Logistique

« La clé de voûte, c’est le supply chain management », Laurent Desprez, directeur du pôle Euralogistic

Du fait de la crise sanitaire comme de l’actualité géopolitique, mais aussi de l’avènement du digital et d’innovations majeures, la filière logistique a vu ses fondamentaux bouleversés. Décryptage avec Laurent Desprez, directeur d’Euralogistic, pôle d’excellence logistique et supply chain en Hauts-de-France.

Laurent Desprez, directeur du pôle Euralogistic.
Laurent Desprez, directeur du pôle Euralogistic.

Covid, Brexit, guerre en Ukraine, engorgement des ports asiatiques… Les acteurs de la logistique en région comme partout dans le monde sont entrés dans « une période de rupture » selon Laurent Desprez : « L’environnement général a complètement changé. »

Le supply chain management, pilier de demain

Autrement dit, les modèles d’hier ne sont plus en adéquation avec la réalité d’aujourd’hui et doivent être repensés. « D’autres crises vont arriver et les modèles doivent être revus… La gestion de la production, par exemple, ne peut plus uniquement se baser sur l’historique de ventes. Ce qui était huilé ne l’est plus tout à fait ! Et la clé de voûte, c’est l’humain, c’est le supply chain management. »

Le supply chain management définit en effet l'ensemble des ressources, moyens, méthodes, outils et techniques destinés à piloter le plus efficacement possible la chaîne globale d’approvisionnement, du premier fournisseur jusqu’au client final. Donc l’ensemble des métiers permettant de délivrer le juste produit, à l’endroit souhaité et dans les délais impartis, tout en assurant une maîtrise optimale des coûts et de la qualité. « Ce sont des fonctions aujourd’hui attractives et qui offrent de belles opportunités de progression. »

Il poursuit : « De nombreux efforts ont été faits sur les conditions de travail car bien vivre au travail est fondamental ! La logistique, c’est une cinquantaine de métiers ouverts aux hommes comme aux femmes, ainsi qu’aux personnes à mobilité réduite. » Malgré tout, les acteurs du secteur sont confrontés à des difficultés de recrutement. « L’ancien bassin minier dispose d’une main-d'œuvre mobilisable, mais d’une manière générale c’est compliqué, il y a une pénurie qui peut être un facteur négatif pour le développement de certaines entreprises. »

C’est aussi pour renforcer l’attractivité des métiers de la filière que le pôle a lancé le Logistic’Tour, un parcours ludique de découverte des métiers du transport, de la logistique et du supply chain management qui a accueilli près de 2 500 personnes en 2021.

Deux défis majeurs : la logistique verte et de l’innovation

L’un des défis majeurs réside par ailleurs dans la green logistic ou comment intégrer une démarche écologique dans la gestion des processus logistiques afin de réduire leur impact sur l’environnement. 

Revalorisation de friches industrielles, autoconsommation énergétique, traitement des déchets et des eaux usées, végétalisation… autant de thématiques qui sont désormais au cœur des process. 

« Nous devons être avant-gardistes dans la prise en considération de l’écoresponsabilité des entrepôts, c’est le sens de l’histoire ! C’est également vrai pour les moyens de transport. Le canal Seine-Nord Europe est par exemple vecteur de nombreuses innovations dans le fluvial et les entreprises doivent anticiper aujourd’hui la façon de l’utiliser demain. »

L’innovation est également identifiée par Laurent Desprez comme un pilier de l’avenir. « Beaucoup de fonds d’investissement ont misé sur des start-up », rappelle-t-il à cet égard. On parle ici davantage de "cobotique" que de robotique, avec des dispositifs conçus pour interagir et coopérer avec les humains, qui resteront plus que jamais la valeur ajoutée de la filière logistique, avec en toile de fond la productivité et la pénibilité au travail. Et de conclure : « Les Hauts-de-France sont une terre rêvée pour la logistique. »

Le regard de Philippe Hourdain, président de la CCI Hauts-de-France

« L’emplacement géographique de la région lui permet d’envisager d’être un hub logistique européen. La création de la fédération Norlink, qui assure la promotion des infrastructures portuaires et ferroviaires des Hauts-de-France, va en ce sens. Pour y arriver, il faut que les acteurs de la filière travaillent ensemble, qu’ils se renforcent, et une supply chain pointue. La Cité internationale de la logistique et de la supply chain à Dourges, au cœur de la plateforme multimodale Delta 3, abritera ainsi une école de la logistique. Forte de sa culture de la transition énergétique, la région porte également la green logistic à travers ses missions : développer le transport fluvial et faire de la green logistic le fil rouge de l’ensemble des actions… Nous devons travailler tous ensemble pour que la filière logistique régionale ait une différenciation ! »