Une proposition de loi veut créer la première génération sans tabac
Créer la première génération sans tabac : le député écologiste Nicolas Thierry a annoncé mardi le dépôt d'une proposition de loi transpartisane visant à interdire la vente de tabac à toute personne née après 2014, une mesure...
Créer la première génération sans tabac : le député écologiste Nicolas Thierry a annoncé mardi le dépôt d'une proposition de loi transpartisane visant à interdire la vente de tabac à toute personne née après 2014, une mesure soutenue par des associations de patients et anti-tabac.
"L'objectif est très clair : stopper l'entrée des jeunes dans le tabagisme en cessant de leur offrir l'accès au produit", explique à l'AFP le député de la 2e circonscription de Gironde, qui veut "enrayer définitivement l'épidémie de tabagisme", grâce à une "interdiction générationnelle et progressive".
En clair, à compter du 1er janvier 2032, il serait interdit de vendre du tabac à toute personne née après le 1er janvier 2014, même majeure, une mesure saluée notamment par la Ligue contre le cancer et l'Alliance contre le tabac (ACT).
L'interdiction s'appliquerait à tous les produits du tabac dont le tabac chauffé, "nouveau cheval de bataille des cigarettiers", se réjouit l'ACT.
"Face à l'ingéniosité de l'industrie du tabac, qui essaye d'en minimiser le danger, seules des mesures drastiques permettront de protéger les générations futures", plaide Philippe Bergerot, président de la Ligue contre le cancer.
En France, le tabac demeure la première cause de mortalité évitable : il tue 75.000 personnes par an avec un "coût social" global (morts, maladies, pertes de production, dépenses de prévention, répression et soins, pour l'Etat) estimé à 156 milliards d'euros par l'Observatoire français des drogues et toxicomanies.
Après une baisse entre 2014 et 2019, les dernières données disponibles "tendent à montrer une récente stabilisation" de la prévalence du tabagisme "depuis 2020", décrit l'exposé des motifs.
Le tabagisme a recommencé à reculer depuis, selon la dernière enquête de Santé publique France: une personne âgée de 18 à 75 ans sur quatre fumait du tabac en 2024, contre près d'une personne sur trois en 2021, ont montré les premiers résultats de son baromètre mi-octobre.
Si "les politiques anti-tabac fonctionnent plutôt bien: espaces sans tabac, paquet neutre, augmentation des prix (...) s'imaginer que le combat est gagné est illusoire", pointe le député.
Fléau sanitaire
Cette proposition de loi répond aussi à l'objectif de parvenir à la première génération sans tabac d'ici 2032, c'est-à-dire atteindre moins de 5% de prévalence de tabagisme à l'âge adulte pour les générations nées à partir de 2014.
"Plusieurs fois, les pouvoirs publics ont énoncé un tel objectif – la ministre de la Santé en 2014 ou le président de la République en 2021 – et l'horizon 2032 figure désormais dans le dernier Programme national de lutte contre le tabac (2023-2027)", rappelle le texte.
Ce plan anti-tabac français s'inscrit dans l'objectif fixé par l'Union européenne d'atteindre une génération sans tabac avec moins de 5% de la population de l'UE consommant des produits du tabac d'ici à 2040.
Pour l'heure, cette proposition de loi transpartisane est soutenue par une vingtaine de députés de sept groupes différents allant de LFI à Horizons, explique Nicolas Thierry.
Le député espère également que le gouvernement soutiendra sa proposition, qui pourrait être inscrite à l'ordre du jour lors du prochain créneau où l'Assemblée débattra de projets de loi transpartisans.
Sollicité par l'AFP, le cabinet de la ministre de la Santé Stéphanie Rist indique que cette proposition de loi "témoigne d’une volonté partagée : protéger les jeunes et réduire durablement le tabagisme".
Estimant que l'objectif de ramener la prévalence du tabagisme à 20% d'ici 2027 est "déjà atteint", il ajoute que "toute nouvelle mesure devra s'inscrire dans le cadre légal et européen".
"Au regard de l'ampleur du marché parallèle et de sa croissance ininterrompue, on se dirige surtout vers une génération sans tabac acheté chez le buraliste", a réagi Serdar Kaya, président de la Confédération des buralistes, auprès de l'AFP.
Selon l'étude Tabac échappant à la Fiscalité nationale (TAFE) publiée en octobre, 17,7% des produits de tabac échappent en moyenne au réseau des buralistes.
Pour M. Thierry, la progressivité de la mesure fera "décroître la demande très lentement, sans effet de bascule".
"Il faut aussi assumer qu'il n'est de toute façon pas acceptable de faire perdurer un modèle économique uniquement basé sur un fléau sanitaire", dit-il, pointant aussi un impact écologique et social, la culture du tabac contribuant au plan mondial, à "environ 5% de la déforestation mondiale" tandis que plus de 1,3 million d'enfants travaillent encore dans les champs de tabac.
Une initiative similaire a été lancée au Royaume-Uni, où l'interdiction totale et définitive de la vente de cigarettes aux personnes nées après 2009 est en discussion au Parlement.
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