Ch0C : la chaudière à gaz bas-carbone bientôt sur le marché
Développée par un consortium industriel, la chaudière Ch0C associe une combustion performante et la captation de dioxyde de carbone. Le démonstrateur a été présenté le 25 juin à Villers-Saint-Paul.

Associer des technologies de pointe déjà existantes pour franchir un gap. Voilà la recette employée par un solide consortium de 16 acteurs industriels piloté par Naldeo Technologies et Industries, pour penser une chaudière bas-carbone à haute performance. Baptisée Ch0C (pour chaudière zéro carbone), cette nouvelle chaudière au gaz pourrait réduire de plus de 90% les émissions directes de dioxyde de carbone liées à la combustion. Elle a été présentée fin juin sur le site de la plateforme chimique de Villers-Saint-Paul, qui abrite le prototype industriel.
Celui-ci est basé sur le principe de l'oxycombustion. Contrairement à une chaudière classique, le comburant utilisé n'est donc pas l'air ambiant, mais du dioxygène pur. Pourquoi ? En n'utilisant pas l'air on supprime (presque entièrement) l'azote de la combustion. Cela limite le dégagement des fameux NOx (oxydes d'azote), mais cela améliore aussi la performance énergétique de la chaudière, puisque dans une aérocombustion l'azote capte une partie de la chaleur lors de son évacuation.
Maîtriser la combustion et capter le dioxyde de carbone
Ce sont les sociétés Fives et Babcock-Wanson, fondatrices du consortium, qui ont développé le brûleur et le corps de chauffe adaptés à l'oxycombustion. Avec comme principale gageur la nécessité de diminuer la température de la flamme notamment pour réduire encore le dégagement de oxydes d'azote. «C'était un vrai défi technologique, souligne Xavier Nicolas, directeur général de Fives. Nous avons mis en œuvre toute notre expérience et tous nos moyens techniques dans cette innovation».
Cette maîtrise de la température de la flamme est gérée par un pré-mélange, l'étagement de la combustion et la réintégration partielle des fumées d'évacuation dans la chambre de combustion. Ce qui, effet collatéral, a aussi pour mérite de concentrer les fumées en dioxyde de carbone, et donc de faciliter ensuite sa captation. Car c'est là aussi l'intérêt de la chaudière Ch0C : l'associer à un système de captation du dioxyde de carbone, développé par Verdemobil Biogaz, autre membre du consortium. «On vise un biodioxyde de carbone de qualité alimentaire», précise Carole Couhert, responsable développement au sein de l'entreprise. Soit un gaz pur à 99,9%.
Les tests pour différentes modalités d'utilisation débutent, et devraient durer six mois. En particulier, la chaudière sera testée avec une alimentation au biométhane. «En combinant la chaudière et le captage de dioxyde de carbone avec du biogaz, on crée un puit de carbone. C’est-à-dire qu'on arrive à un bilan carbone négatif !», se félicite Xavier Nicolas.
L'industrie agroalimentaire très intéressée
Une fois les tests terminés, la commercialisation sera lancée sous la marque Ch0C. Déjà de nombreux industriels se montrent intéressés, tant pour l'efficacité énergétique que pour la captation de dioxyde de carbone alimentaire. Au sein du consortium, on retrouve ainsi d'importants acteurs de l'agroalimentaire comme Coca Cola, Agrial, Bonduelle ou AgroMousquetaires. «L'axe énergie fait partie de notre plan climat qui prévoit une réduction de 35 % de nos émissions d'ici 2035, témoigne Alexis Marcheux, responsable innovation process chez Agrial. Cette chaudière pourrait être une réponse…»
Naldeo souhaite en tout cas placer sa Ch0C sur la gamme de puissance des chaudières de un à 20 MW... et 2 000 unités de ce type existent en France. Si les performances se confirment, en remplacer la moitié par cette nouvelle technologie pourrait éviter l'émission de quatre millions de tonnes de dioxyde de carbone. Les chaudières représentent, toute énergie confondue, 23% des émissions globales de carbone de l'industrie française.
Benoit Delabre