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Au procès de Cédric Jubillar, l'ancien procureur sous le feu des questions de la défense

Le procureur de la République de Toulouse au moment de la disparition de Delphine Jubillar a témoigné lundi devant la cour d'assises du Tarn, une convocation selon lui "inédite et anachronique", demandée par la défense arguant que le magistrat a...

Le procureur de la République Dominique Alzeari donne une conférence de presse à Toulouse après la mise en examen de Cédric Jubillar, le 18 juin 2021 © VALENTINE CHAPUIS
Le procureur de la République Dominique Alzeari donne une conférence de presse à Toulouse après la mise en examen de Cédric Jubillar, le 18 juin 2021 © VALENTINE CHAPUIS

Le procureur de la République de Toulouse au moment de la disparition de Delphine Jubillar a témoigné lundi devant la cour d'assises du Tarn, une convocation selon lui "inédite et anachronique", demandée par la défense arguant que le magistrat a "crucifié" son client accusé du meurtre de son épouse.

Après la diffusion à l'audience de sa conférence de presse du 18 juin 2021, au cours de laquelle il annonçait la mise en examen de Cédric Jubillar, le magistrat Dominique Alzéari s'est interrogé sur le sens de sa convocation comme témoin. 

Il a souligné avoir seulement "détaillé un certain nombre d'éléments objectivés, vérifiables, avérés" lors de son point presse, survenu six mois après la disparition de l'infirmière, dont le corps n'a pas été retrouvé.

"Il s'agissait d'indices, je n'ai jamais parlé de preuves, ni de charges", a-t-il insisté.

"Vous avez pris des précautions oratoires", a admis l'avocat de la défense Alexandre Martin. Mais "vous avez porté des appréciations sur le bien-fondé des charges" contre Cédric Jubillar, dont "vous qualifiez les déclarations d'évolutives et mensongères" et "le témoignage de l'enfant de +crédible+", a-t-il dénoncé en référence au jeune fils Jubillar qui avait parlé d'une dispute du couple, la nuit de la disparition.

Péché originel

"Je considère que vous êtes le péché originel de ce dossier (...) à partir de votre intervention, il a fallu qu'on rétablisse un bon nombre de vérités", a encore asséné Me Martin. 

Derrière lui, adossé à son siège, Cédric Jubillar assiste impassible aux échanges, vêtu d'une veste zippée noire.

"Avez-vous conscience que vous énoncez des éléments faux ?", a demandé au magistrat l'autre conseil de l'accusé, Emmanuelle Franck. Et d'énumérer des horaires d'appels téléphoniques, la connaissance par l'accusé de l'existence d'un amant, la présence d'une couette dans la machine à laver, le fait que le couple faisait chambre à part, le nombre de pas effectués par l'accusé...

"Ce sont les éléments dont je disposais", "parce que c'étaient des éléments qui avaient été portés à ma connaissance", répond Dominique Alzéari, reconnaissant d'"éventuelles approximations".

Depuis l'ouverture des investigations sur la disparition de l'infirmière de 33 ans dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020, alors qu'un couvre-feu avait mis le pays au ralenti, les avocats de l'accusé dénoncent une enquête et une instruction "à charge" et une atteinte à la présomption d'innocence.

Pour Me Franck, "cette conférence de presse est le point de départ de la divulgation de choses complètement fausses".

"J'ai l'impression que nous perdons notre temps", a estimé pour sa part l'avocat général Pierre Aurignac au sujet de la convocation du magistrat, rappelant le devoir de communication d'un procureur alors que M. Jubillar venait d'être mis en examen et écroué, à l'issue de 48 heures de garde à vue.

Coup d'esbrouffe

"C'est un coup d'esbrouffe qui a fait pschitt. Il y a des éléments forts dans ce dossier qui conduiront à la condamnation de Jubillar", a ensuite analysé, en marge de l'audience, Me Philippe Pressecq, avocat d'une cousine de Delphine.

La citation comme témoin d'un procureur de la République est "assez rare", a souligné auprès de l'AFP une source proche du dossier, qui a fait état "d'une conférence de presse mal maîtrisée".

La première semaine du procès a été déjà marquée par l'interrogatoire musclé par la défense du directeur d'enquête, le major de gendarmerie Bernard Lorvellec, qui avait conclu sa déposition en estimant que "tous les éléments recueillis ramènent" vers M. Jubillar.

Cédric Jubillar, 38 ans, a démenti à deux reprises avoir tué celle qui était sa compagne depuis leurs 18 ans et qui lui avait annoncé sa volonté de divorcer.

Au début de la deuxième semaine de ce procès, l'engouement du public reste vif. Une femme venue de Saint-Etienne a indiqué être arrivée vers 03H00 du matin devant la cour d'assises du Tarn à Albi, pour s'assurer une place dans la salle d'audience.

Condamnation ou acquittement, les trois magistrats et six jurés se prononceront le 17 octobre, au terme de quatre semaines d'audiences.

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