Entreprises
Budget 2026 : le secteur aérien plaide sa cause
Des taxes supplémentaires nuiraient à l'activité du secteur aérien, mais elles auraient aussi des effets délétères sur l'économie, qu'il s'agisse du tourisme ou de l'activité du tissu économique en province, plaident plusieurs représentants du secteur avec la CPME.

Les inquiétudes montent et s'expriment à l'heure où le gouvernement, en quête d'économies, s'efforce de bâtir un budget pour 2026. Le 10 juillet, à Puteaux, plusieurs
représentants du transport aérien et la CPME, Confédération des petites et moyennes entreprises, tenaient une conférence de presse intitulée « Hausse de la fiscalité sur le transport aérien : quelles conséquences pour les territoires et pour le tourisme ».
Dans le budget 2025, la TSBA, taxe de solidarité sur les billets d'avion, avait augmenté (passant, par exemple, de 2,63 euros à 7,40 euros pour les vols intra-européens en classe économique). Et aujourd'hui, « le secteur aérien est dans une période critique », a démarré Amir Reza-Tofighi, président de la CPME. Le transport aérien représente 52 milliards d'euros, soit 1,8% du PIB, d'après une étude Deloitte (2025). La France a enregistré une baisse de son trafic de 4% par rapport à 2019, tandis que des pays comme l’Italie, l’Espagne ou le Portugal voyaient le leur augmenter de 13 à 17%. Pour Amir Reza-Tofighi, ce « décrochage » résulte d'une « politique de décroissance du transport aérien », faite notamment d'un « alourdissement inconsidéré de la fiscalité ». Celle-ci est particulièrement handicapante, confirme Thomas Juin, président de l'Union des aéroports français (UAF), qui évoque un différentiel qui peut atteindre presque cinq fois avec l'Espagne. Les compagnies aériennes sont donc découragées d'exploiter des lignes en France au profit d'autres pays. « Nos vols domestiques sont revenus à un niveau d'il y a 35 ans », confirme Bertrand Godinot, directeur général d'Easy Jet, compagnie low cost, la deuxième en France.
Autre conséquence, les compagnies aériennes ne sont pas stimulées à baser leur activité en France – et donc à y créer de l'emploi. Easy Jet, par exemple, a ouvert des bases à Malaga, Rome et Milan et a fermé celle de Toulouse. « Pour une même liaison, une compagnie basée en France crée quatre fois plus d'emplois qu'une compagnie basée hors de France », note Laurent Timsit, délégué général de la Fnam, Fédération nationale de l'aviation et ses métiers.
Tourisme et affaires
Globalement, « le transport aérien participe à rééquilibrer le centralisme du pays dont le réseau ferroviaire est en étoile, car il permet d'établir des liaisons entre des régions distantes», pointe Thomas Juin. Augmenter ultérieurement les taxes sur le transport aérien aurait donc des conséquences néfastes dans de nombreux domaines, argumentent les intervenants. En particulier, « toute l'économie touristique sera touchée », estime Nicolas Dayot, chargé du tourisme à la CPME et président de la Fédération nationale de l'hôtellerie de plein air . Selon l'étude Deloitte, le transport aérien contribue à hauteur de 23 milliards d’euros aux recettes touristiques, représentant près de 40 % des revenus du tourisme international en France, en 2023. Au delà de l'importance de ces montants, le transport aérien sert plusieurs enjeux stratégiques en matière de tourisme, selon Nicolas Dayot. A commencer par une meilleure répartition des flux touristiques, aujourd'hui beaucoup trop concentrés autour de certaines destinations. « Beaucoup de territoires sont en sous-tourisme. (…) Il faut préserver les aéroports de province », argumente-t-il.
Autre enjeu stratégique : celui du développement du tourisme d'affaires, pour lequel des collectivités auraient un important potentiel, mais qui nécessite l'existence d'un aéroport. Plus généralement, au delà du tourisme, c'est la vie économique entière du pays qui pâtit d'un manque de liaisons aériennes, argumente Amir Reza-Tofighi : « Sans l'avion, il faut plus de huit heures pour relier certaines villes françaises .(…) La disparition des lignes régulières entrave la capacité des entreprises, qu'il s'agisse de PME, d'ETI ou de grands groupes, à rejoindre rapidement clients, partenaires ou sites de production. Cette situation menace non seulement le maintien des centres de décision et des sièges sociaux en région, mais aussi la création de valeur et le dynamisme économique local ». D'après les derniers échos en provenance de Matignon, rapportés par les représentants du secteur aérien, il semble que les dispositions fiscales concernant l'aérien devraient rester stables.