Rencontre avec le maire Philippe Evrard

Le Crotoy : premier Village d’avenir de la Somme

L’emblématique commune de la baie de Somme continue d’attirer toujours plus de touristes. Toujours dynamique, elle entend cultiver son authenticité et son attractivité tout en se protégeant des assauts de la mer et de l’ensablement. Elle espère aussi devenir station balnéaire afin d’obtenir ensuite l’autorisation de pouvoir ouvrir un casino. Tour d’horizon avec le maire depuis 2020, Philippe Evrard.

Philippe Evrard, maire depuis 4 ans, présente ici le projet de la médiathèque.
Philippe Evrard, maire depuis 4 ans, présente ici le projet de la médiathèque.

Picardie La Gazette : Quelles sont les particularités de votre commune ?

Philippe Evrard : Le Crotoy compte environ 2 000 habitants à l’année. L’été, la population est multipliée par six voire sept grâce aux neuf campings et les logements Airbnb. Nous n’en connaissons pas le nombre exact, mais il y en a beaucoup. Nous tolérons mais au minimum, car cela occupe des logements qui pourraient bénéficier à des locaux ou des saisonniers. Nous proposons dix logements pour des saisonniers de la commune dans un ancien bâtiment qui a appartenu aux PTT. Nous sommes en train de récupérer une grosse bâtisse en déshérence près du port. On voudrait la réhabiliter en passant par un bailleur qui s’engagerait à signer des baux pour des saisonniers.

En baie de Somme, Le Crotoy reste-t-il emblématique ?

Oui et de plus en plus, il suffit d’observer les flux de touristes même hors saison. Nous ne sommes qu’à une heure trente de Paris par l’autoroute. Nous sommes proches de Lille, de Reims… Les maisons à vendre partent très vite et à des prix élevés. Là aussi c’est un problème pour les locaux. On essaie malgré tout de garder notre âme crotelloise, nous ouvrir au monde tout en gardant nos racines avec nos traditions de village portuaire. Dans le même temps, grâce aux retombées de la taxe de séjour, de la taxe d’aménagement, des campings… nous pouvons continuer à faire des travaux pour améliorer le cadre de vie des habitants.

Ce tourisme permet-il à la commune d’être dynamique ?

En effet, nous avons un regroupement pédagogique concentré de huit classes. Malheureusement, nous en avons perdu une à la rentrée. Les deux maisons médicales comptent une dizaine de professionnels de santé et nous avons une pharmacie. Forcément, il y a beaucoup de restaurants, de brasseries, de métiers de bouche, cinq boulangeries, une fromagerie, des magasins de vêtements, deux débits de tabac, une supérette… La rue commerçante est en partie piétonne l’été et ouverte à tout le monde en hiver. Nous avons une dizaine d’artisans. Nos plus grosses entreprises sont trois carrières qui occupent une cinquantaine de salariés. L’activité de pêche existe toujours avec 22 unités. Peu rentrent dans notre port, à part ceux pour la crevette. La majorité stationne au Tréport. Nous avons un port de plaisance d’une centaine d’anneaux. Nous avons un centre équestre que nous remettons aux normes. Nous avons aussi des entreprises qui organisent des balades à pied en baie de Somme ou en bateau, du kitesurf… Le Crotoy c’est aussi un marché qui se déroule toute l’année le vendredi matin. Il y en a un second le mardi durant la période estivale.

Vous êtes la première commune de la Somme a signer un contrat Village d’avenir avec l’Etat ?

En effet, dans ce cadre nous allons bénéficier d’une aide de 80 000 euros pour réaliser des études de faisabilité quand les carriers partiront vers 2025 / 2026 pour aménager les berges d’une base nautique autour d’un plan d’eau de 220 hectares. Elles pourront être utilisées par les écoles de voile. Il pourrait être possible de pratiquer du kayak, de la plongée… Une guinguette pourrait ouvrir également. 80 000 euros c’est une belle aide. On pourra mettre cette somme, que nous aurions été obligés de sortir, dans les travaux d’entretien, dans la poursuite de l’enfouissement des réseaux.… Maintenant, il faut que le plan local d’urbanisme soit accepté. Nous travaillons dessus et l’enquête publique devrait démarrer en début d’année.

Avez-vous d’autres projets ?

Notre médiathèque de 768 m2 devrait ouvrir en juin. Ce sera un bien de culture et social. Elle devrait abriter une antenne de l’office de tourisme et une Maison France Services. Elle sera constituée de la rénovation de l’ancienne école, d’une extension neuve et de la salle communale Colette. Le chantier s’élève à près de 3 millions d'euros, subventionnés à hauteur de 70 % par la DRAC, la région Hauts-de-France et le Département de la Somme. Près du complexe sportif, les travaux d’aménagement de deux terrains de paddle débuteront pour la fin janvier. Ils seront livrés au printemps. Nous allons effectuer des travaux sur l’église du hameau de Saint-Firmin et sur notre église Saint-Pierre. Cette dernière est classée monument historique. Nous allons adhérer à la fondation du patrimoine pour aller chercher des fonds car les travaux sont évalués à 600 000 euros.

Qu’en est-il de la problématique de l’ensablement du bassin des chasses ?

Cela appartient au département. J’ai été informé qu’un appel d’offres quasi international serait lancé. Pas moins de 1, 3 million de m3 de sédiments sont à retirer sur 64 hectares, ce qui est considérable. Le sable devrait être valorisé par la suite. Les bateaux pourront accéder aux ports de pêche et de plaisance plus facilement. Régulièrement, nous faisons appel au syndicat mixte baie de Somme grand littoral picard pour retirer 20 000 m3 de sédiments au niveau du port de pêche. Ils sont utilisés pour renforcer la plage. Cela nous coute 250 000 euros par an.

Le curage du bassin des chasses est enfin sur les rails

Le Crotoy est la seule plage du nord exposée au sud. Pourra t-on un jour s’y baigner ?

La commune a tout fait pour éviter ce genre de pollution. Mes prédécesseurs ont notamment fait construire une station d’épuration qui a couté 5 millions d’euros. Ca ne vient pas non plus des campings mais de l’arrière-pays. La pollution a pour origine des particuliers qui n’ont pas fait installer de système d’assainissement, des épandages réalisés dans les champs… C’est d’ailleurs en septembre que les taux sont les plus élevés. Si personne ne fait rien à l’amont, cela risque de perdurer… La communauté de communes Ponthieu-Marquenterre et le service public d'assainissement non collectif sont saisis du problème.

Le front de mer va bientôt changer ?

Oui, dans le cadre du programme d’action de prévention des inondations des travaux seront menés par le syndicat mixte baie de Somme grand littoral picard, il est prévu de réhausser à partir de septembre 2025 le muret de la digue quai Léonard, d’aménager la place Jeanne-d’Arc puis le quai Courbet. Le mobilier urbain sera amélioré. Ces travaux qui portent sur 4 millions d’euros seront financés par l’Etat et l’Europe. Ils sont prévus pour durer deux ans et seront effectués en dehors de la saison touristique.

Dès l’an prochain, des travaux seront menés sur le front de mer.

Vous espérez aussi être classés station balnéaire ?

Oui. La communauté de communes Ponthieu-Marquenterre doit monter le dossier avec l’office de tourisme. Cela pourrait nous amener plus de dotations. On pourrait aussi envisager de demander l’autorisation au ministère de l’Intérieur pour pouvoir faire construire un casino près du centre conchylicole, qui abriterait par exemple une salle de cinéma. Un casino est pourvoyeur d’emplois et d’activités.