Loi Duplomb: après le succès de la pétition, la gauche promet de se mobiliser au Parlement
Forts du succès exponentiel de la pétition contre la loi Duplomb, la gauche et les écologistes ont promis lundi de maintenir la pression à l'automne autour de l'abrogation du texte...

Forts du succès exponentiel de la pétition contre la loi Duplomb, la gauche et les écologistes ont promis lundi de maintenir la pression à l'automne autour de l'abrogation du texte agricole, décrié pour son impact environnemental.
Lancée le 10 juillet, deux jours après l'adoption de la loi qui prévoit notamment la réintroduction à titre dérogatoire et sous conditions de l'acétamipride, pesticide de la famille des néonicotinoïdes - interdit en France mais autorisé en Europe -, la pétition avait récolté plus de 1,4 million de signatures lundi après-midi sur le site de l'Assemblée nationale.
Un chiffre largement au-dessus du seuil requis des 500.000 pour obtenir un débat en séance sur cette pétition, si la Conférence des présidents de l'Assemblée nationale, qui fixe l'agenda, en décide ainsi mi-septembre lors de la rentrée parlementaire.
La présidente de l'Assemblée, Yaël Braun-Pivet (Renaissance), s'y est dite "favorable". Tout comme Marine Le Pen, qui avait voté pour la loi, mais a estimé lundi que "seul un débat démocratique" pouvait restaurer "la confiance" des citoyens face aux "mensonges" accompagnant selon elle la pétition.
Ce débat ne permettra toutefois pas un réexamen de la loi sur le fond, ce qui nécessiterait un nouveau texte législatif.
Qu'à cela ne tienne, "c'est une lutte qui ne fait que commencer", a prévenu la députée écologiste Sandrine Rousseau sur franceinfo. "Lors des prochaines niches parlementaires (journées réservées aux textes des groupes politiques, NDLR), chaque groupe du Nouveau Front populaire aura comme texte l'abrogation de la loi Duplomb", a-t-elle assuré.
Les socialistes ont confirmé vouloir porter "à la rentrée une proposition de loi abrogeant les graves reculs de la loi Duplomb".
Bien que n'étant pas à l'origine de la pétition, lancée par une étudiante qui refuse tout contact avec les médias, toute la gauche tente de tirer avantage de cette mobilisation citoyenne.
"C'est une incroyable bonne nouvelle", a estimé sur son blog Jean-Luc Mélenchon (LFI), louant "cette action populaire de masse".
Deuxième délibération
"Instrumentalisation de la gauche et des écologistes", répondent les défenseurs de la loi, en premier lieu son auteur, le sénateur LR Laurent Duplomb. "Quand on diabolise les choses et quand on fait peur à tout le monde, on peut avoir ce résultat".
L'acétamipride est réclamé par les producteurs de betteraves et de noisettes, qui estiment n'avoir aucune alternative contre les ravageurs et subir une concurrence déloyale de leurs concurrents européens.
A contrario, les apiculteurs mettent en garde contre "un tueur d'abeilles". Ses effets sur l'humain sont aussi source de préoccupations, même si les risques restent incertains, faute d'études d'ampleur.
Dans le camp présidentiel, on cherche la bonne formule pour tenir compte du succès de la pétition sans remettre en cause la loi votée au Parlement.
Gabriel Attal, patron du parti présidentiel Renaissance, a ainsi souhaité que le gouvernement saisisse l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) afin qu'elle donne son avis sur le texte en amont de l'éventuel futur débat parlementaire.
"Une pétition ne peut pas défaire la loi mais, si elle respecte les conditions constitutionnelles qui peuvent conduire à un débat à l’Assemblée nationale, nous soutiendrons cette démarche", a de son côté estimé le patron des députés MoDem Marc Fesneau.
Mais pour M. Duplomb, la pétition vise surtout à "mettre de la pression sur le Conseil constitutionnel" qui doit se prononcer sur la loi d'ici au 10 août.
S'il la valide, la gauche appelle Emmanuel Macron à demander alors au Parlement une deuxième délibération, comme le lui permet la Constitution.
Une telle décision déclencherait cependant une crise gouvernementale avec les LR au coeur de l'été.
"Le chemin de cette loi n'est pas terminé puisque le Conseil constitutionnel a été saisi. Le président ne peut dès lors pas s'exprimer tant que les Sages n'ont pas rendu leur décision", a répondu à l'AFP l'entourage d'Emmanuel Macron.
"Je pense que le président de la République est conscient des enjeux de souveraineté", y compris alimentaire, a estimé lundi le président de la FNSEA Arnaud Rousseau.
La loi Duplomb, présentée par ses défenseurs comme une réponse aux manifestations du monde agricole de 2024, contient d'autres mesures controversées, sur le rôle de l'Anses ou le stockage de l'eau pour l'irrigation des cultures (méga-bassines).
Elle cristallise les tensions depuis de nombreux mois.
Lundi, l'entourage du ministre de la Justice Gérald Darmanin a indiqué qu'il demanderait aux procureurs de la République d'être d'une "grande fermeté" face aux "menaces inacceptables" subies par "de nombreux parlementaires" du fait de leur vote sur la loi Duplomb.
Selon le ministère de l'Intérieur, neuf "atteintes" à des parlementaires (dégradations de permanences, outrages sur les réseaux sociaux...) ont été recensés.
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