"Plongée froide dans le milieu ultraviolent du narcotrafic", au procès d'un lieutenant de la DZ Mafia

Après quatre jours de "plongée froide dans le milieu ultraviolent du narcotrafic marseillais et de ses dérives meurtrières", l'avocate générale a requis 28 ans de réclusion criminelle jeudi contre Mahdi Zerdoum, alias "la brute", considéré comme...

Des policiers patrouillent près d'une inscription "la DZ (mafia)" taguée sur la façade d'un immeuble d'un quartier d'Avignon, dans le sud de la France, le 13 mars 2025 © GABRIEL BOUYS
Des policiers patrouillent près d'une inscription "la DZ (mafia)" taguée sur la façade d'un immeuble d'un quartier d'Avignon, dans le sud de la France, le 13 mars 2025 © GABRIEL BOUYS

Après quatre jours de "plongée froide dans le milieu ultraviolent du narcotrafic marseillais et de ses dérives meurtrières", l'avocate générale a requis 28 ans de réclusion criminelle jeudi contre Mahdi Zerdoum, alias "la brute", considéré comme l'un des principaux lieutenants de la DZ Mafia.

Contre l'accusé, jugé depuis lundi pour une tentative d'assassinat devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, à Aix-en-Provence, la magistrate a demandé que cette peine soit assortie d'une période de sûreté des deux tiers, assurant que ces faits avaient été "froidement pensés, organisés et exécutés".

De façon totalement inattendue, Mahdi Zerdoum a reconnu devant la cour être l'un des deux hommes qui avaient fait irruption dans un appartement de la Paternelle, à l'époque un des plus hauts lieux du trafic de stupéfiants, dans la nuit du 27 au 28 juillet 2021.

Et il a reconnu avoir ordonné à son complice de tirer sur l'occupant des lieux, un Algérien sans papiers qui travaillait pour l'un des quatre réseaux de la Paternelle. 

Silencieux durant toute l'instruction, ce n'est que devant la cour d'assises que Mahdi Zerdoum, 35 ans, a enfin évoqué la découverte dans l'appartement d'une Kalachnikov et d'un pistolet automatique, et sa réaction:

- "Quand on a trouvé les armes, je l'ai insulté. Il s'est levé dans une intention agressive", a expliqué Mahdi Zerdoum.

- "Et vous avez demandé de tirer ?", a questionné le président de la cour d'assises.

 – "Oui, j'ai dit: +tire !+"

La Paternelle était alors en proie à une sanglante escalade de violences entre clans. "Ca tirait tous les jours", a confirmé Mahdi Zerdoum.

Une guerre fratricide

Entendu depuis le centre de rétention administrative de Cornebarieu (Haute-Garonne), le jeune Algérien, criblé de balles mais miraculé, a expliqué avoir immédiatement identifié Mahdi Zerdoum, affirmant avoir travaillé pour celui-ci quand il gérait le point de vente de la cité des Micocouliers.

Selon les enquêteurs, l'accusé avait alors rallié le clan de Mehdi Laribi, unanimement considéré aujourd'hui comme le parrain de la DZ Mafia. Sorti de prison, ce dernier voulait reprendre la gérance des points de vente de plusieurs cités à son ex-allié Karim Harrat.

- C'était "une guerre fratricide", a reconnu Mahdi Zerdoum, évoquant l'existence d'"un contrat sur (sa) tête".

Une même peine de 28 ans de réclusion avec une sûreté des deux tiers a été réclamée contre Fayçal Dhif, le tireur supposé, qui nie avoir accompagné Mahdi Zerdoum ce jour là. 

Si l'enquête a montré que ce jeune homme de 26 ans était le chauffeur de Mahdi Zerdoum lorsqu'ils sont partis d'Aix-en-Provence pour La Paternelle, les deux accusés assurent qu'il était descendu au Parc Kalliste, où Mahdi Zerdoum aurait récupéré une autre personne, "un petit jeune".

Dans sa plaidoirie, Me Amar Bouaou, le conseil de Mahdi Zerdoum, a demandé à la cour "une peine significativement plus basse" que celle requise, insistant sur l'absence de préméditation: "Si on vient avec l'intention de tuer, alors on ouvre la porte, on tire, on ne reste pas trente minutes dans cet appartement".

Evoquant les trois autres dossiers judiciaires en cours concernant son client,dont une tentative d'assassinats liée à la reprise violente d'un point de deal d'Aix-en-Provence par la DZ Mafia, l'avocat a expliqué que désormais Mahdi Zerdoum "attend juste l'addition des peines": "Il ne compte même plus les jours, il n'a pas de perspective", a-t-il conclu.

"Cela fait quatre ans que je suis en maison d'arrêt, dont deux au quartier d'isolement, j'ai quatre mandats de dépôt. Que j'ai ma peine le plus vite possible, je veux passer à autre chose", avait lancé l'accusé mardi à la cour.

Avocat de Fayçal Dhif, Me Bruno Rebstock a lui plaidé l'acquittement, dénonçant "l'approximation vertigineuse" du réquisitoire et estimant que "l'absence de preuves ne peut pas se dissoudre dans une légitime préoccupation de la société".

Le verdict est attendu en fin de journée jeudi.

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