Dermatose: un troupeau abattu dans le Doubs malgré une mobilisation
Des centaines de manifestants et des recours devant le tribunal administratif n'y auront rien changé: un troupeau de vaches, pourtant vaccinées contre la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) a été abattu...
Des centaines de manifestants et des recours devant le tribunal administratif n'y auront rien changé: un troupeau de vaches, pourtant vaccinées contre la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) a été abattu mardi dans une ferme du Doubs.
Les forces de l'ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes dans la matinée afin d'évacuer des manifestants qui s'étaient rassemblés dans cette ferme de Pouilley-Français pour empêcher la mise à mort de 83 bovins.
"C'était ultra-violent", a dénoncé Stéphane Galais, porte-parole national de la Confédération paysanne présent sur place. "On ne supporte plus cette façon autoritaire de gérer les crises sanitaires".
Dans un communiqué, la préfecture a fait état de quelque 300 manifestants, face à "un dispositif de sécurité composé de 175 gendarmes". Le préfet du Doubs, Rémi Bastille, avait interdit la veille toute manifestation "aux abords de l'exploitation".
"Les forces de l'ordre ont effectué un tir défensif de LBD face à des tracteurs en mouvement vers des gendarmes, mais aucune personne n'a été blessée", a indiqué la préfecture.
Deux personnes ont été interpellées dans cette exploitation située à une quinzaine de kilomètres de Besançon, dont le propriétaire Cédric Lhomme avait lancé un appel, relayé par la Coordination rurale et la Confédération paysanne, à se rassembler afin d'empêcher les abattages.
Elles sont poursuivies pour "violence avec arme" et refus d'obtempérer par conducteur d'un véhicule, selon le procureur de Besançon, Cédric Logelin. Le conducteur d'un tracteur "a été touché à l'épaule" et les deux gardés à vue ont subi des examens médicaux.
- Vaccination "trop tardive"
Les manifestants ont quitté les lieux peu après la décision du tribunal administratif de Besançon, qui a rejeté en début d'après-midi le recours en référé d'organisations agricoles qui demandaient d'épargner les animaux. L'abattage total a finalement eu lieu dans l'après-midi, en présence des gendarmes, a indiqué Nathalie Valleix, secrétaire générale de la préfecture.
L'éleveur sera soutenu financièrement afin de "se relever de cette épreuve", via notamment des avances de trésorerie. Il touchera 2.100 euros par bête et sera indemnisé "de l'improductivité liée à la rupture de cheptel pendant quelques semaines", a-t-elle précisé.
Dans cette ferme, les bovins avaient pourtant été vaccinés contre la DNC, et ce depuis plus de 30 jours, mais une vache a été testée positive vendredi.
Or, pour stopper la propagation de la maladie, transmise via des insectes piqueurs mais qui n'atteint pas l'homme, les autorités ont imposé d'abattre toutes les bêtes d'un troupeau vivant ensemble dès qu'un cas était détecté.
Dans son ordonnance, le tribunal souligne que la "présence d'une bête contaminée démontre que la vaccination de l'ensemble du cheptel a été réalisée trop tardivement pour le prémunir de la dermatose nodulaire", et fait courir des risques aux exploitations voisines.
Sourde oreille
Pour Bruno Vincent, directeur départemental de la protection des populations, l'animal infecté avait "une charge virale extrêmement forte". En outre, les manifestants venus mardi soutenir l'éleveur ont fait courir un risque "tout à fait réel pour d'autres élevages", car ils ont pu repartir avec du fumier contaminé sous leurs pieds, a-t-il souligné lors d'une conférence de presse à la préfecture.
Céline Lhomme, l'épouse de l'exploitant, a plus tôt déclaré à l'AFP que la vache en question allait "très bien" et que les nodules apparus pourraient être liés à sa vaccination.
Elle a indiqué avoir demandé à la ministre de l'Agriculture Annie Genevard, originaire du Doubs, d'intervenir. "Elle fait la sourde oreille, on n'a aucune nouvelle", a regretté Mme Lhomme. Sollicité, le ministère de l'Agriculture n'a pas réagi dans l'immédiat.
Dans un communiqué, la Coordination Rurale a "fermement condamné" l'abattage, jugeant le principe de précaution appliqué par l'Etat "poussé à l'extrême" et invitant la ministre à "revoir sa position et la stratégie sanitaire".
A l'autre bout du pays, une centaine de manifestants ont aussi tenté lundi de s'opposer à l'abattage, dans les Pyrénées-Orientales, d'environ 80 bovins dans le cadre de la lutte contre la DNC, avant d'être délogés par les gendarmes.
Sur environ 2.700 animaux euthanasiés en France depuis cinq mois, plus de 1.700 l'ont été dans une zone se partageant entre la Haute-Savoie, la Savoie et l'Ain, premier foyer de l'épizootie qui frappe désormais dans les Pyrénées et le Doubs.
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