Loon-Plage : Ryssen Alcools développe son offre de bioéthanol, à partir de déchets

Le distillateur s’est diversifié depuis le mitan des années 1990 dans la fabrication de bioéthanol. Aujourd’hui, l’entreprise pousse la logique environnementale encore plus loin en le fabricant à partir d’alcools issus de déchets alimentaires et de la filière vinicole. Une prouesse technique qui promet une réduction de l’emprunte carbone des moteurs thermiques de 90%.

Ryssen Alcools a intégré le site de Loon-Plage il y a 20 ans.
Ryssen Alcools a intégré le site de Loon-Plage il y a 20 ans.

L’entreprise de distillation Ryssen est née en 1829 à Hesdin, dans le Pas-de-Calais. En 2005, elle a déménagé son outil de production et une grande partie de ses salariés à Loon-Plage, à quelques encablures du port de Dunkerque, «pour des raisons essentiellement logistiques», explique Laurent Lacondemine, son président. «Notre matière première, l’alcool brut, est longtemps venu exclusivement de France. Ce n’est plus du tout le cas désormais. Nous sommes aussi devenus exportateurs, notamment vers les pays d’Afrique. Être basé à côté d’un port transocéanique devenait donc indispensable».

Devenue Ryssen Alcools, l’entreprise est une filiale du premier groupe sucrier européen, l’Allemand Südzucker. Elle emploie aujourd’hui 49 salariés. Son activité est scindée en deux parties qui réalisent chacune 50 % de l’activité. Son activité historique, d’abord, la redistillation d’alcools bruts de canne à sucre et de céréales pour les purifier et les porter à 96 degrés. «Ainsi, ils perdent toute couleur, toute odeur et tout goût et peuvent être utilisés par des industriels alcooliers, le secteur de la parfumerie et les laboratoires pharmaceutiques. Nous exportons 20% de notre production», détaille Laurent Lacondemine, qui dispose d’une capacité de production de 90 000 m3 par an dans son usine.

Une filière de ramassage des déchets à conforter

Depuis le mitan des années 1990, Ryssen Alcools s’est diversifiée dans une nouvelle activité qui, de niche, est en passe de devenir de plus en plus prégnante au gré de la montée des préoccupations environnementales : la fabrication de bioéthanol. «Nous utilisons la même matière première, l’alcool brut, que nous déshydratons pour la porter à 99,7 degrés. Sous cette forme, le bioéthanol peut être mélangée à de l’essence pour produire le sans plomb 98 (5% de bioéthanol), le sans plomb 95 (10% de bioéthanol) ou le E85 (85% de bioéthanol). Il faut savoir que le E85 réduit de 72% l’empreinte carbone par rapport à de l’essence ordinaire», commente le président, dont l’unité de production est taillée pour en produire 120 000 m3 par an, destinées aux pétroliers et à la grande distribution, sur le marché français uniquement.

Désormais, l’entreprise va plus loin encore dans la réduction des émissions de CO2 en fabricant un bioéthanol issu d’alcools - non plus conçus à partir de cannes à sucre ou de céréales mais à partir de déchets alimentaires ou issus de la filière vinicole - : le marc et la lie. Avec un objectif : réduire de 90% les émissions de CO2 pour les moteurs thermiques utilisant du E85. «D’ici 2035, l’Europe veut interdire les moteurs thermiques. Avec l’ensemble de nos confrères distillateurs, l’enjeu est de prouver aux instances européennes qu’avec ce bioéthanol nouvelle génération, nous pouvons rendre les moteurs thermiques aussi vertueux en terme d’émissions de carbone que les moteurs électriques», plaide Laurent Lacondemine. «C’est un vrai combat car, derrière, c’est toute une filière de valorisation des déchets qui se met en place».

Ryssen Alcools espère fédérer autour d’elle assez de confrères pour densifier, conforter et faciliter le ramassage des déchets partout en France. «C’est ce qui freine le développement de cette activité alors même que la demande n’a jamais été aussi importante», conclut le président.