Olivier Rousseille, le président de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) Rouen Normandie. Si les gouvernements ont valsé ces douze derniers mois, rien n'est plus clair quant au devenir de l'économie nationale. Et les tensions géopolitiques n'amènent pas plus de clarté sur la scène internationale.
Les conséquences, c'est que, selon le baromètre des affaires édité par la CCI Normandie, moins d'un chef d'entreprise sur deux se disait confiant à l'aube du second semestre 2025. Et 29 % se disaient stoppés dans leurs projets par le manque de visibilité. Ce dernier ralentit aussi directement le commerce. Car même si l'inflation est en recul, les prix restent élevés et les consommateurs prudents, avec un niveau d'épargne historiquement haut. «40 % des commerces se disent directement fragilisés par la baisse de fréquentation», a assuré Olivier Rousseille.
Concurrence déloyale et marchés mondiaux
Mêmes causes mêmes effets : l'artisanat, lui aussi, souffre. «38 % des artisans déclarent une baisse de chiffre d'affaires au premier semestre 2025. Et 82 % n'ont pas investi sur cette période», s'inquiète Guillaume Dartois, président de la Chambre des métiers et de l'artisanat de Seine-Maritime (CMA 76). Seuls les secteurs de l'optique et de l'automobile arrivent à se maintenir. Les autres secteurs plongent, parfois confrontés à «une forme de concurrence déloyale (échappant en partie au poids de la fiscalité, ndlr) de plus en plus forte de désinhibée», s'emporte le président de la CMA 76. Pour lui, «l'économie de proximité n'est pas un concept. C'est le fondement de la vie des territoires et du lien social.»
En crise perpétuelle ou presque, le monde agricole ne déroge pas à ce sentiment d'inquiétude, voire d'impuissance. Même si, comme l'a rappelé Laurence Sellos, la présidente de la Chambre départementale d'agriculture, la Seine-Maritime bénéficie d'atouts agro-climatiques majeurs, les exploitations agricoles sont fragilisées par l'instabilité politique et la volatilité des marchés. «Pour la première fois, la balance commerciale agroalimentaire française va être déficitaire. Il y a urgence à agir, pour défendre notre souveraineté alimentaire. N'importons pas l'agriculture dont nous ne voulons pas dans nos assiettes !» a clamé Laurence Sellos.
Le volontarisme émoussé
Fin 2024, Eric Villeneuve, directeur régional de la Banque de France, illustrait l'économie régionale par cette métaphore : «Le moral flanche, mais le physique tient». Force est de constater que le physique faiblit à son tour. Le bien sombre tableau tracé par les élus consulaires se confirme dans les chiffres. «Le nombre de procédures collectives au tribunal de commerce de Rouen a progressé de 50 % en 2025, par rapport à 2024», s'inquiète le président de la CCI Rouen Normandie.
Pourtant, face à cela, les chefs d'entreprise tentent de tenir bon, et leurs représentants consulaires maintiennent leur position volontariste. Émoussée par un an d'inertie, cette position repose notamment sur les grands projets industriels et logistiques nourris par le territoire. Les entrepreneurs comptent aussi sur les élus. Une lettre ouverte sera d'ailleurs distribuée dans les prochains jours à l'ensemble des candidats aux élections municipales de Seine-Maritime. «Les chambres consulaires ne peuvent agir seules, a rappelé Olivier Rousseille. C'est à l'échelle du territoire que se construisent les réponses les plus concrètes.»
Quelques-uns des candidats déclarés à la mairie de Rouen ont entendu cette demande. Jean-Benoît Albertini, préfet de Seine-Maritime aussi. Reconnaissant aisément «un contexte peu propice à formuler des vœux», il a assuré les élus consulaires de son soutien et rappelé sa confiance en l'action publique. «Je me place lucidement du côté du volontarisme et de l'action», a-t-il insisté. Ce qui serait plus aisé avec le retour d'un peu de stabilité politique…