REF 2025 : le Medef, suspendu à l'incertitude politique
La situation économique est inquiétante, mais celle politique l'est plus encore. Lors de la REF, l'université d'été du Medef, les enjeux du projet de loi de Finances pour 2026 et de l'instabilité gouvernementale ont dominé les débats.

Comme un air de déjà vu, mais en plus inquiétant. A l'automne 2024, la REF (Rencontre des entrepreneurs de France), l'université d'été du Medef, s'était tenue dans une France qui attendait depuis trois mois la nomination d'un Premier ministre suite aux élections législatives consécutives à la dissolution de l'Assemblée Nationale (en juin). Cet automne 2025, la France dispose d'un gouvernement et plusieurs de ses représentants se sont rendus à la REF. Mais seront-ils encore là dans huit jours ? Rien n'est moins sûr, François Bayrou, Premier ministre, ayant annoncé qu'il demanderait la confiance au Parlement, le 8 septembre. Et depuis l'an dernier, la situation financière de la France s'est encore dégradée, posant avec une acuité accrue la question de la structuration de son budget.
Sur le terrain, la situation économique est difficile a rappelé Patrick Martin, président du Medef, ouvrant la REF à Roland Garros, le 27 août. « J'entends ici et là que sur la croissance et sur l'emploi, les chiffres seraient rassurants. Certains vont même jusqu'à se glorifier qu'ils ne soient pas pires. Ils ont tort ! », a-t-il déclaré. De fait, les entrepreneurs ne sont que 12% à se déclarer confiants pour l'économie française, soit 5 points de moins qu'en juin, selon le sondage CCI France Opinion Way (août). Et d'après les dernières estimations de la Banque de France ( août) , le PIB devrait croître au troisième trimestre 2025 à un rythme proche de celui du trimestre précédent (+ 0,3 %, d'après l'Insee). Quant aux défaillances d'entreprises, elles ont atteint un chiffre record en 2024 ( près de 68 000 selon le bilan annuel d'Altares, record historique depuis la création du baromètre en 1973) et leur nombre a continué à croître (+ 4,4% sur un an ) au premier trimestre 2025 touchant particulièrement des ETI.
Lors de son allocution, Patrick Martin a rappelé les solutions préconisées par le Medef – une politique de l'offre - pour réaliser 44 milliards d'euros d'économies en 2026. En particulier, il a exclu toute hausse d'impôt, qu'il s'agisse de la mise en place d'une taxe dite Zucman qui s'appliquerait au patrimoine des Français les plus riches, ou du retour de l'ISF, impôt de solidarité sur la fortune, qualifié de « ravageur pour notre économie ».
Des assurances toutes théoriques
Lors de son intervention à Roland Garros, Eric Lombard, ministre de l'Economie, s'est montré en phase avec les attentes du Medef. ll a promis de « protéger les entreprises [car] ce sont elles qui créent les richesses et l’emploi ». Le dispositif prévu par le gouvernement pour réaliser 44 milliards d'euros ne touchera pas « l'outil de production », a-t-il expliqué. Le retour à l'ISF est exclu. A contrario, le pacte Dutreil, mécanisme fiscal qui favorise la transmission des entreprises familiales, qualifié d' « indispensable » sera préservé. C'est aussi le cas du crédit d'impôt recherche. Dans le même sens, « tout ce qui amoindrit le redressement productif détourne notre pays, tout ce qui pousserait au déplacement des investisseurs, nous devons le considérer comme un risque », a déclaré François Bayrou. « Il nous a rassuré quand même à certains égards en répétant,(...) qu'en tout cas, sous sa gouverne, rien ne serait fait qui puisse porter atteinte à la compétitivité et à la croissance », a commenté Patrick Martin devant la presse, en fin de journée du 28 août. Pourtant, les engagements du gouvernement et les pistes dessinées par Eric Lombard pour le budget risquent de devenir caduques après le 8 septembre, fautes de soutiens.
A la REF, une séance de clôture intitulée « La France peut-elle rester dans le jeu » réunissait Manuel Bompard (La France insoumise), Fabien Roussel (Parti communiste), Marine Tondelier (Les Ecologistes), Gabriel Attal (Renaissance), Bruno Retailleau (Les Républicains) et Jordan Bardella (Rassemblement national, RN). « Le socle commun n'était pas là pour défendre François Bayrou, mais pour préparer le terrain de la prochaine élection présidentielle », analyse le quotidien l'Opinion ( 29 et 30 août). Cette première semaine de septembre, l'agenda de François Bayrou sera consacré à des négociations en vue d'obtenir une confiance au Parlement que les observateurs s'accordent à estimer quasi impossible. Que contiendra alors le projet de loi de Finances 2026 ? près des trois quarts des dirigeants estiment ne pas être préparés en cas de hausse des prélèvements (sondage CCI France). Par ailleurs, 69% d'entre eux comptent se tourner davantage vers le marché français face au contexte géopolitique actuel, autre sujet d'inquiétude majeur quelque peu éclipsé par le désordre politique hexagonal.
Les mesures choc du Medef pour relancer la France
Le « Front économique », instance qui réunit économistes et dirigeants d'entreprises, fondé par le Medef, a publié un programme de 35 propositions libérales qui visent une réduction des dépenses publiques de 8 points de PIB ( 233 milliards d'euros). Parmi ces mesures, une diminution drastique du nombre d'agents publics (1,5 million environ).