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Démissionnaire malgré lui, l'élu de Moselle a obtenu gain de cause

Il avait "démissionné" contre son gré: un élu d'un village de Moselle victime d'une fausse lettre de démission pourra réintégrer le conseil municipal, a tranché lundi le tribunal administratif de Strasbourg.

"Un conseiller municipal qui dément être l'auteur d'une démission dispose du droit de contester la décision du maire qui en a pris acte", a estimé le juge des référés, précisant que la démission d'un élu n'est effective qu'à la condition "qu'elle émane librement et sans équivoque de l'élu concerné". 

Le juge a donc ordonné la suspension de l'exécution de la décision par laquelle la maire avait pris acte de cette démission.

Julien Ruaro, un ingénieur de 39 ans, s'était présenté en 2020 aux élections municipales sur l'unique liste en lice de Coin-lès-Cuvry, un village de 800 habitants situé à une dizaine de kilomètres de Metz.

Il y devient la principale voix d'opposition au conseil municipal et dénonce en 2021 aux gendarmes des faits de prise illégale d'intérêts présumée visant le premier adjoint, notaire de profession, autour d'un projet immobilier.

Quand la maire, Anne-Marie Linden-Guesdon, reçoit en janvier 2024 une lettre au nom de Julien Ruaro l'informant de sa démission, elle en prend acte sans vérifier son authenticité.

C'est le début d'une longue bataille administrative pour cet ingénieur à l'Agence de la transition écologique (Ademe) qui dénonce une usurpation d'identité.

À l'audience le 13 mai, M. Ruaro a assuré seul sa défense. "J'ai un mandat bénévole, je ne peux pas en plus me permettre de payer un avocat", a-t-il confié à l'AFP. 

Démission irrévocable

M. Ruaro a timidement demandé sa réintégration au conseil municipal de son village où il vit depuis 2015, s'appuyant sur une expertise graphologique qui démontre que la lettre de démission a été falsifiée. 

Dans les résultats de l'analyse, consultés par l'AFP, l'expert graphologue a conclu que les mentions manuscrites, notamment sur le bordereau d'envoi de la lettre recommandée, "sont à attribuer à la main d'un tiers non identifié".

L'avocat de la défense, Jean Erkel, qui dénonce un dossier aux "dimensions ubuesques", a pour sa part estimé que le rapport d'expertise est "ambigu". Il a relevé une "concordance" de la missive avec d'anciens écrits qui prouvent selon lui qu'il s'agit bien du même auteur. 

Julien Ruaro avait déposé plainte pour faire reconnaître une usurpation d'identité et envoyé en mairie une attestation sur l'honneur en ce sens, sans effet. "Une fois qu'une démission passe entre les mains du maire, elle est irrévocable", expliquait en 2024 l'édile, Anne-Marie Linden-Guesdon. 

Un argument qui ne tient pas pour M. Ruaro. "Ça voudrait dire qu'on pourrait envoyer des lettres de démission pour n'importe qui", a-t-il lâché.

"Les fins de non-recevoir ne peuvent qu'être écartées", a confirmé le juge des référés dans son ordonnance.

Lanceur d'alerte?

L'Association nationale des élus locaux d'opposition (AELO), a soutenu la requête de M. Ruaro et apporté des arguments en sa faveur auprès du tribunal. 

"M. Ruaro a été victime d'un complot visant à l'exclure du conseil municipal de la commune", écrivait l'AELO dans la note transmise au juge.

La maire, absente à l'audience, "est actuellement sous antidépresseurs", a fait valoir son avocat, qui a dénoncé des interpellations "chaque semaine, presque chaque jour en mairie, parfois de manière extrêmement virulente". Il a ajouté que si M. Ruaro était réintégré, "tous les élus démissionneraient tant ils sont excédés" par son comportement. 

"On me fait passer pour quelqu'un qui traumatise la mairie, c'est de la psychiatrisation des opposants, caractéristique des régimes autoritaires", a déploré Julien Ruaro. 

Il demande aujourd'hui à être reconnu en tant que "lanceur d'alerte". Un statut qui lui apporterait notamment un appui financier pour les démarches juridiques qu'il a engagées ces derniers mois.