Deuxième jour de mobilisation agricole contre des importations jugées "déloyales"
De Versailles jusqu'en Occitanie, des agriculteurs ont mené vendredi des actions pour protester contre les importations ne répondant pas aux mêmes normes qu'en Europe, une deuxième journée de mobilisations "symboliques"...

De Versailles jusqu'en Occitanie, des agriculteurs ont mené vendredi des actions pour protester contre les importations ne répondant pas aux mêmes normes qu'en Europe, une deuxième journée de mobilisations "symboliques" à l'appel de l'alliance FNSEA-Jeunes agriculteurs.
"Aidez-nous au lieu de nous tuer", ont plaidé de jeunes agriculteurs de Béziers (Hérault), tandis que près de Toulouse résonnait un avertissement tracé sur un ruban de plastique noir tendu sur des bottes de foin: "Macron = rigolo. On t'avait prévenu, on va revenir". A Grenoble, c'était bière, tracts et chaudron de saucisses devant la préfecture.
Vendredi dès l'aube, une quinzaine de tracteurs devant le château de Versailles ont donné le coup d'envoi de la journée, destinée à dénoncer en particulier l'accord de libre-échange entre l'UE et des pays latino-américains du Mercosur.
"Le sens de cette mobilisation, c'est évidemment attirer l'attention du chef de l’État", a déclaré le président de la FNSEA Arnaud Rousseau, présent sur la place d'Armes devant le château.
Tour du monde
"On a sur le plan international de nombreuses questions qui se posent quand des produits viennent envahir nos marchés et ne respectent pas nos normes de production", a poursuivi M. Rousseau. "Le chef de l’État doit réagir. Le Premier ministre doit nous recevoir urgemment."
"La révolte paysanne reprend à Versailles", pouvait-on lire sur une immense banderole déployée sur des tracteurs.
A 56 ans, dont quarante passés à travailler dans une exploitation agricole, le secrétaire général de la FDSEA de Seine-et-Marne, Pascal Verriele, a le sentiment "de toucher le fond", sans aucune "visibilité".
"Il y a le Mercosur, les dispositifs accordés à l'Ukraine de quotas d'importation sans droits de douane. Tout cela déstabilise nos exploitations", déplore cet agriculteur en grandes cultures.
Ici comme ailleurs en France, l'ambiance était bon enfant mais la fatigue souvent marquée sur les visages, alors que les récoltes ne sont pas terminées.
L'appel de la première force syndicale agricole survient alors que Bruxelles a lancé le 3 septembre le processus de ratification du texte Mercosur, à l'égard duquel la France, jusque-là très opposée, semble depuis se montrer moins défavorable.
A l'entrée du parking d'un magasin Métro au Mans, une banderole proclamait "Mercosur de la merde à coup sûr", tandis qu'à Valenciennes, des agriculteurs ont mené une "opération de contrôle" des origines des produits dans un magasin de la même enseigne.
"Thaïlande, Bulgarie, Turquie, Ukraine, Kazakhstan… on fait le tour du monde ici!", lance Alain Dupont, exploitant à Thiant, en empilant dans un chariot des denrées importées.
Avertissement
Dans un magasin Promocash de Mont-de-Marsan (Landes), Julie Meurisse, agricultrice et adhérente FNSEA, cible "les produits qui ne respectent pas un minimum d'affichage sur l'origine ".
Près de Béziers, des agriculteurs ont déversé une remorque de moût de raisin devant le bâtiment des Douanes. "Ce n'est qu'un avertissement, la prochaine fois, ça sera plus sévère", prévient le viticulteur et secrétaire général de la FDSEA de l'Hérault, Cédric Saur.
"On continue à rester motivés, on reviendra s'il y a besoin cet hiver, à un moment où dans nos champs, ce sera plus facile", a mis en garde Arnaud Rousseau.
Cette mobilisation diffère de fait des grandes journées de blocage des hivers 2024 et 2025. A Angers, un "banquet de la honte" n'a réuni qu'une vingtaine d'agriculteurs. Au congrès des maires ruraux qui se tient près de Poitiers, les agriculteurs se sont contentés de distribuer des tracts.
Jeudi, dix actions "symboliques" ont réuni environ 700 agriculteurs, selon la police. Vendredi après-midi, les autorités avaient recensé 69 actions mobilisant près de 2.000 agriculteurs et 310 engins agricoles.
L'accord signé fin 2024 entre le Mercosur et la Commission européenne doit permettre à l'UE d'exporter davantage de voitures, machines, vins… Mais il facilitera aussi l'entrée de bœuf, volaille, sucre, miel... via des droits de douane réduits.
Ces secteurs dénoncent une concurrence déloyale du fait de normes de production moins-disantes sur le plan sanitaire et environnemental et de contrôles défaillants. A ce rejet s'ajoute la colère liée au relèvement à 15% des droits de douane américains imposé depuis août à l'UE, en particulier aux vins et spiritueux.
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