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Entreprises

La laborieuse décarbonation du transport de marchandises

Les entreprises de transport de marchandises ont entamé leur démarche de décarbonation, mais les difficultés empêchent sa généralisation ont témoigné des professionnels, lors d'une récente rencontre organisée par TLF, Union des entreprises de transport et de logistique en France.

 

© Adobe Stock.
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« Sans transport, pas d'économie » rappelait Philippe Cuoc, directeur général du groupe Jacky Perrenot, géant de la logistique et du transport (1,3 milliard d'euros de chiffre d'affaires). Le 26 juin, à Paris, en marge de l'Assemblée générale de TLF, Union des entreprises de transport et de logistique en France, une table ronde était consacrée aux enjeux des transporteurs de marchandises. Le secteur fait notamment face à un « immense défi », souligne Loïc Chavaroche, directeur développement durable et ESG pour le groupe Sterne (550 millions d'euros de chiffre d'affaires) : à horizon 2030, il lui manque 70 000 chauffeurs. Mais un autre sujet préoccupe aussi les professionnels : la décarbonation. « Selon les études, on évalue la part des transports routiers de marchandises à 10 à 15% des émissions de gaz à effet de serre. Mais il y a eu une très forte augmentation du fret ces dernières années. Si on prend le ratio au km, on constate un effort très important» de la profession, poursuit Loïc Chavaroche. Par exemple,le groupe Jacky Perrenot s'est engagé dans la décarbonation de sa flotte depuis 2010 (gaz). « Sur 600 moteurs, plus de 20% sont en énergie alternative », poursuit Philippe Cuoc. Dans le groupe Warning, spécialiste du transport et de la logistique du dernier kilomètre (180 millions d'euros de chiffre d'affaires), les premiers achats de véhicules électriques remontent à 2015 et 30% de la flotte est aujourd'hui constituée de véhicules électriques, au gaz ou fonctionne en cyclologistique. « Chaque ville est un cas particulier, et les clients ont des exigences particulières ce qui impose une diversité de solutions », explique Eric Bonnac, président du groupe.

Les déboires de l'électrique

Les écueils à la décarbonation du secteur sont nombreux. Et la voie de l'électrique, qui fait partie du mix des solutions, semble concentrer les difficultés. A commencer par la disponibilité des véhicules. « Nous avons eu du mal à en acquérir car les délais de commande sont très longs », explique Eric Bonnac. De plus, pour lui, l'offre demeure « assez faible » technologiquement. Elle n'a pas beaucoup évolué ces dernières années. Mais c'est le différentiel de prix de l'électrique (qui peut aller jusqu'à 30% tous frais compris) qui représente véritablement un problème, pour Loïc Chavaroche.

Pour l'ensemble de ces professionnels, ces prix élevés posent la question du partage du coût de cette transition. Elle ne pourra pas être prise en charge exclusivement par les transporteurs, d'autant que leurs marges, faibles, leur interdisent des investissements importants, préviennent-ils. « Aujourd'hui, on est capable de le faire sur de petits volumes. A grande échelle, ce n'est pas soutenable pour qui que ce soit », note Philippe Cuoc.

Sous-jacent, c'est la politique publique qui est en cause. «On veut éliminer le CO2 de notre environnement, mais on ne le taxe pas. On donne des incentives par ci par là pour aller sur une énergie propre et électrique, mais nous avons besoin d'un cadre légal, fiscal, stable et qui nous donne de la visibilité sur les prochaines années. En effet, tout investissement dans une transition énergétique se fait sur plusieurs années », conclut Philippe Cuoc.


La livraison ubérisée ?
Depuis une dizaine d'années, les transporteurs du dernier kilomètre ont vu arriver des concurrents nouveaux : des applications qui proposent aux individus de transporter des paquets pour le compte d'autres. « Ils sont payés au pourboire.(...) Nos clients les payent 5 à 6 euros, au lieu de 15 à 18 », déplore Eric Bonnac, président de Warning spécialiste du transport et de la logistique du dernier km, qui a dû licencier.