Santé au travail
Ce que révèle la hausse de l’absentéisme chez les jeunes actifs
L’année 2024 est marquée par une hausse significative de l’absentéisme pour maladie chez les 18-30 ans. Les arrêts sont généralement plus courts, mais de plus en plus liés à des raisons psychologiques, traduisant un besoin d’équilibre et de reconnaissance, avec le souci de préserver sa santé mentale, plutôt qu’un désengagement au travail de la jeune génération.

Depuis plusieurs années déjà le baromètre Absentéisme du groupe mutualiste Malakoff Humanis révèle que les 18-30 ans se font prescrire davantage d’arrêts maladie que la moyenne des salariés. L’édition 2025 de ce baromètre* met en avant une augmentation plus rapide de ce phénomène. Loin d’indiquer un désengagement, ce constat reflète des aspirations profondes chez les jeunes travailleurs. Il met en lumière un besoin fort d’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, pour préserver leur santé mentale, ainsi qu’un désir de reconnaissance, de missions porteuses de sens. Malgré ces arrêts maladie plus fréquents, les jeunes montrent un attachement profond au travail.
Mal être psychologique
Près de la moitié des jeunes travailleurs (49%) ont obtenu au moins un arrêt maladie en 2024, soit 7 points de plus que la moyenne des salariés. Depuis 2019, l’absentéisme pour maladie chez cette tranche d’âge a augmenté de trois points, alors qu’il reste stable pour l’ensemble des employés, à 42%. Si les jeunes sont plus fréquemment absents, ils reviennent plus rapidement au bureau : 39% des arrêts maladie des moins de 30 ans sont de courte durée (de un à trois jours, vs 30 % pour l’ensemble des salariés), tandis que ceux de plus d’un mois ne représentent que 8% des cas.
La maladie « ordinaire » demeure la cause principale des arrêts, totalisant 44% des motifs pour les jeunes, contre 40% pour l’ensemble des salariés. Les troubles psychologiques, qui ont pris de l’ampleur après la période du Covid-19, suivent en seconde raison. Situation préoccupante, le nombre de jeunes concernés par ces troubles augmentent nettement pour justifier 22% des arrêts maladie (+6 points par rapport à 2019). Autre constat, les jeunes sont plus enclins à solliciter un arrêt : 27% l’ont demandé à leur médecin (+ 11 points depuis 2019). Parmi eux, 26% ont indiqué un état psychologique ne leur permettant pas de travailler.
Le « choc » de l’entrée dans la vie active
Le début de carrière professionnelle peut s’avérer éprouvant pour de nombreux jeunes, analyse l’étude. Plusieurs facteurs contribuent à cette difficulté. Le stress au travail est particulièrement prégnant, touchant 66% des moins de 30 ans, contre 54% pour l’ensemble des salariés. Plus d’un jeune sur deux se juge en situation d’épuisement professionnel (+7 points par rapport à 2020).
Paradoxalement, si le télétravail est une source d’isolement pour 23% des jeunes, un chiffre nettement supérieur à celui des salariés plus âgés (16%), il reste très apprécié et essentiel pour eux (37% y ont recours, contre 23% en 2020). Enfin, le monde du travail implique des attentes élevées : l’exigence professionnelle est la principale raison évoquée (37%) pour les arrêts maladie liés à des troubles psychologiques.
En quête de sens et de reconnaissance
Pour autant, et contrairement aux idées souvent reçues, les moins de 30 ans conservent un attachement profond à leur emploi et se montrent globalement satisfaits de leurs conditions de travail. Ils affichent un haut niveau de satisfaction concernant leur environnement professionnel : 79% soulignent une très bonne ambiance (vs 75% pour l’ensemble des salariés) et 57% se sentent reconnus pour leurs efforts (contre 54%). Leur engagement se manifeste également par une volonté d’amélioration continue : 81% cherchent à optimiser leur façon de travailler, preuve d’un désir de progression et d’investissement sur le long terme.
Pour réduire l’absentéisme, les jeunes actifs suggèrent plusieurs pistes aux entreprises : une diminution ou réorganisation de leur charge de travail (29%, contre 23% pour l’ensemble des salariés), une meilleure reconnaissance (24%), des horaires plus flexibles (20%) et un meilleur suivi médical (20%).
Du côté des dirigeants d’entreprise, plus de la moitié d’entre eux (54%) considèrent l’absentéisme comme une préoccupation majeure. Et, ils sont de plus en plus nombreux à anticiper une hausse continue de ce phénomène (41% en 2025, contre 30% en 2020).« Face à ce constat, repenser le management intergénérationnel, le rapport au travail, l’accompagnement des salariés et les politiques de prévention devient une priorité stratégique », suggère le baromètre.
*Etude réalisée par Ifop pour Malakoff Humanis auprès d’un échantillon représentatif de 400 dirigeants d’entreprise et 3 000 salariés du secteur privé, du 6 au 30 janvier 2025.
AÏcha BAGHDAD et B.L