Sauvegarder l'article
Identifiez vous, pour sauvegarder ce article et le consulter plus tard !

Conjoncture

TPE-PME : comment l’incertitude brouille leur horizon économique

En cette fin 2025, l’instabilité politique et la faiblesse de la demande pèsent fortement sur la trésorerie et l’investissement des TME-PME, selon BPI France Le lab. Malgré ce climat dégradé, une partie des dirigeants observe une activité plus solide que prévu, révélant une résilience économique sous-estimée.


Le baromètre du quatrième trimestre Bpifrance Le Lab/ Rexecode, publié mi-novembre, dresse un tableau de fin d’année assombri pour les TPE et PME. À mesure que l’incertitude budgétaire et politique s’est installée, celles-ci voient leur horizon se brouiller. Interrogés du 13 au 24 octobre, plus de 1 100 dirigeants ont répondu à cette enquête et leurs signaux convergent vers un même constat : la confiance s’effrite, fragilisant à la fois la trésorerie, la demande et l’investissement.

Trésorerie fragilisée et demande insuffisante

La dégradation de la situation financière observée depuis deux ans se poursuit. Tous les indicateurs liés à la trésorerie décrochent, qu’il s’agisse du diagnostic récent, de l’évaluation du moment ou des projections à court terme. Ils restent nettement en deçà des standards constatés depuis la création du baromètre, en 2018 : 36% des chefs d’entreprise signalent une trésorerie détériorée au cours des trois derniers mois. Dans le même temps, les tensions sur le financement courant se renforcent : 22% évoquent des difficultés d’accès au crédit de trésorerie, en hausse notable par rapport aux niveaux habituels.

Le frein majeur à leur croissance demeure la faiblesse de la demande, un constat partagé par 66% des dirigeants. Ce niveau constitue un record hors période Covid, dépassant le pic précédent de 64% enregistré au trimestre précédent. À l’inverse, les difficultés de recrutement, longtemps au cœur des préoccupations, refluent nettement : seuls 33% des répondants les citent encore, un niveau qui renoue avec celui observé lors de la crise sanitaire, signe d’un marché du travail moins tendu.

Le climat politique pèse lourdement sur l’activité des TPE-PME. La quasi-totalité (92%) des dirigeants expriment leur inquiétude face au contexte actuel. Beaucoup, 62%, redoutent un impact négatif de « forte ampleur », dépassant le record de 61% noté en février dernier. Les discussions prolongées autour du budget de l’Etat et de celui de la sécurité sociale (en passe d’être adopté) et l’absence de visibilité fiscale affectent l’activité, mais surtout les arbitrages en matière d’embauche et d’investissement.

Investir devient un pari

Résultat, les projets d’investissement se contractent. Seuls 39% des dirigeants envisagent d’investir cette année, vs 45% au trimestre précédent. Cette proportion n’avait pas été aussi faible depuis la crise sanitaire. Le report devient la norme : près de la moitié des entreprises concernées (49%) repoussent leurs plans (+6 points), tandis qu’une minorité (29%) choisit de les maintenir. Les dépenses prévues se concentrent surtout sur le renouvellement d’équipements, au détriment des projets d’extension de capacité ou de l’innovation. Les investissements environnementaux perdent aussi du terrain, bien qu’ils restent supérieurs à leur niveau d’avant pandémie. La tension sur les taux souverains, alimentée par les incertitudes politiques et le déficit public, alourdit le coût du crédit pour les entreprises : 31 % des dirigeants anticipent une hausse des taux. Mais « les conditions de financement sont un facteur secondaire de remise en question des investissements, loin derrière le manque de visibilité en termes de politique économique et d’évolution de la demande. », note l’étude

Une résilience discrète, mais réelle.

Point encourageant, la perception négative du climat politique ne coïncide pas totalement avec les réalités économiques. Plus d’un tiers des dirigeants ne cèdent pas à la morosité ambiante (34%) et estiment que le niveau de leur activité dépasse la vision pessimiste alimentée par l’actualité. Les indicateurs macroéconomiques confirment cette divergence : la croissance du PIB a dépassé les attentes au troisième trimestre (+0,5%) et les investissements des entreprises ont progressé de 0,9% par rapport au second .

Pour envisager l’avenir avec davantage de sérénité, plus des deux tiers des dirigeants réclament une meilleure lisibilité des comptes publics. Logiquement, 47% jugent indispensable un regain de confiance des ménages pour relancer la demande. D’autres attendent un apaisement des tensions internationales (36%) ou davantage de clarté sur les normes et réglementations (28%).

AÏcha BAGHDAD et B.L