Du côté des tribunaux : l’entreprise et les salariés
Revue de récentes décisions de justice en matière de droit du travail.
Sanctions et licenciements
Aux termes de l'article L. 1332-4 du Code du travail aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu, dans le même délai, à l'exercice de poursuites pénales. Dès lors que les faits sanctionnés ont été commis plus de deux mois avant l'engagement des poursuites disciplinaires, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve qu'il n'en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l'engagement de ces poursuites. (Lyon, 08 octobre 2025, RG n° 22/06899)
Aucun texte n'oblige l'employeur à prendre une mesure conservatoire avant d'ouvrir une procédure de licenciement motivée par une faute grave (Amiens, 8 octobre 2025, RG n° 24/02677)
L'insuffisance professionnelle consiste en l'incapacité du salarié à exécuter son travail de façon satisfaisante, sans que cela corresponde à une défaillance passagère, alors que l'employeur lui a donné tous les moyens pour qu'il puisse faire ses preuves, en temps et en formation. Pour constituer une cause légitime de rupture, l'insuffisance professionnelle doit être établie par des éléments objectifs, constatée sur une période suffisamment longue pour ne pas apparaître comme passagère ou conjoncturelle, et être directement imputable au salarié, et non la conséquence d'une conjoncture économique difficile ou du propre comportement de l'employeur. Son appréciation relève du pouvoir de direction de l'employeur, mais doit reposer sur des faits précis et matériellement vérifiables. La charge de la preuve de l'insuffisance professionnelle est partagée entre les parties. (Amiens, 8 octobre 2025, RG n° 24/02942)
Indépendamment du caractère réel et sérieux de la cause d'un licenciement, les circonstances de la rupture peuvent constituer une faute de l'employeur ouvrant droit pour le salarié à la réparation du préjudice qui en résulte pour lui. Néanmoins, le seul recours à une procédure de licenciement pour faute grave, même si elle n'est pas justifiée, ne constitue pas en soi un procédé brutal et vexatoire, y compris lorsqu'elle emporte obligation par le salarié de restituer son logement et sa voiture de fonction. (Amiens, 8 octobre 2025, RG n° 24/02677)
Le juge a le pouvoir de requalifier la gravité de la faute reprochée au salarié en restituant aux faits leur exacte qualification juridique, conformément à l'article 12 du Code de procédure civile ; en conséquence, si le juge ne peut ajouter d'autres faits à ceux invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement, lorsque celui-ci intervient pour motif disciplinaire, il doit rechercher si ces faits, à défaut de caractériser une faute grave, ne constituent pas néanmoins une cause réelle et sérieuse de licenciement. (Paris, pôle 6, chambre 11, 14 octobre 2025, RG n° 22/06990)
Dans le cadre d'un licenciement économique, il appartient à l'employeur de justifier qu'il a recherché toutes les possibilités de reclassement existantes ou qu'un reclassement était impossible. Il doit ainsi rapporter la preuve qu'il s'est acquitté de cette obligation de reclassement, qui constitue une obligation de moyens, par une recherche sérieuse, loyale et active de tous les postes disponibles et appropriés ; son inobservation privant le licenciement de cause réelle et sérieuse. (Paris, pôle 6, Ch.5, 14 octobre 2025, RG n° 22/08628)
Harcèlement moral
Dès lors que sont caractérisés des agissements répétés, fussent sur une brève période, le harcèlement moral est constitué, indépendamment de l'intention de son auteur. (Paris, Pôle 6, Ch.11, 14 octobre 2025, RG n° 22/06990)