Le cinéma à l'affiche
Acteur génial, cinéaste monstre, cinématographies d'Asie et l’art de l’affiche sont au programme de la sélection de livres consacrés au 7e art en cette fin d'année riche en publications.
Michel Piccoli

Comédien hors normes et protéiforme à l’impressionnante filmographie, Michel Piccoli (1925-2020) a traversé six décennies durant le cinéma européen en tournant avec les plus grands cinéastes. Infatigable interprète et esprit aventureux, Michel Piccoli a oscillé avec maestria entre les grands maîtres et les auteurs de la Nouvelle Vague – d'Alfred Hitchcock à Jean-Luc Godard, en passant par Agnès Varda, Luis Buñuel, Jacques Demy, Marco Ferreri, Claude Sautet ou Manoel de Oliveira –, sans oublier la génération des années 1980 tel Leos Carax. Sa trajectoire artistique épouse ainsi les audaces et les bouleversements du cinéma moderne, mais aussi l’avant-garde du théâtre, sa première passion. Son amour du jeu l’a conduit à partager l'affiche avec Brigitte Bardot, Jane Fonda, Catherine Deneuve, Romy Schneider, Bulle Ogier ou encore Marcello Mastroianni et Gérard Depardieu. Cet ouvrage passionnant, réalisé avec la complicité de sa femme Ludivine Piccoli, dévoile un acteur aussi virtuose dans l’intériorité que dans l’exubérance. Sans oublier les précieux et touchants témoignages de certaines de ses partenaires sur scène ou à l’écran, telles Emmanuelle Béart, Juliette Binoche ou Dominique Blanc.
Michel Piccoli. Le génie du jeu d'Olivier Père (Editions de la Martinière).
Orson Welles

Personnage monstre aussi expansif qu’énigmatique, acteur grandiose, réalisateur incomparable, producteur et scénariste, mais également metteur en scène de théâtre, dessinateur ou écrivain, cet artiste total a signé quelques-uns des plus grands films américains des années 1940 et 1950 – Citizen Kane, La Splendeur des Amberson, La Dame de Shanghai, La Soif du mal... –, en butte aux exigences d’Hollywood et surmontant les difficultés à financer ses projets. Cet ouvrage indispensable regroupe ses différents entretiens avec Peter Bogdanovich – qui a rencontré et interviewé nombre de grands cinéastes d’Hollywood, tels John Ford ou Howard Hawks –, où Orson Welles évoque sans langue de bois son travail à la radio, au théâtre, au cinéma et à la télévision, ses projets inachevés, ses rapports avec les producteurs, les réalisateurs mais aussi le jeu d’acteur, la magie, la littérature ou la bande dessinée…
Moi, Orson Welles. Entretiens avec Peter Bogdanovich (Editions Capricci).
Splendeurs et merveilles du cinéma japonais

Focalisé sur la période 1935-1975 durant laquelle le cinéma japonais fut l’une des cinématographies mondiales majeures, cet ouvrage est réédité dans une nouvelle version revue et augmentée de 12 nouvelles notices, deux nouveaux cahiers de photographies et du classement des 100 meilleurs films japonais par la revue Kinema Junpo. Soit un dictionnaire accessible à tous, curieux comme cinéphiles, relatant le parcours de 113 cinéastes parmi les plus importants de ces quatre décennies – de Yasujiro Ozu à Nagisa Oshima en passant par Mikio Naruse, Kenji Mizoguchi ou Akira Kurosawa –et leurs œuvres maîtresses. Un livre captivant qui accompagne le lecteur dans sa découverte du cinéma japonais, à travers analyses et anecdotes. Parmi ces dernières, on apprend ainsi qu’Akira Kurosawa ignorait que son film Rashômon avait été présenté au festival de Venise, où il venait pourtant de remporter le Lion d’or. Ou que son acteur fétiche, la star Toshirô Mifune, fut le réalisateur d’un seul film tandis que Kon Ichikawa fit appel à Michel Legrand pour composer la musique d’une de ses superproductions.
Dictionnaire du cinéma japonais en 113 cinéastes. L’Âge d’Or 1935-1975. Sous la direction de Pascal-Alex Vincent. Préface de Kiyoshi Kurosawa (Editions Carlotta Films).
A la découverte du cinéma philippin

Cet ouvrage imposant explore les multiples facettes du cinéma indépendant des Philippines, cinématographie méconnue mais qui sécrète régulièrement des cinéastes et des films passionnants. Fruit de décennies de recherches, le livre de Nick Deocampo dévoile sa vision d’un art de combat, à la fois poétique et politique, authentique et libre, lucide et intime, dégagé des artifices de l’industrie dominante comme des fourches caudines de toute censure d’État. Cinéaste emblématique majeur de cet archipel cinématographique, Lino Brocka réalisa en 1976 Insiang, le premier film philippin à être sélectionné au Festival de Cannes. Véritable plongée dans les bas-fonds de Manille, ce mélodrame familial est un formidable réquisitoire contre la situation désastreuse des bidonvilles philippins et la misère sociale qu’elle engendre. Autre chef-d’œuvre de Lino Brocka, Bona (1980) éblouit par sa représentation des réalités sociales et des désillusions de la célébrité. Actrice superstar des Philippines, Nora Aunor irradie l’écran en petite sœur d’Adèle H., aveuglée par un amour sans retour. Deux films d’une filmographie sidérante par laquelle Lino Brocka exercera une influence notable sur la nouvelle génération de cinéastes philippins, menée par Brillante Mendoza.
Une traversée du cinéma philippin : entre répression et subversion de Nick Deocampo (Editions Carlotta Films).
L’Affiche de cinéma française

Signé Claude Monier, collectionneur averti, cet ouvrage retrace l’histoire de l’affiche de cinéma française. Construit sous la forme d’un abécédaire composé de 71 entrées, le livre peut être consulté comme un dictionnaire, ou lu comme un récit continu, traversant les époques, les styles et les mutations du métier d’affichiste, dont certains deviendront des signatures à part entière. Soit une superbe mise en lumière du travail créatif des artistes, studios, imprimeurs et distributeurs à travers plus de 200 affiches en couleur, souvent reproduites en pleine page, qui accompagnent le texte et forment un véritable récit visuel en parallèle, permettant au lecteur de saisir ce qui se joue derrière chaque affiche : un travail d’interprétation, de synthèse, de suggestion, entre commande commerciale et geste artistique. Soit un bel hommage à un art longtemps sous-estimé et à une profession restée dans l’ombre, soulignant le rôle déterminant de l'affiche dans la construction de l’imaginaire cinématographique français.
L’Affiche de cinéma française – des origines à nos jours de Claude Monier (Les Éditions de Grenelle).