Entreprises
Emploi des seniors et dialogue social : ce que prévoit la loi nouvelle
La loi sur l’emploi des salariés « expérimentés » et l’évolution du dialogue social a été publiée au Journal officiel. Revue de l’essentiel des mesures.
La France affiche un taux d’emploi des 60-64 ans bien inférieur à celui de ses voisins européens. Seulement 38,9 % (en 2023), contre plus de 65 % en Allemagne et près de 69 % en Suède. Un écart significatif, alors même que les enjeux démographiques imposent de nouveaux leviers de maintien en activité.
Qui plus est on constate, bien souvent, en France, le déficit dans le dialogue social. La loi adoptée vise à renforcer ce dialogue. Toutefois, les mesures seront-elles suffisantes sachant que l'audience des syndicats dans notre pays est faible…
C’est dans ce contexte que le gouvernement a engagé les partenaires sociaux dans une série de négociations. Celles-ci ont donné lieu à trois accords nationaux interprofessionnels (ANI), qui ont été transposés dans la loi du 24 octobre 2025 (n° 2025-989).
Contrat de valorisation de l’expérience, en test pendant cinq ans
Est expérimenté, jusqu’au 24 octobre 2030, un nouveau « contrat de valorisation de l’expérience » (CVE) réservé aux salariés inscrits à France Travail de 60 ans ou plus (ou 57 ans, sous conditions). Un bilan est prévu pour envisager sa généralisation si les résultats sont positifs. Pour ce contrat, le texte prévoit, notamment, une exonération de la contribution patronale spécifique sur l’indemnité de mise à la retraite.
L’objectif est de faciliter le retour à l’emploi des seniors, tout en sécurisant leur parcours. Le texte encadre également la mise à la retraite, qui ne pourra intervenir qu’à l’âge du taux plein. Et pour éviter les effets d’aubaine, le texte précise qu’un CVE ne pourra être signé avec un ancien salarié déjà employé dans les deux dernières années.
Ce contrat reste un CDI classique dans ses droits et sa structure. Mais il intègre des particularités majeures : ainsi, l’employeur peut mettre à la retraite le salarié dès qu’il atteint l’âge légal et le taux plein, ou 67 ans (taux plein automatique). En pratique, à l’embauche, le salarié doit fournir un document de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) précisant la date prévisionnelle de son taux plein, afin de sécuriser le suivi du dossier. Le contrat peut se terminer selon les voies classiques (démission, rupture conventionnelle, licenciement) ou par mise à la retraite, selon les conditions prévues.
Négociations obligatoires sur l’emploi des seniors
Le texte impose un renforcement du dialogue social sur le sujet. Les branches devront négocier au moins tous les quatre ans sur l’emploi et le travail des salariés seniors. Et dans les entreprises de plus de 300 salariés, cette négociation devra être différenciée des autres négociations.
La loi élargit également le périmètre des discussions. La santé au travail, la prévention des risques professionnels, et l’organisation et les conditions de travail deviennent des thèmes obligatoires.
Parcours professionnel, de nouvelles obligations pour les employeurs
L’entretien professionnel devient « entretien de parcours professionnel », organisé tous les quatre ans (au lieu de deux), avec un bilan tous les huit ans. Deux nouveaux rendez-vous sont prévus :
- un entretien de mi-carrière, lié à la visite médicale correspondante ;
- un entretien de fin de carrière entre 58 et 60 ans.
CSE : la fin des mandats limités
Le texte prévoit la suppression de la limite de trois mandats successifs pour les élus du comité social et économique (CSE). Une disposition censée redonner de la flexibilité aux parcours syndicaux.
Une justification renforcée, en cas de refus de la retraite progressive
Auparavant, l’employeur pouvait refuser la retraite progressive dans un délai de deux mois à compter de la réception de la demande, en cas d’incompatibilité de la durée de travail demandée par le salarié avec l’activité économique de l’entreprise. Désormais, il devra, notamment, rendre compte des conséquences de la réduction de la durée de travail sollicitée sur la continuité de l’activité de l’entreprise ou du service ainsi que, si elles impliquent un recrutement, des difficultés pour y procéder sur le poste concerné.
Rappelons, en outre, que le dispositif de la retraite progressive, est devenu accessible à partir de 60 ans contre 62 ans auparavant, et permet aux salariés de bénéficier d’une fraction de leur retraite tout en exerçant une activité professionnelle réduite, pour continuer à améliorer leurs droits à la retraite. Pour en profiter, le salarié doit avoir cotisé pendant au moins 150 trimestres. Dans le détail, sont concernés : les assurés relevant du régime général, du régime des salariés et non-salariés agricoles et des régimes d’assurance vieillesse des professions libérales et des avocats.