Industrie/ Bateaux
Filière nautique française : l’espoir d’une reprise en 2026
La filière nautique française montre en cette fin d’année 2025 des signes de reprise après un premier semestre difficile et une baisse de régime inquiétante ces deux dernières années, suite à l’euphorie ‘post-Covid’ de 2022.
Faut-il y voir un effet ‘boosteur’ du salon Paris Nautic Show tenu, fin novembre, pour la première fois au Bourget (40 000 visiteurs) après trois ans d’interruption ? Rendez-vous est déjà fixé pour 2026, du 25 au 29 novembre. L’attrait croissant pour les courses au large (Route du Rhum, Transat Café L’Or, Solitaire du Figaro…) y est sans doute pour quelque chose. Le secteur du nautisme veut croire à une embellie en 2026.
Le début d’année 2025 avait enregistré une forte baisse des ventes de bateaux neufs (de -10 à -30%, selon les catégories de bateaux, le marché des voiliers ayant le plus souffert). La France - premier marché européen - a été fortement affecté, comme les Etats-Unis. Renversement cet été : les commandes du deuxième semestre - traditionnellement liées aux salons - ont auguré d’une amélioration pour 2026, notamment dans le haut de gamme - yachts et grands catamarans. Mais le secteur reste fragile, en pleine mutation. A preuve, le redressement judiciaire de Neel Trimarans à La Rochelle début décembre, ou encore les difficultés de Sirena, au Pouliguen (44).
La FIN, Fédération des industries nautiques, enregistrait en octobre un repli de 14,8 % des ventes du neuf, mais se rassurait du fait que la pratique nautique en France reste « très forte » en loisirs et que les ventes d’occasion résistent bien (environ 65 000 par an). Le parc total de bateaux avoisine le million d’unités.
Un secteur très fortement exportateur
La France qui produit environ 3 500 voiliers et 10 000 bateaux à moteur par an, compte 4 millions de plaisanciers réguliers et 11 millions occasionnels. Les immatriculations de bateaux ne devraient plus baisser et se stabiliser à 9 000 unités par an, dont 75% de bateaux à moteur.
Il est vrai que, outre ses deux façades maritimes, l’Hexagone bénéficie de voies d’eau navigables (8 500 km) et de nombreux plans d’eau ouverts à la navigation. Avec ces atouts, ses 150 000 emplois, dont plus de 45 000 emplois directs dans 6 000 entreprises, la filière nautique française dépasse encore les 6 Mds € de chiffre d’affaires, dont 80% à l’export. Pourtant, les discussions sur les droits de douane laissent planer des incertitudes géopolitiques, notamment vers les Etats-Unis (un quart des exportations).
Le vaisseau amiral de la filière - le groupe vendéen Bénéteau (6 500 salariés environ) en a fait les frais ; il concentre neuf marques nautiques - dont Beneteau, Jeanneau, Prestige, Lagoon… Son chiffre d’affaires devrait se maintenir autour de 1 Md € (après cession de son activité de résidences mobiles). A noter que ses commandes ont augmenté de 30% depuis cet été, d’abord dans le haut de gamme (cf. le catamaran Nautitech 48 Open à 1 M€). Il reste donc à convaincre que la plaisance n’est pas réservée à quelques privilégiés (un bateau à moteur, best-seller, comme le Jeanneau Cap Camarat 5.5 CC, coûte environ 35 000 €).
En septembre 2025, l’État et la filière nautique ont signé une feuille de route 2025-2030, pour financer la déconstruction des bateaux hors d’usage, pour simplifier les statuts des navires, modifier les diplômes professionnels et soutenir la transition écologique des ports de plaisance (propulsion électrique hybride). Un Institut national du nautisme (INN) a été créé. Des parlementaires qui proposaient de porter la TVA à 33 % sur les bateaux de plaisance, ont été déboutés : la filière, soutenue par la ministre de la Mer et de la Pêche, Catherine Chabaud (navigatrice, journaliste) a invoqué une proposition « punitive ».
Les innovations éco-responsables tirent le marché
Comme vu sur le Salon Nautic Show, le secteur compte bien se relancer grâce à des facilités de financement et des innovations « éco-responsables », dont les motorisations hybrides qui devraient progresser de 10 à 15% par an. Celles-ci s’appliquent d’abord à des manœuvres portuaires ou à des trajets courts. Mentionnons le puissant moteur hors-bord électrique Temo 1000 Outpod, lauréat du prix de l’innovation 2025, ou encore, en hybride, le Sea Loft 480 de Jeanneau, couvert de panneaux solaires.
Pour la haute mer, la motorisation électrique offre encore des capacités limitées. Cependant des réalisations prometteuses voient le jour s’agissant de cargos équipés de voiles comme le Neoliner Origin ( de Neoline, 136 m, capacité de fret de 5 300 tonnes, avec 3 000 m2 de voiles rigides) ; conçu par Mauric (Marseille, Nantes), construit à Saint-Nazaire (grément, voiles) et en Turquie, il a effectué, avec succès, en octobre dernier, sa première traversée de l’Atlantique. Parmi les autres projets méritant d’être suivis, citons celui co-conçu par le célèbre skipper ingénieur François Gabart : le méga-catamaran Vela de VPLP (67 m, 1 500 m2 de voiles pour 410 tonnes de fret). Tout droit sorti de la fiction, il commence à convaincre.