Patrons de PME : une rentrée de ras-le-bol général
Les crises se cumulent et pèsent sur le moral des dirigeants, met en garde Amir Reza-Tofighi, président de la CPME. Il attend du prochain gouvernement qu'il soit pro-business. Et préconise un grand débat sur le financement du modèle social en vue de 2027.

Attention au point de non-retour. Le 9 septembre à Paris, Amir Reza-Tofighi, président de la CPME, Confédération des petites et moyennes entreprises, s'exprimait sur les principaux enjeux de la rentrée, à l'invitation de l'AJPME, Association des journalistes spécialisés dans les PME. Pour l'instant, sur le plan strictement économique, les indicateurs ne sont pas dramatiques. Les faillites se situent sur un plateau haut, mais « il n'y a pas de dérapage. En revanche, les signaux faibles sont mauvais », prévient Amir Reza-Tofighi évoquant le moral des entrepreneurs, leurs souhaits d'investir, de recruter ou de se lancer dans de nouveaux marchés. Pour lui, les patrons sont proches du « passage de ‘je fais’ à ‘je ne fais pas’’». Il n'en faut pas beaucoup » pour y arriver, estime-t-il.
De fait, les crises s'accumulent. A commencer par la chute du gouvernement de François Bayrou, qui inquiète. « Ce sont des entreprises qui ne vont pas investir ou qui ne vont pas faire leur budget pour 2026 avec des projets d'investissement. Et donc c'est de l'emploi en moins, des entreprises qui vont être en situation difficile parce leurs carnets de commandes ne se remplissent pas.(...) Le danger est là », détaille Amir Reza-Tofighi. Autre difficulté inhérente à l'instabilité politique, l'immobilisme législatif. Par exemple, le projet de loi simplification de la vie économique, très attendu de la CPME, attend d'être d'examiné en Commission mixte paritaire, depuis juin dernier : « cela fait deux ans que le texte tourne dans tous les sens », regrette le président de la CPME. A propos du mouvement de contestation « Bloquons tout » qui devait se tenir le lendemain de son intervention, Amir Reza-Tofighi, se déclarait aussi soucieux des impacts potentiels de ce type d'événement sur les commerces et les entreprises. Autre sujet d'inquiétude, les nouveaux droits de douane américains entrés en vigueur durant l'été. Si certains secteurs d'activité- cosmétique, spiritueux- sont déjà impactés, globalement, « cela passe encore. Ce qui m'exaspère, c'est la faiblesse de l'Europe(..) Elle est incapable de protéger notre économie », commente Amir Reza Tofighi.
Fiscaliser les contributions sociales ?
Qu'attendre du successeur de François Bayrou (qui n'avait pas encore été nommé lors de l'échange), sur fond de débats budgétaires où les propositions du Parti Socialiste rebutent les milieux entrepreneuriaux ? « Nous ne pouvons pas nous permettre le luxe d'attendre 18 mois avant d'agir dans ce contexte international difficile, et alors qu'économiquement, les entreprises ont du mal », prévient Amir Reza-Tofighi. Il en appelle à éviter les « débats budgétaires qui sont aujourd'hui impossibles » et à élaborer « un programme ou des compromis qui soient autour de l'entreprise ». La simplification, par exemple, pourrait faire l'objet d'un consensus. Les demandes sont à minima. « Nous sommes conscients que nous n'allons pas avoir de réforme structurelle » avant les élections présidentielles de 2027, poursuit Amir Reza Tofighi.
En revanche, il prône pour cette échéance la tenue d'un « grand débat national nécessaire » sur le financement du modèle social français. Mis sur pied à la Libération, celui-ci a organisé un financement basé sur le travail. « Cela fonctionnait dans une économie fermée.(...) Aujourd'hui, nous sommes dans un monde ouvert où les consommateurs consomment des produits d'entreprises étrangères qui ne payent pas de taxes, et le nombre d'actifs est plus faible », analyse Amir Reza-Tofighi. Pour la CPME, ce changement de paradigme impose une modification radicale du modèle de financement qui passerait par une fiscalisation de certaines contributions sociales (la santé). Le travail continuerait de financer retraites et chômage. « Il ne s'agit pas d'une augmentation des impôts. C'est un transfert de prélèvements obligatoires », précise Amir Reza-Tofighi qui évoque un « cocktail de TVA et impôts » à inventer...
Une manifestation de patrons ?
Le 13 septembre, Patrick Martin président du Medef, a déclaré dans Le Parisien, qu'une «
grande mobilisation patronale » « au-delà du Medef » sera organisée, si l'Etat décide d'augmenter les impôts sur les entreprises.